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Faut-il faire un DPE à la demande du locataire ?

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Habituellement, le diagnostiqueur réalise un DPE à la demande du propriétaire ou de son mandataire. Cependant, avec l’application de la loi Climat Résilience, des locataires sollicitent les cabinets de diagnostics pour avoir un DPE. Faut-il accepter de (re)faire un diagnostic de performance énergétique pour le locataire ? Où est-ce une cause certaine de futurs ennuis ?

L’intérêt des locataires pour le DPE

De manière générale, les locataires regardent moins les diagnostics immobiliers que les acquéreurs d’un logement. Toutefois, la situation tend à changer avec l’entrée en vigueur de la loi Climat et Résilience. Le locataire s’intéresse de plus en plus au DPE, car depuis le 24 août 2022, les loyers des logements classés F et G peuvent être gelés. Or de nombreux locataires ne disposent que d’un DPE vierge, d’un DPE très ancien, voire d’aucun DPE du tout. Certains doutent aussi de la fiabilité du DPE qui leur a été fourni à la signature du contrat de location.

Le propriétaire n’est pas toujours coopératif quand on lui demande un DPE en cours de location. Les locataires contactent donc un diagnostiqueur pour connaître le niveau de performance énergétique actuel. Entre la mention des critères de décence énergétique sur les contrats de location à compter de cette année 2024, la fin de la durée de validité de tous les DPE antérieurs à juillet 2021 au 31 décembre 2024, et l’entrée en vigueur de l’interdiction de location des passoires thermiques en janvier 2025, les diagnostiqueurs seront de plus en plus sollicités par les locataires. Tout le problème est de savoir comment réagir face à ces demandes de DPE.

Décence énergétique sans diagnostiqueur

Locataires, bailleurs et agents immobiliers vous pouvez consulter la page Interdiction de location et gel des loyers des passoires énergétiques. Le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires y répond à toutes vos questions. En effet, il y a une section Propriétaire, une section Locataire et une section Agent immobilier. C’est assez rigolo (mais on rit jaune) d’omettre la section Diagnostiqueur. C’est tout de même lui qui réalisera le DPE, opposable, pour le locataire, le propriétaire ou l’agent immobilier, en engageant sa responsabilité professionnelle.

Bref, cette page nous confirme que le locataire est en droit d’exiger de son propriétaire un DPE valide pour justifier du critère de décence énergétique. Le locataire a également la possibilité de faire un DPE de son côté, à ses frais. En effet, il peut avoir l’impression de vivre dans un logement très mal isolé, de payer trop cher ses factures d’énergie, etc. malgré un DPE qui affiche une classe C, D, ou E. En soi, légalement, rien n’empêche le diagnostiqueur d’accepter. Il sera simplement payé par son client, donc en l’occurrence le locataire. Cependant, des diagnostiqueurs refusent formellement d’intervenir sur demande du locataire.

Pourquoi refuser le DPE pour le locataire ?

L’une des questions posées dans la FAQ du site du MTEC est la suivante : « si je fais faire un DPE de mon logement et que le résultat diverge de celui que m’a fourni mon propriétaire, que puis-je faire ? » La réponse est le seul endroit de la page où le mot « diagnostiqueur » apparaît, et ce paragraphe n’est pas rassurant. On y lit que le diagnostiqueur doit envoyer les résultats du DPE (réalisé pour le locataire) au propriétaire. Ce dernier « peut prendre contact avec les diagnostiqueurs afin d’obtenir des précisions. En raison de son caractère opposable, une erreur manifeste du diagnostiqueur sur les résultats du DPE engagera sa responsabilité. »

Le locataire peut donc faire réaliser un DPE sans l’approbation du propriétaire. Contrairement à ce qu’on peut parfois entendre, le RGPD (règlement général sur la protection des données) ne l’interdit pas. Lesdites données à indiquer dans le DPE sont publiques de toute façon. En revanche, accepter, c’est potentiellement se retrouver au cœur d’un litige bailleur/locataire. La crainte des conflits, voire du procès, est donc l’une des principales raisons de refuser la prestation. D’une part, des locataires attaquent déjà leur propriétaire en justice pour réclamer une réduction du loyer, l’indemnisation de leurs factures d’énergie, etc. D’autre part, le bailleur a aussi de bonnes raisons de profiter de l’opposabilité du DPE.

L’autre problème tient aux données d’entrée du DPE. La collecte d’informations peut s’avérer plus difficile avec un client locataire. La plupart du temps, c’est déjà compliqué de récupérer les documents nécessaires auprès du propriétaire du bien. Or le locataire ne dispose généralement pas de l’acte de propriété, du règlement de copropriété si c’en est une, du numéro fiscal du local, des factures de travaux, etc. En ce sens, le DPE réalisé pour le locataire peut s’avérer moins fiable.

Pourquoi accepter le DPE pour le locataire ?

Cependant, s’il a accès aux données les plus importantes pour réaliser son DPE, le diagnostiqueur a aussi des raisons d’accepter. D’abord, la réglementation l’autorise à faire un DPE pour toute personne prête à payer cette prestation. Ensuite, le risque d’être mis en cause existe quel que soit le diagnostic technique. Enfin, si le locataire met la main à la poche pour obtenir un DPE, c’est qu’il a probablement de bonnes raisons de le faire. En général, personne n’aime se retrouver au tribunal. Bref, dans tous les sens du terme, c’est un problème de justice.

Locataires, nous vous conseillons tout de même de contacter d’abord votre propriétaire pour lui demander un nouveau DPE. Primo, cela rendra la démarche plus amiable. Secundo, le diagnostiqueur aura moins de réticence à intervenir dans ce contexte. De plus, s’il y a augmentation du loyer, dans le cadre des échéances fixées par la loi Climat Résilience, vous pouvez de toute façon exiger du bailleur la remise d’un DPE, sans avoir à le prendre en charge financièrement.

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15 Commentaires

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  1. N
    Nico 20 janvier 2024 - 14h46

    Non, mais quel bazar.
    Effectivement, comme cité par l’article, on a depuis quelques jours une nouvelle FAQ sur le site du ministère qui mentionne explicitement le fait qu’un locataire fasse un DPE:
    https://www.ecologie.gouv.fr/diagnostic-performance… (5eme question de l’onglet locataire)

    Et deux autres FAQ, sur service-public.fr et sur le site de l’ADEME qui précisent ‘Le DPE doit être effectué à l’initiative du propriétaire du logement qui loue son logement (le bailleur).’
    https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F16096
    https://observatoire-dpe-audit.ademe.fr/faq (question 3 onglet generalités)
    Mais au final, ce qui importe, ce ne sont pas les FAQ, ce sont les textes officiels… et le seul passage que j’ai trouvé est celui de l’article L271-6 du code de la construction et de l’habitation https://www.legifrance.gouv.fr/…/LEGIARTI000041586774
    (parlant du diagnostiqueur) « Elle ne doit avoir aucun lien de nature à porter atteinte à son impartialité et à son indépendance ni avec le propriétaire ou son mandataire qui fait appel à elle, ni avec une entreprise pouvant réaliser des travaux sur les ouvrages, installations ou équipements pour lesquels il lui est demandé d’établir l’un des documents mentionnés au premier alinéa. »

    Donc si le locataire peut faire un DPE, sans être le mandataire du propriétaire, ma lecture de cet article L271-6, c’est que dans ce cas précis, le diagnostiqueur n’est pas obligé d’être indépendant ou impartial. Wahhhh, il y a comme un problème, là …

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 20 janvier 2024 - 19h51

      L’obligation d’indépendance et d’impartialité me semble inhérente au métier, au même titre que la certification et l’assurance. On a aussi le décret contre le commissionnement (décret n° 2010-1200 du 11 octobre 2010) qui l’interdit pour ne pas « porter atteinte à l’indépendance et à l’impartialité du diagnostiqueur » et là ça concerne « toute entité intervenant dans la vente ou la location du bien objet du diagnostic », et non pas uniquement le propriétaire ou son mandataire. Par ailleurs, le DPE sera de toute façon transmis au propriétaire par le diagnostiqueur. Je vois mal ce qu’il gagnerait à ne pas être indépendant et impartial vis-à-vis du locataire… Cela dit, un dépoussiérage des textes pour les mettre en cohérence avec les annonces du ministère ne serait pas malvenu.

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  2. N
    Nico 20 janvier 2024 - 14h56

    … Enfin, si les diagnostiqueurs ont une obligation de moyens, si j’étais avocat du propriétaire dans un contentieux, je défendrais l’idée que la bonne réalisation de la mission d’un diagnostiqueur implique à minima de contacter le propriétaire pour lui donner l’occasion de présenter des preuves et factures que ne détiennent pas forcément les locataires.

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 20 janvier 2024 - 19h56

      C’est pour cette raison que j’ai écrit « s’il a accès aux données les plus importantes pour réaliser son DPE… » et conseillé aux locataires d’en parler d’abord à leur propriétaire. Je suis d’accord avec vos arguments.
      Mais je me mets aussi à la place d’un locataire en précarité énergétique, qui se gèle, n’a pas de DPE et se heurte à un mur lorsqu’il en parle à son propriétaire. Des locataires désespérés ont contacté Quotidiag pour obtenir de l’aide à ce sujet, c’est aussi ce qui a inspiré cet article.

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  3. N
    Nico 20 janvier 2024 - 15h35

    … pourquoi ne pas faire juste un dpe projeté, si le propriétaire n’est pas dans la boucle?
    Ca devrait être suffisant pour que le locataire puisse contester le DPE du bailleur, et le fait qu’il ne soit pas intégré à la base ADEME calmera un peu les bailleurs (car moins de conséquences négatives sur la « vie future » du logement), même si le DPE est basé sur des infos incomplètes.
    Allez, 3 commentaires d’affilée, ça suffit, je sors.

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 20 janvier 2024 - 20h01

      Pourquoi pas ? Cependant, je pense que si le locataire proteste contre l’augmentation du loyer de sa passoire thermique avec un DPE projeté, il risque de ne pas être très crédible… Oui, il y a des bailleurs compréhensifs, et l’UFC-Que Choisir l’a démontré récemment avec un article à la conclusion hallucinante, mais il y en a aussi qui profiteront de l’aspect non-réglementaire du DPE projeté pour ne rien faire.

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      • N
        Nico 21 janvier 2024 - 18h38

        Bah, je ne sais pas, ça resterait une expertise réalisée par un professionnel certifié (juste, pas entrée sur la base ADEME), donc je ne vois pas pourquoi un juge contesterait sa conclusion (après, si le DPE du bailleur mentionne « 12 cm de laine de verre » et qu’il y a des preuves,
        alors que ‘l’expertise locataire’ mentionne ‘isolation inconnue’, le juge risque de donner plus de crédit au DPE du bailleur, mais ça serait de toute manière la même chose avec un DPE officiel déposé à l’ADEME).

        En plus, une prestation d’expertise (ou DPE projeté) pour le locataire offrirait plus de liberté dans la rédaction et moins de risques au diagnostiqueur: par exemple si le DPE du bailleur indique « xx cm de laine de verre sur telle paroi » et que l’expert n’est pas certain de ce qu’il y a en réalité, ou n’a pas de preuve, il peut très bien, s’il le souhaite, rendre 2 conclusions basées sur des hypothèses sans avoir à se prononcer: « si présence de laine de verre xx cm » et « si pas d’isolation », par exemple –> au propriétaire, ensuite, de prouver la présence de laine de verre s’il veut prouver l’option qui lui est favorable.

        Je ne cherche pas à défendre les intérêts de telle ou telle catégorie, et je partage votre souci de permettre aux locataires de forcer un peu, leur bailleur à respecter la loi, si nécessaire, mais j’aimerais juste qu’on essaye de limiter la multiplication de DPE divergents entrés dans la base ADEME, sans qu’il n’y ait eu de travaux entre temps. Parce que cette multiplication risque d’encombrer les tribunaux dans des situations où c’est probablement souvent évitable (tiens, d’ailleurs, ne pourrait-on pas avoir des sortes de médiateurs locaux du DPE, qui aideraient locataires et propriétaires à comprendre et à résoudre leurs conflits?)

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        • Cécile, le moteur de Quotidiag 23 janvier 2024 - 20h02

          Je comprends bien la crainte de la multiplication des DPE divergents et de leurs conséquences. Il y a aussi un problème d’information vis-à-vis des locataires à propos de leurs droits. Quand ils nous écrivent, nous les renvoyons souvent vers les ADIL dont ils ignorent l’existence. Pourtant, elles peuvent leur être d’une grande aide. L’idée des médiateurs DPE est intéressante.

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        • A
          Anne 30 mars 2024 - 19h55

          bonjour mon locataire a fait un DPE classé F et en plus il est erroné ( mur en siporex isolé et le diagnostiqueur a mentionné mur en beton creux non isolé )pour ne pas avoir à subir une augmentation de loyer , il m’interdit d’en faire un opposable à la seule condition qu’un juge m’attribue un diagnostiqueur de son choix , j’attends depuis 3 mois d’être convoqué devant un juge après avoir fait une consilation qui n’a rien donné .

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  4. L
    Laurent 20 janvier 2024 - 15h57

    @Nico tout à fait d’accord avec toi, la fiche « bien préparer son DPE » le stipule bien, d’ailleurs comment être au plus près de la réalité sans factures de travaux?

    d’autre part, plus en lien avec l’article, étant donné que les prix de l’énergie auxquels font référence les DPE sont ceux du 1er janvier 2021 soit il y a trois ans maintenant avec une hausse globale d’environ 40% et sans compter le bouclier tarifaire pour les particuliers car pour les pros c’est de la folie, donc oui des locataires vont trouver qu’ils consomment moins et payent plus que ce qui est annoncé sur un DPE.

    Que fait l’ADEME à part dire que les PAC c’est supeeeeeeeer ??!

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  5. M
    Martin 22 janvier 2024 - 12h30

    Conseil aux locataires : si vous n’êtes pas content de votre logement, personne ne vous oblige à y rester, cherchez-en un autre

    Le principal problème du DPE actuel, c’est qu’un locataire n’aura aucune facture ou preuve de travaux, donc on aura un DPE pas juste (mur inconnu isolation inconnue) et forcément moins bon que celui du propriétaire.

    Il y a d’autres éléments auxquels les locataires doivent penser :
    – en fonction de la date de signature/renouvellement du bail, le critère de décence peut ne pas encore s’appliquer, ou/et les « anciens » DPE sont toujours valides
    – un possible recalcul pour corriger les petites surfaces est en cours (vite !!!)
    – en cas de travaux obligeant le locataire à quitter les lieux (isolation notamment), il n’y a pas de relogement hors logements sociaux il me semble
    – lorsque c’est un appartement, il ne faut pas oublier le rôle de la copropriété avec AG annuelle et la durée des formalités administratives… Tentez de demander une PAC (le Graal du DPE) en façade à Paris

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 23 janvier 2024 - 19h57

      Par les temps qui courent, ce n’est pas forcément si facile de trouver un nouveau logement… Pour le reste, oui, ces arguments se tiennent.

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  6. F
    François-Eric de la société DIAG 33 22 janvier 2024 - 16h30

    J’ai eu un certain nombre de demande, mais ça n’a jamais débouché sur une mission.

    Presque à chaque fois, le locataire reçoit son courrier d’augmentation du loyer, il pense qu’il loue une passoire thermique, et il appelle un diagnostiqueur. Si il tombe sur moi, je lui explique que c’est au propriétaire de fournir le DPE version 2021 pour justifier de l’augmentation de loyer. Donc pas besoin pour le locataire de faire réaliser un DPE.

    Le seul cas où ce serait envisageable c’est si il a un DPE 2021 mais qu’il pense que ce DPE est erroné.

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  7. L
    Ludovic 28 mai 2024 - 2h04

    comment un locataire pourrait faire faire un DPE, alors qu’il n’a aucun renseignement sur le logement, l’isolation ou pas de telle ou telle paroi surtout ?

    C’est encore une histoire de fou.

    Et ces bailleurs qui ont fait de grosses dépenses pour isoler les parois, et qui se voient classés en F. On connait des maisons qui n’ont aucun mur isolé et qui arrivent à obtenir D et d’autres qui ont toutes les parois isolées et qui consomment peu et qui sont classés en F avec le nouveau DPE….. Et toujours la même litanie : installer une pompe à chaleur et un chauffe eau thermodynamique dans un studio de 30 m2, soit des dépenses pharaonique pour un petit logement peu occupé. Et les immeubles bardés de compresseurs de PAC, les syndic vont devenir fous en voyant ça.

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 28 mai 2024 - 6h49

      Il existe de nombreuses situations différentes. Certains locataires vivent dans le logement depuis plusieurs décennies ou disposent des renseignements requis, même si nous avons souligné, dans l’article, la limite que vous soulevez. De toute façon, de nombreux propriétaires ne fournissent pas ces renseignements ou alors ils ont perdu les justificatifs, ce qui rend lesdits renseignements inutilisables.

      De même, les phénomènes que vous décrivez existent. Heureusement, il y a aussi des DPE qui reflètent la réalité et qui comportent des recommandations appropriées. En outre, s’il s’agit d’un logement classé F ou G, hors copropriétés, l’audit énergétique obligatoire contiendra des recommandations de travaux bien plus précises.

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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