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DPE et petites surfaces : le ministère est sourd

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« Par manque de temps […] je me contenterai ce matin d’évoquer la question des petites surfaces »*, lance M. Hervé Maurey à propos du DPE. En réponse, Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires lit longuement une fiche… où le problème du DPE et des petites surfaces n’est jamais abordé. En fait, depuis plus d’un an, le ministère est sourd, alors que ce problème ne cesse d’être mis en évidence par une multitude d’acteurs.

DPE et petites surfaces en séance publique

La séance publique, au Sénat, du 6 juin 2023, révèle l’absurdité de la situation. D’après le sénateur de l’Eure, il est inadmissible « qu’à isolation égale, la classification d’un bien diffère sensiblement selon sa taille ». En effet, selon l’ONRE (Observatoire national de la rénovation énergétique), 63 % des logements de petite surface sont classés E, F ou G contre 39 % pour l’ensemble du parc. M. Hervey Maurey demande donc à la secrétaire d’État Bérangère Gaillard comment elle compte remédier à cette situation. « Ne faudrait-il pas donner suite à la proposition de la fédération des diagnostiqueurs, qui préconise la mise en place de coefficients de pondération ? »

La réponse de la secrétaire d’État était tristement prévisible. À chaque critique formulée contre la méthode de calcul DPE ou contre les compétences des diagnostiqueurs, le ministère utilise les mêmes arguments. Le DPE est un outil majeur de la rénovation. Plusieurs mesures lui sont adossées visant notamment les passoires thermiques (loi Climat Résilience…). La réforme de 2021 l’a fiabilisé. Un chantier pour améliorer la qualité de réalisation des DPE est en cours. Etc. Mais dans ce contexte, ce discours est totalement hors sujet, ce que constate M. Maurey. « La petite fiche que vous nous avez lue ne contenait aucune réponse ».

petites surfaces pénalisées, un constat partagé

Tous les principaux acteurs concernés par le sujet soulignent les résultats aberrants du DPE appliqué aux logements de petite surface. Au fil des mois, cette incohérence a été mise en évidence par :

Si encore le ministère niait le phénomène en s’appuyant sur des arguments clairs, mais il se contente d’ignorer la question. Des ministres jusqu’à la secrétaire d’État, tous répètent à l’envi que le DPE est plus fiable, sans jamais réagir à cette anomalie. Pourquoi est-il sourd à ce point ? Parce que personne ne tient à admettre les faiblesses de la méthode 3CL-DPE-2021 ni à la modifier.

Réglementairement et juridiquement, c’est compliqué. La coexistence des DPE antérieurs et des DPE postérieurs au 1er juillet 2021 pose déjà problème. En outre, de la stabilité d’un dispositif dépend l’adhésion du public. D’où cette réaction de M. Olivier Klein : « le DPE a évolué en juillet 2021, il est utile qu’il n’évolue pas de nouveau, car cela ferait poser des questions sur les étiquettes actuelles ». Hum. Quelqu’un se dévoue pour lui dire que c’est déjà le cas depuis 2 ans ?

Aucune modification de la méthode DPE en vue ?

Comment faire alors pour que le ministère accepte d’entendre cette critique ? Peut-être faudrait-il que les associations de consommateurs s’en mêlent. En effet, dès qu’un article à charge paraît sur le DPE dans 60 millions de consommateurs ou dans l’UFC-Que Choisir, les pouvoirs publics réagissent. Ils sont manifestement plus attentifs à la presse consumériste qu’au retour des professionnels.

Malheureusement, la probabilité pour qu’un tel événement se produise est faible. Les journalistes préfèrent généralement s’attaquer aux compétences du technicien certifié. Alors, travaillons sur la qualité de réalisation des DPE, ajoutons des formations coûteuses et des contrôles. Néanmoins, c’est le diagnostiqueur qui devra expliquer, au propriétaire mécontent, que son studio bien isolé est une passoire thermique. À lui d’assumer les critiques à cause d’une méthode 3CL inadaptée aux logements de moins de 30 m².

* Séance publique du 06/06/2023 apportant une réponse à la question orale n°06235.

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7 Commentaires

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  1. C
    Christian 9 juillet 2023 - 17h07

    Décarboner sans pouvoir isoler est une vraie question qui se pose…
    J’ai suivi avec intérêt les nombreuses remarques soulevées par la Loi Climat et Résilience pour laquelle nous sommes ou devons par raison, être tous attachés.
    Il existe pour se faire malheureusement des problèmes insurmontables. Les logiciels de calcul des nouveaux DPE en marche depuis juillet 2021 obligent à des objectifs correctifs d’isolation inatteignables dans le Bâti ancien d’avant 1949 tout particulièrement.
    Pour exemple, un petit 2P rénové en 2019 de 47m² à Paris 11ème en petite Copropriété de 20 lots ayant 3 murs pignons non isolés avec double vitrage, ECS sans énergie fossile, classé désormais G+ passoire thermique et C pour le GES, (au préalable en 2015 : D et E). Après recherche, aucun isolant ultra-mince et performant existe sur le marché pour répondre aux exigences du DPE qui m’oblige après travaux à un R de 4.5m²/K/W mini !?… Couloir d’entrée à isoler : largeur 99cm, porte de 90 blindée : épaisseur possible à isoler : 3 cm de chaque côté alors que les produits existants chez les Isover, Knauf, Lafarge, Soprema, Actis etc. obligent à une épaisseur de 100/150 mm pour un tel résultat => il nous resterait 60 cm environ pour pénétrer dans l’appartement…
    Ceci n’est qu’un exemple parmi d’autres.
    Il nous faut donc apprendre à marcher sur la tête ou attendre un peu de discernement et de pondération. Il y a urgence à se poser les bonnes questions.
    Mes différents devis travaux de l’ordre de 20 a 25K€ via les entreprises RGE sont en fait techniquement irréalisables. Alors que le DPE mentionne des travaux pour 4060€ max pour un gain de consommations énergétiques de 100€/mois !!! Dans la réalité, amortissable donc sur 20 ans !
    Une histoire de fou !!
    Peut pas vendre, peut plus louer ! Dans de telles conditions, l’appartement est donc mis en « vacance ».
    C’est la première fois et par la force des choses que j’ai le désagréable sentiment d’être démuni et finalement « hors la loi »… Merci pour votre écoute et pour toutes vos actions permettant de mettre un peu plus d’intelligence dans tous ces processus environnementaux.
    Et pas forcément plus de moyens financiers mais du bon sens.
    Cordialement
    Christian Chauliac

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  2. J
    Jean-Guy 16 juillet 2023 - 9h08

    Je ne peux qu’ acquiescer cette triste réalité ! Nous sommes gouvernés par des amateurs à la botte de l’Europe donc de l’Allemagne !
    On nous a fait le coup avec le diesel et on nous le refera avec l’électrique !
    Pour en revenir au DPE plus la surface est petite et surtout en chauffage électrique il est IMPOSSIBLE d’atteindre le D même voir le E en rénovation ! Et le E sera interdit en 2034 !!!
    Donc la solution c’est de démolir Paris car tous les immeubles Haussmanniens sont en ……!
    Bon j’en ai marre

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  3. S
    STEPHANE 17 juillet 2023 - 10h43

    Le dpe provient dune directive européenne à son origine, donc, jamais il n’est évoqué ce que font les autres pays, quelles problématiques rencontrent ils, quelles sont les différences d’outils ? En France on est tellement imbus qu’on prétend perpétuellement réinventer la roue.

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  4. N
    Nicols 3 août 2023 - 5h12

    Le but premier du DPE est de vampiriser (voir de déposséder comme je vais l’expliquer plus bas) les propriétaires en ponctionnant leur épargne et/ou une partie de la plus value de leur rente immobilière, en les obligeant à dépenser pour des travaux de rénovations iniques et parfois abérant (ex : conseiller des PAC à tout bout de champ…).

    Dans un Etat de droit normal, ces obligations seraient considérées comme illégales car il s’agit de droit rétroactif. En effet, lorsqu’ils sont devenus propriétaires, personne ne leur a dit que X années plus tard, on les contraindrait à faire tels types de travaux, ni que leur bien perdrait de la valeur et serait potentiellement interdit à la vente ou à la location à cause (entres autres) de malus débiles (politiques uniquement) attribués parce que leur bien consommerait tel ou tel type d’énergie. Pire, dont pour certaines on les avait incité à s’équiper (ex : chaudière gaz).

    Non seulement les calculs du logiciel sont foireux comme vu par les autres commentaires et par l’article, mais en plus le fondement juridique est abjecte. Finalement, il prends à la gorge les petits propriétaires qui ne peuvent pas payer ces travaux obligatoires, les contraignants à vendre en bradant. Qu’il s’agisse de leur maison principale ou bien de leurs propriétés annexes leur assurant rente…. qu’ils ont souvent mis toute leur vie à acheter, voir remboursent encore aujourd’hui.

    C’est dégueulasse, c’est infâme.

    En prime, toutes les nouvelles obligations de formation et de contrôle qui vont venir éclater le budget des diagnostiqueurs va les contraindre à augmenter leurs tarifs… qui étaient déjà très lourd à encaisser pour les particuliers.

    Et il faut penser également aux héritages… beaucoup de Français n’ont pas les moyens d’assumer les impôts suite à acceptation d’héritage et doivent donc y renoncer ou en dilapider une partie.
    Ces mesures vont largement amplifier le phénomène.

    Ces mesures par ailleurs vont parfaitement dans la politique générale d’attaque de la propriété. Par exemple les propositions du Think Tank France Stratégie qui vont devenir réelles : à savoir que l’Etat pourra être propriétaire du terrain et aura en prime un droit de regard sur les obligatoires du « propriétaire » par rapport à « son » bâtit.
    Par exemple, la collectivité aura un droit contraignant sur la pratique du futur « contrôle technique » du batiment et obligations qui en découleront…

    C’est pourquoi je dis que de toutes ces considérations, nous pouvons comprendre que le but final est bien la dépossession des particuliers, que ce soit de leur épargne, ou même carrément de leur(s) propriété(s). Et même de la suppression du statut de PROPRIETE réelle.

    Il faut bien comprendre qu’il n’est pas dans l’intérêt d’un gouvernement de crapules, que les Français continuent d’accéder à la propriété et deviennent de plus en plus autonomes vis à vis de l’Etat, et résiliants économiquement parlant.
    Et cette situation est probablement la même dans tous les Etats dit « riches ».
    Pour se maintenir, le pouvoir a besoin de gens pris à la gorge, à qui on maintien la tête dans le guidon. Leur interdisant de planifier… pour par exemple reprendre le pouvoir et créer une nouvelle société.

    Ces politiques vont d’ailleurs parfaitement dans l’optique avouée également par les mêmes think tank qui ont décrété qu’il fallait encore augmenter la concentration des gens dans les villes (sous caméra à reconnaissance faciale) ; et « comme par hasard » dans le même temps et sur un planning identique aux sanctions des propriétaires immobiliers nous constatons des sanctions d’intensité croissante similaires pour les … propriétaires de voiture de moteur à explosion.
    Hors chacun sait qu’à la campagne plus qu’ailleurs le véhicule est indispensable.
    Il s’agit donc là également d’une forte « incitation » pour revenir vivre à la ville… en bon locataire à vie … de grands groupes immobiliers (les petits particuliers auront été lessivé -et vous vous étonnez que les petits logements locatifs ainsi que les logements traditionnels type pierre à la campagne soient les plus bidonnés niveau calcul… ).

    A ce titre, vous pouvez attendre longtemps des remises en question du gouvernement… puisque la situation actuelle est voulue et porte parfaitement bien ses fruits.

    Quand vous tentez de comprendre les politiques en matière de DPE, vous devez comprendre tout ça sinon c’est peine perdue.
    Quand vous choisissez d’effectuer le boulot de diagnostiqueur immobilier également.

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  5. B
    Benoit 16 septembre 2023 - 12h30

    Bonjour , le logiciel DPE comporte un vice de forme , il est mal conçu car il intègre dans son score , la consommation énergétique nécessaire a l’eau chaude sanitaire (ECS) rapportée a la surface du logement .
    J’ai fais plusieurs diagnostiques pour des chambres de 10m2 , dont l’eau est chauffée par la chaudière a gaz de l’immeuble.
    Comme le logiciel impose une consommation de 56l d’eau par jour a 40° , l’énergie dédiée a l’ECS est de 2800kwh/an , soit 280kwh/an/m² dans le cas de ma chambre de 10 m². On est déjà scoré E rien que pour l’ecs!!il reste a ajouter les autres consommations
    sans mur isolé ni fenêtre double vitrage , on est scoré invariablement F ou G = passoire thermique
    alors que l’appartement d’à coté de 50m2. de même conception ( ni fenêtre double vitrage , ni mur isolé ) est classé E , parce que l’impact de la consommation d’énergie dédiée a l’ECS est nettement plus faible
    a 50m2 , il doit produire 95litres d’ecs a 40°/j , soit 4750kwhan , et donc son score DPE ne sera « seulement » que de 4750/50= 95kwh/an/m² au lieu de 280 dans mon cas
    conclusion ; l’intégration de l’énergie nécessaire à la production d’ECS dans le score du DPE est une erreur , car , ramené a la surface , cela pénalise énormément les petites surfaces ( qui pourtant sont les moins énergivore au final!)
    ce mode de calcul transforme beaucoup de chambres et studettes en passoire thermique , sans raison , puisque l’appartement de 50m2 de même conception ne l’est pas.
    Mais aussi , parce qu’une studette est la plus petite unité d’habitation ,la moins énergivore et que dans un réel souci écologique elle devrait être encouragée
    il y a la , une injustice , mais le ministère en charge des DPE ne veut pas y remédier ! Pourquoi ?

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  6. M
    MARG 28 septembre 2023 - 12h21

    J’aimerais que vous vous fassiez porte voix de l’approche britannique, qui à demi mots semble faire son chemin chez Lemaire et le ministre du logement. Vous pouvez consulter le site de HMRC et il est indiqué que les classements G , G+ inlouables devront faire des travaux à minima ET PERSONNE ne peut se voir exiger plus de 3500 livres de travaux.

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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