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L’Ukraine interdit enfin l’amiante !

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En octobre 2023, l‘Ukraine a interdit officiellement l’utilisation et la production de tous les types d’amiante. La législation ukrainienne prévoit aussi des mesures pour protéger les travailleurs et la population. La mise en place d’interdictions relatives à l’amiante, nécessaires à l’intégration européenne de l’Ukraine, aura duré plus de 14 ans. En effet, il a fallu lutter contre un lobbying très agressif de la part des gros producteurs d’amiante voisins, notamment la Russie et le Kazakhstan.

Interdiction de l’amiante dans la réglementation ukrainienne

L’interdiction relative à l’amiante figure maintenant à l’article 28 de la loi de l’Ukraine sur le système de santé publique. « У технологічних процесах та під час здійснення будівельно-монтажних робіт на будь-яких об’єктах забороняється виробництво і використання азбесту незалежно від виду, а також азбестовмісних виробів і матеріалів. Заходи безпеки і захисту від шкідливого впливу азбесту та азбестовмісних виробів і матеріалів визначаються державними медико-санітарними правилами. »

En français : « La production et l’utilisation d’amiante, quel qu’en soit le type, ainsi que de produits et matériaux contenant de l’amiante, sont interdites dans les processus technologiques et lors des travaux de construction et d’installation dans tous les établissements. Les mesures de sécurité et de protection contre les effets nocifs de l’amiante et des produits et matériaux contenant de l’amiante sont déterminés par des règlements sanitaires nationaux ». Le texte, publié le 1er octobre 2023, est en vigueur.

Tentatives pour interdire l’amiante en Ukraine

Les premières tentatives de l’Ukraine pour interdire l’utilisation de l’amiante datent d’avant 2011. Cependant, le véritable espoir d’éradication de l’amiante débute au printemps 2017. En effet, le 29 mars 2017, le ministère de la Santé adopte l’Ordonnance sur la sécurité et la protection des travailleurs contre les effets nocifs de l’amiante et des matériaux et produits contenant de l’amiante. Le 26 juin 2017, une conférence de presse, à Kiev, officialise la nouvelle. Les associations d’aide aux victimes de l’amiante se réjouissent… jusqu’au coup de théâtre du 10 octobre 2017.

Ce jour-là, on apprend que l’ordonnance est expurgée du Registre d’État des actes juridiques réglementaires. Autrement dit, le texte de loi disparait, supprimé sans explications claires. En réalité, il a certainement été victime du lobby pro-amiante. En fait, la Russie et le Kazakhstan, responsables de 65 % de la production mondiale d’amiante, tenaient à continuer d’en exporter en Ukraine. Ils craignaient aussi que d’autres pays voisins, comme l’Ouzbékistan et le Kirghizistan, suivent l’exemple de l’Ukraine.

ukraine, pays grand consommateur d’amiante

Entre 2009 et 2015, l’Ukraine importait en moyenne 42 000 tonnes d’amiante par an. C’était déjà moins qu’en 2005, où on recensait l’utilisation de 183 271 tonnes d’amiante. Les minéraux fibreux provenaient surtout de la Russie et du Kazakhstan. Historiquement, le petit pays d’Europe de l’Est fut donc l’un des plus grands producteurs et consommateurs d’amiante.

L’année dernière, le marché ukrainien de l’amiante employait encore plus de 4 000 personnes. En septembre 2022, l’International Ban Asbestos Secretariat annonce l’approbation par le Parlement ukrainien d’une loi interdisant l’utilisation de tous les types d’amiante. L’État ukrainien vient enfin de l’inscrire dans ses textes réglementaires. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a simultanément précipité et compliqué l’adoption du texte de loi.

Guerre en Ukraine et exposition à l’amiante

Pour adhérer à l’Union européenne, l’Ukraine devait obligatoirement instaurer deux lois. La première visait à interdire tout type d’amiante. La seconde concernait la gestion des déchets. Cependant, ce n’était pas l’unique raison de légiférer maintenant. Comme le rappelle une récente étude sur la vulnérabilité au risque amiante des régions européenne en cas de séisme, l’amiante est massivement présent dans les bâtiments ukrainiens.

Les guerres et les séismes génèrent une forte pollution environnementale et des risques sanitaires. Il y a plus d’un milliard de mètres carrés d’ardoises en fibrociment amianté sur les toits ukrainiens, soit 60 % des toitures. Selon les estimations datant du printemps 2022, la guerre avait déjà libéré 5 à 10 tonnes d’amiante dans l’air. Outre la prise de conscience accrue du risque amiante, la destruction implique si possible une reconstruction. Or les entreprises de travaux auraient pu reconstruire avec des matériaux amiantés.

Reconstruire sans matériaux amiantés

C’était la principale crainte des écologistes membres du Parlement ukrainien. Ils voulaient faire passer la loi au plus vite, par peur que les villes détruites ne soient reconstruites avec des matériaux et produits contenant de l’amiante. D’ailleurs, le lobby de l’amiante a été actif durant l’examen du projet de loi. À titre d’exemple, une affiche à la gloire des ardoises traditionnelles en fibrociment ukrainiennes a été placardée à proximité du quartier gouvernemental de Kiev.

Le président du Comité national ukrainien de la santé, Mikhail Radutsky, a dénoncé de « nombreux mythes qui n’ont rien à voir avec le texte du projet de loi. Les récits sont très similaires à ceux des propagandistes du Kremlin. Certains fabricants de matériaux de construction utilisant de l’amiante aident l’ennemi à saboter. » Bref, c’est officiel, l’Ukraine a réussi ce combat-là, malgré les multiples obstacles.

Il reste à savoir si cette mesure inspirera les autres pays de l’ex-URSS. Nombre d’entre eux (Biélorussie, Ouzbékistan, Kirghizistan…) poursuivent l’extraction, l’utilisation, la consommation et/ou l’exportation d’amiante.

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2 Commentaires

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  1. J
    Jean-Marie 1 novembre 2023 - 12h38

    Enfin.!!!!!!

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  2. L
    Laurent 5 novembre 2023 - 21h52

    Enfin…oui pas vraiment, avec plus de 40000T/an depuis des lustres, on le voit chez nous, l’amiante est partout, alors c’est bel et bien une histoire sans fin….

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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