À moins de 8 mois de l’interdiction de louer des passoires thermiques, les tentatives pour faire annuler le décret d’application échouent. Le Conseil d’État rejette, pour la deuxième fois, les requêtes de l’UNIS (Union des syndicats de l’immobilier) et de l’UNPI (Union nationale des propriétaires immobiliers). À défaut d’annulation, la crise du logement justifiera-t-elle un report des échéances de la loi Climat Résilience ?
Annuler le décret DPE et décence
À l’automne 2023, l’UNIS et l’UNPI demandaient au Conseil d’État d’annuler le décret n°2023-796 du 18 août 2023 pour excès de pouvoir. Ce texte fixe le niveau de performance énergétique minimal à atteindre pour louer un logement décent à compter de janvier 2025. C’est le décret qui permet d’appliquer l’interdiction de location des passoires thermiques et des logements énergivores prévue par la loi Climat Résilience.
L’UNPI et l’UNIS soulèvent une question prioritaire de constitutionnalité, à renvoyer au Conseil constitutionnel. Le 21 décembre 2023, le Conseil d’État estime qu’il n’y a pas lieu de le faire. Le 24 avril 2024, le Conseil d’État rejette à nouveau la demande d’annulation du décret n°2023-796. Le syndicat et la fédération s’engagent-ils dans un combat de longue haleine ? Si oui, il semble perdu d’avance. L’institution publique n’adhère pas à leurs arguments.
Protection de l’environnement et droit de la propriété
Dans sa décision du jeudi du 21 décembre 2023, le Conseil d’État contredit le raisonnement de l’UNIS et de l’UNPI. D’une part, l’instauration d’un niveau de performance énergétique minimal répond à un objectif de valeur constitutionnelle :
- confort thermique, diminution des factures d’énergie des ménages ;
- Protection de l’environnement en matière d’émissions de gaz à effet de serre.
D’autre part, le législateur a prévu une mise en œuvre échelonnée et des exceptions. Il n’y a donc pas d’atteinte au droit de la propriété, mais seulement des limitations justifiées. Dans sa décision du 24 avril 2024, le Conseil d’État réfute l’illégalité du décret. Deuxième revers pour les représentants des syndicats et des propriétaires. À 245 jours de l’entrée en vigueur de l’interdiction de location des passoires thermiques, y en aura-t-il un troisième ?
Report des échéances de la loi Climat Résilience ?
Si les demandes d’annulation n’aboutissent manifestement pas, il reste la question du report du calendrier. Depuis l’été 2023, par exemple, les députés du Rassemblement national entassent des propositions de loi dans les tiroirs de l’Assemblée nationale. Ils utilisent la crise du logement pour s’attaquer aux dispositions de la loi Climat et Résilience. Cependant, au fil des mois, leurs textes deviennent de moins en moins ambitieux.
En juillet 2023, avant la parution du décret d’application, l’article 1er de la proposition de loi n°1461 prévoyait la levée de l’interdiction de location d’un logement mal noté par le DPE. En revanche, l’article 10 de la proposition de loi n°2495 du 11 avril 2024 retarde de trois années la mise en œuvre de l’interdiction de louer les logements classés F et G.
DPE, permis de louer et meublés de tourisme
Nous ne nous aventurerons pas à annoncer le maintien du calendrier. En effet, le Gouvernement a déjà reporté des mesures prévues de longue date. Toutefois, la prise en compte des critères de décence semble plutôt se renforcer. Primo, le permis de louer séduit un nombre grandissant de communes. La loi Habitat dégradé favorise aussi sa généralisation.
Secundo, la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif sera examinée au Sénat dans les prochains jours. En ce moment, le Sénat consulte les élus pour un examen de la proposition de loi en Commission le 7 mai 2024. Son inscription à l’ordre du jour du Sénat est actée. Ce sera le 21 mai 2024 à 12 heures. Or ce texte applique les obligations de DPE et de décence énergétique aux meublés de tourisme.
Mise à jour au 2 mai 2024 : quelques heures après la publication de cet article, la mission d’information sur la crise du logement a rendu ses travaux au Sénat. Elle propose de reporter à 2028 l’interdiction de louer les logements classés G.
il faudrait demander aux détracteurs de ces lois ce qu’ils ont à proposer pour éviter les surconsommations du parc immobilier. Parce qu’il est trop facile de vouloir s’opposer encore et toujours aux évolutions des nécessités de la société sans jamais proposer de solutions viables et efficaces.
Ces gens là ne cherchent qu’à protéger leurs petits intérêts individuels en se foutant royalement de l’intérêt général et surtout de celui des autres.
J’ai une location et je ne vois aucun inconvénients à ce type de restriction.
Nous ne sommes pas des américains et ne souhaite pas les imiter,,quand on voit l’état de leur population, j’ai honte pour eux.
Ils le connaissent depuis de nombreuses années le calendrier législatif. C’est trop facile de venir implorer les autorités pour demander un énième report sous prétexte que se loger est devenu compliqué.
Etre en G cela signifie avoir des fenêtres en simple vitrage, une isolation d’avant 48 ou inexistante, un ballon d’eau chaude situé dans les combles fortement ventilés et des grille-pains des 80′ en guise de chauffage.
Ok pour les petites surfaces qui sont effectivement sources de notes dégradées comparativement aux plus grandes mais de là à dire qu’il faudrait accepter de continuer à louer des passoires thermiques et laisser les locataires se faire engloutir sous les factures pour ne même pas être confortablement au chaud chez eux c’est juste pas possible. Et ces membres du Front National qui font de la politique sous forme de populisme mais qui n’apportent aucune solution c’est bon, ça va ceux-là. regardez leurs votes à l’AN, ce sont des insignifiants qui ne connaissent rien sur pas grand chose. Non il faut mettre au pied du mur les propriétaires récalcitrants et stopper ces locations qui font du mal à tout le monde, en plus des locations sur les plateformes. Et puis les studios et autres appartements des années 70 dans les stations de sport d’hiver et sur la côte, ces résidences ont plus de 50 ans et ont été largement amorties par leurs propriétaires alors qu’ils ne viennent pas pleurer ceux-là aussi.
C’est typiquement le genre d’apriori qu’on la plupart des gens. En utilisant la terminologie de « passoire », le quidam lambda croit qu’un DPE F/G implique forcément un logement délabré.
Exemple personnel, j’ai un DPE à plus de 800 pour 18m2 carrez et ma locataire paye 52€ d’électricité mensuel. Quel gouffre ! Et il faisait 22°C dans l’appartement lorsque je suis passé l’hiver dernier pour une petite réparation.
Dernier étage d’un immeuble <1900, doubles vitrages, chauffe-eau NF2*, radiateur à inertie NF3* oeil, appartement sain.
Malgré l'isolation intégrale de l'appartement (et les risques de condensation), le DPE projeté me permet d'atteindre que le F avec le nouveau barème qui change finalement peu de choses. 15k de travaux sans aides pour quel gain ? 10€/mois de facture en moins ? Et une impossibilité de louer d'ici 3 à 5 ans ?
J'ajoute que tout le monde n'a pas acheté son appartement une bouchée de pain il y a 30 ans.
Il est nécessaire de rénover et d’isoler les appartements. Ceci est indiscutable et si les pouvoirs publics n’avaient pas cédé au dogmatisme et au clientèlisme, si ils avaient un tant sois peu ouvert là consultation aux premiers concernés, les propriétaires bailleurs, qui ne se sentent pas forcément représentés par les syndics de copropriété ou les gros bailleurs institutionnels, il est probable que cette réforme nécessaire sur le fond et qui n’est pas acceptée sur la forme, aurait pu faire l’unanimité…
L’autre problème est l’usine à gaz que sont les aides de l’état qui change aussi souvent que vous de chaussettes pour enfin finir par les opérateurs RGE, pas tous très compétents ni tous très honnêtes.
Bref, c’est comme d’habitude en France, le cirque complet…
Et qui paye ?
Vous évoquez tout au long de votre article une interdiction de location. Dans quel texte l’avez-vous trouvée ? Elle n’est pas dans la loi du 6 juillet 89, l’article 20-1 précisant les conséquences de la location d’un logement indécent au sens de l’article 6 (travaux, réduction du montant du loyer mais pas d’interdiction). La seule hypothèse où l’indécence peut faire obstacle à la location est celle où le propriétaire doit obtenir une autorisation préalable de mise en location, autorisation qui ne sera pas accordée si le logement est indécent au sens de l’article 6 de la loi de 89.
L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dit que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent. Cela signifie que le bailleur n’a pas le droit de remettre au locataire un logement indécent, tout simplement. Cela fait partie de ses obligations. C’est une obligation d’ordre public avec une importance jurisprudence. Citons, par exemple, l’arrêt de la Cour de cassation du 4 juin 2014, n° 13-17.289.
L’autorisation préalable de mise en location n’a été instaurée que pour renforcer cette disposition et lutter contre les marchands de sommeil.
Votre interprétation de l’article 6 ne correspond pas à l’état du droit positif (ni à la position de nombreux spécialistes de la matière). Le fait qu’il s’agisse d’une obligation d’ordre public n’implique nullement que la sanction y correspondant soit une interdiction de location (nos politiciens qui déclarent sans arrêt le contraire ne sont pas des juristes et les médias reprennent leurs propos sans en vérifier l’exactitude juridique). Les sanctions de l’absence de respect de l’obligation de remettre un logement décent sont prévues à l’article 20-1 de la loi de 89. Et vous n’y trouverez pas l’interdiction de louer que vous évoquez. Quant à l’arrêt que vous citez, il précise que les juges d’appel ont condamné à bon droit le bailleur à mettre en place une installation de chauffage parce que le logement loué n’en contenait pas et n’était donc pas décent. Il n’y est nullement question d’une interdiction de location mais de la mise en œuvre de l’article 20-1 de la loi de 89.
J’ai oublié de mentionner aussi le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002. Le bailleur sera contraint de faire des travaux de mise en conformité. Il peut également être condamné à une amende, à de l’emprisonnement, etc. S’il ne peut pas faire les travaux, la loi l’autorise à procéder à la rupture du bail locatif. En cas de mesure administrative (insalubrité, péril…), le versement du loyer est suspendu dés la réception de l’injonction et le propriétaire doit alors faire une offre de relogement au locataire, adapté aux besoins de ce dernier.
Je n’interprète rien et je ne cherche à convaincre personne. Le ministère de la Transition énergétique parle aussi « d’interdiction de location » : https://www.ecologie.gouv.fr/interdiction-location-et-gel-des-loyers-des-passoires-energetiques expression que vous retrouverez sur de nombreux sites gouvernementaux et administratifs.
Le décret de 2002 précise les critères de décence et ne contient pas d’interdiction de location. La décence ne doit pas être confondue avec les situations d’habitat dégradé. Relativement à l’habitat dégradé, la notion de « péril » n’est plus utilisée depuis un petit moment. Il s’agit désormais d’arrêtés d’insalubrité ou de mise en sécurité. Ce que vous indiquez pour la rupture du bail et le relogement concerne l’habitat dégradé (insalubre ou non sécurisé), pas le logement indécent. Enfin, la répétition d’une erreur sur de multiples sites gouvernementaux n’en fait pas une vérité et pas davantage une source juridique.
Le décret précise aussi : « Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires. » Comme précisé avant, « le bailleur est tenu de louer un logement décent ». Il semble tout de même assez clair que s’il est tenu de louer un logement qui doit satisfaire à telles conditions, cela signifie qu’il n’a pas l’autorisation de mettre en location un logement indécent. Cela dit, je n’argumenterai pas davantage sur ce sujet, car ce serait manifestement vain. Libre à vous de penser que la location d’un logement indécent est autorisée.