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Rénover les copropriétés avec un nouveau prêt global

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La Mission exploratoire sur le financement de la rénovation des copropriétés en difficulté a rendu son rapport au ministre du Logement. Elle dresse un état des lieux du financement des copropriétés, et propose notamment la création d’un « prêt global, collectif, inclusif et adossé aux lots ». Le gouvernement a d’ores et déjà fait part de son intention d’étudier rapidement la création de ce nouveau prêt. Il financerait notamment les travaux de rénovation énergétique en copropriété.

Au moins 17 % de copropriétés fragiles

L’ancien ministre du Logement, Olivier Klein, avait chargé M. Kosta Kastrinidis d’une mission exploratoire. Le Directeur des prêts de la Banque des Territoires devait identifier des pistes d’actions pour le financement des travaux de rénovation, surtout dans les copropriétés en difficulté. Pour commencer, la Mission s’intéresse à la quantité de copropriétés fragiles ou en difficultés. Le manque de données fiables et récentes complique la tâche, mais selon ce rapport, il y aurait :

  • 10 000 copropriétés en difficulté (suivies par l’Anah pour redressement, prévention…) ;
  • 80 000 copropriétés fragiles (dont les impayés sont supérieurs aux seuils d’alerte) ;

On ne se base ici que sur le parc de copropriétés recensées dans le registre national des copropriétés (RNC). On peut donc ajouter à cette estimation 200 à 300 000 copropriétés non recensées. Quant au reste à charge (RAC) de chaque copropriétaire, on l’estime entre 10k€ et 20k€. Concernant la réalisation des programmes de travaux, elle « suppose de réunir deux conditions : le financement du reste à charge des copropriétaires et le préfinancement des subventions publiques ».

C’est le cœur du problème. En effet, sans solution pour financer le RAC, les copropriétaires ne votent pas les travaux. Quand ils sont votés, ils ne démarrent que si tous les fonds pour le montant total des travaux sont réunis. Puisque le versement des subventions ne s’effectue qu’en fin de chantier, le syndic ne peut pas faire l’avance des travaux. Par conséquent, les opérations sont bloquées.

Un éventail de prêts complexe et peu adapté

Actuellement, les acteurs de terrain privilégient le prêt collectif à adhésion individuelle. Il peut prendre la forme d’un prêt réglementé – l’éco-PTZ copropriété pour les travaux de rénovation énergétique – ou d’un prêt de marché pour divers travaux. Cependant, 60 % des copropriétés ne sont pas éligibles à cause de leur profil de risque ou de leur taille. Quand elles le sont, l’adhésion reste exclue pour certains copropriétaires.*

Il existe aussi des prêts individuels pour financer la quote-part des travaux collectifs des copropriétaires qui sont solvables. Mais ce sont des solutions coûteuses, sur des durées courtes, et inaccessibles aux revenus modestes, aux personnes âgées, etc. Enfin, le Prêt Avance Rénovation (PAR) n’est pas adéquat dans ce contexte. D’une part, les travaux collectifs ne sont pas éligibles à date. D’autre part, le coût de l’hypothèque paraîtrait disproportionné. En résumé, « le financement des travaux des copropriétés en général est un marché de niche investi par peu d’acteurs ».

Pour boucler un plan de financement, il faut combiner des produits collectifs et des solutions de financement individuelles. En 2022, le marché a financé moins de 20 % des travaux. Or, pour répondre aux exigences de performance énergétique, le volume de travaux devra fortement augmenter. « On peut estimer à près de 9 Mds€ le volume annuel de travaux de rénovation à réaliser et donc à financer au cours des prochaines années ».

programmes de travaux en copropriété

Pour accélérer le processus à court terme dans les copropriétés en difficulté, la Mission propose :

  • le renforcement du préfinancement à taux zéro des aides (réseau Provicis) ;
  • la mise en place d’un dispositif de garantie pour ouvrir des financements existants.

Le dispositif existant de préfinancement à taux zéro ciblerait les copropriétés suivies dans le cadre du plan initiatives copropriétés (PIC). Une ligne de financement de 300 M€ sur 6 ans permettrait d’atteindre 150 M€ de préfinancements accordés par an. 6 ans, c’est actuellement le délai moyen entre l’engagement de la réflexion par la copropriété et la réalisation des travaux.

Concernant la garantie, il s’agirait d’une double garantie, incluant une contre-garantie financière publique et une garantie d’accompagnement par la collectivité locale. La première couvrirait en partie le risque encouru par les établissements prêteurs. La seconde permettrait de proposer des solutions alternatives aux copropriétaires en défaillance. Pour obtenir des résultats efficaces à terme, la Mission encourage le gouvernement à commercialiser un nouveau prêt, pour toutes les copropriétés.

Prêt global, collectif, inclusif et au lot

D’abord, ce prêt serait global, car il couvrirait la totalité des coûts des travaux pour le syndicat des copropriétaires, le syndic et les copropriétaires. Il serait mobilisé au fur et à mesure de l’avancement des travaux. Ensuite, ce serait aussi un prêt collectif, puisque proposé à tous les copropriétaires et voté en assemblée générale, au même moment que les travaux. Chaque copropriétaire pourrait refuser, à condition de verser sa quote-part des travaux.

De plus, il s’agit d’un prêt au lot. Les mensualités seraient dues par tous les copropriétaires qui bénéficient du prêt. Elles se répartiraient comme les charges courantes, à partir d’un tableau d’amortissement présenté lors du vote en AG. Le prêt serait transmissible avec le lot, ce qui répartirait la charge entre plusieurs générations de copropriétaires. Celui qui déciderait d’entreprendre des travaux ne serait donc pas le seul à supporter la charge.

Enfin, ce prêt serait inclusif car mobilisé par l’ensemble des copropriétaires, sans relever d’une dette personnelle. Il devra être supportable pour les plus fragiles tout en étant intéressant, d’un point de vue économique pour les plus aisés. Il serait toutefois conditionné à la mise en place de la double garantie, afin de permettre aux copropriétaires en difficulté d’être éligibles.

Nouveau prêt et rénovation énergétique

Ce prêt collectif permettrait notamment de trouver un meilleur équilibre entre l’intérêt collectif et l’intérêt individuel des copropriétaires. C’est un point particulièrement important dans les copropriétés en difficulté, surtout de grande taille ou quand il y a des marchands de sommeil. Le fonctionnement du prêt aiderait à surmonter les blocages venant de certains copropriétaires.

Les copropriétaires qui refusent ou qui ne peuvent pas payer leur quote-part ou les mensualités du prêt seront « encouragés (ou contraints) à remettre en question leur statut de copropriétaire. La collectivité, éventuellement accompagnée par son opérateur, pourra accompagner les ménages en difficultés vers d’autres solutions (relogement, vente à l’amiable…). »

Par ailleurs, ce prêt viendra compléter les autres outils de financement des copropriété (préfinancement, éco-PTZ copropriétés, prêts de marché). A priori, il faudra modifier le cadre législatif pour permettre sa commercialisation.

Sources et (re)lectures

* Le PLF 2024 simplifie le PTZ pour les copropriétés, mais nous y reviendrons plus en détails dans un prochain article.

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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