revenir à l'Accueil
Toute l'actualité

DPE et interdiction de louer : la catastrophe ?

Partager cet article sur

Dans 450 jours, les logements classés DPE G seront interdits de location. Cette échéance est-elle tenable ? Entraînera-t-elle une crise du logement sans précédent ? Oui, pour les partisans d’un report de l’interdiction de louer les passoires thermiques. Non, pour le ministre du Logement. Dans un entretien au journal Le Monde publié avant-hier, Patrice Vergriete déclare : « il reste un an et 3 mois pour rénover les G, cela me semble jouable ». Il en profite pour annoncer, entre autres, une correction du « problème des petits logements pénalisés par le logiciel » DPE.

Conjoncture de l’immobilier et DPE

Au deuxième trimestre 2023, les résultats de la conjoncture de l’immobilier sont mauvais. Du volume de transactions immobilières aux mises en chantier, tous les niveaux sont historiquement bas. D’ailleurs, des diagnostiqueurs disent percevoir un ralentissement de leur activité. Personne ne souhaite voir le marché locatif s’enfoncer aussi dans la crise. Le diagnostic de performance énergétique n’est pas à l’origine de la hausse des taux d’intérêt. Il ne joue aucun rôle dans la baisse des permis de construire. Au fond, personne ne sait s’il aggrave vraiment cette crise… du moins à ce jour.

Après tout, les 140 000 logements « G+ », interdits de location depuis le 1er janvier 2023, sont toujours loués. « On n’expulse personne », rappelle M. Vergriete. « Le locataire peut faire valoir ses droits et obliger le bailleur à faire des travaux ». Ainsi, les factures des occupants diminuent et pour le propriétaire, la valeur du logement augmente. De toute façon, « nous n’avons pas à choisir entre la crise climatique et le droit à un logement décent et abordable. » La Première ministre, interviewée sur BFM Politique dimanche, partage cet avis. « L’idée c’est que ces logements soient rénovés le plus vite  possible. La bonne réponse, c’est d’accélérer la rénovation de ces passoires. »

et s’il y avait un report du calendrier ?

Admettons que soudain, l’exécutif fléchisse et décale l’entrée en vigueur des échéances. Le manque de logements sociaux ne se résorbera pas pour autant. Il n’y aura pas non plus d’effet positif sur la quantité de bâtiments neufs, à moins peut-être d’annuler également la RE2020 et le ZAN (zéro artificialisation nette). Certes, les passoires thermiques resteront sur le marché locatif. Les factures d’énergie, en hausse, continueront à générer de la précarité énergétique. Les locataires mijoteront dans leur bouilloire thermique l’été… Nous ne réduirons ni la consommation d’énergie, ni les émissions de gaz à effet de serre.

En revanche, l’étiquette du DPE continuera de s’afficher et d’orienter les décisions d’achat et d’investissement locatif. D’après une récente étude de la start-up Lycaon Immo, citée par Le Parisien : « le DPE se place en quatrième position derrière la surface habitable, la qualité du bien et l’agencement. » C’est pourquoi de plus en plus de propriétaires contournent la réglementation : absence d’affichage voire de réalisation du DPE, retrait du chauffage fixe, etc. Pour la présidente du site PAP (particulier à particulier) « la loi ne sera pas respectée », avec ou sans report. Alors à quoi bon renoncer ? Mieux vaut travailler sur les outils, les dispositifs et les aides. C’est a priori le seul moyen de respecter le décret n°2023-796 sans voir des centaines de milliers de logements sortir du parc locatif.

DPE et aides à la rénovation énergétique en 2024

Cependant, pour beaucoup de propriétaires, le DPE n’est pas fiable. Les logements classés G ne sont donc pas réellement indécents. Par conséquent, l’obligation de rénover paraît injuste. En réalité, le DPE actuel n’est pas un mauvais outil, même s’il est indiscutablement perfectible. « Les DPE se sont améliorés, il reste toutefois le problème des petits logements pénalisés par le logiciel mis en place par le ministère pour établir le DPE. On regarde comment le corriger », explique Patrice Vergriete. Il ajoute qu’il y aura un renforcement de la formation des diagnostiqueurs en 2024. En fait, à de nombreux égards, l’année 2024 sera un tournant en matière de rénovation énergétique :

  • déploiement de Mon Accompagnateur Rénov’;
  • évolution et gonflement de MaPrimeRénov’;
  • projet de loi sur la décentralisation de la politique du logement ;
  • réforme du prêt à taux zéro (PTZ), concentré sur les zones tendues ;
  • renforcement de l’attractivité du bail solidaire ;
  • création d’un fonds dédié à la rénovation du parc social ;
  • Accompagnement à la rénovation en copropriété renforcé ;
  • assouplissement des conditions d’accès au crédit immobilier ;
  • abattement fiscal de 40 % pour toutes les locations…

Le ministre du Logement souhaite aussi étendre l’interdiction de louer aux locations saisonnières. « Il faut tout aligner, même si certaines dérogations pourront être finement regardées. Je pense notamment aux gites ruraux. Mais je ne vois pas très bien pourquoi les locations touristiques seraient exonérées de l’obligation de contribuer à la transition écologique. » Cette disposition empêchera les bailleurs de se rabattre sur Airbnb pour louer leurs passoires thermiques.

450 jours pour mettre en Œuvre des solutions

Enfin, de nombreux rapports transmis ces derniers mois – CE Rénovation énergétique des logements, mission commune d’information sur la rénovation énergétique des bâtiments, etc. – regorgent d’idées et d’actions à mettre en œuvre. En résumé, selon le ministre du Logement, « arrêtons de prêcher le renoncement. […] Arrêtons de trouver des excuses pour ne pas faire la transition écologique ». En définitive, il reste 450 jours pour éviter l’explosion de la fameuse « bombe sociale » du logement, sans sacrifier l’écologie.

Sources et références
Partager cet article sur

7 Commentaires

Commenter
  1. P
    Pascal 9 octobre 2023 - 12h23

    Après tout, les 140 000 logements « G+ », interdits de location depuis le 1er janvier 2023, sont toujours loués. « On n’expulse personne », rappelle M. Vergriete. –> Cool … donc une mesure qui ne sert à rien. C’est interdit, les gens continuent de louer mais on ne fait rien …

    Les factures des occupants diminuent –> Ah bon ? Par quel pouvoir magique ? et lesquelels de factures, celles d’énergie ???

    et pour le propriétaire, la valeur du logement augmente –> Ah bon !? Moi qui avait lu que les DPE faisaient baisser le valeur des biens … Décidément je ne comprends rien ce matin … en tous cas rien à ces propos

    Répondre
    • Cécile, le moteur de Quotidiag 9 octobre 2023 - 12h28

      Le ministre dit que dans ces logements G+, le locataire peut obliger le bailleur à réaliser des travaux et ainsi, les factures (d’énergie) diminuent tandis que la valeur du logement (rénové, donc) augmente. M. Vergriete parle d’ailleurs peu d’interdiction de location, mais plutôt d’obligation de rénovation énergétique.

      Cette mesure ne vise pas à interdire la location de logements, mais à forcer les propriétaires à faire des travaux de rénovation énergétique pour continuer à louer. Par conséquent, si les logements continuent à être loués mais en étant rénovés, l’objectif premier de cette loi est atteint.

      Répondre
  2. G
    Germain 9 octobre 2023 - 13h03

    Bonjour,
    Je loue un studio de 28 m2 déjà isole de 75 mm de laine. Classé e. F, avec 7000 Euros de depenses, on passe en E.
    Au-delà, rien à faire, on ne passera meme pas en D.
    La locataire, 78 ans, qui paie env. 700 euros à EDF tout compris, et elle chauffe dur, ne partira pas.
    Si la collectivité veut la loger ailleurs, et qu’elle accepte, tant mieux. Sinon, lors de son départ ce local sera transformé en commerce.
    À noter : Le loyer est de 290 eurod par mois. ! Qui se plaindrait d’avir ce type de « passoire thermisue » ?
    En attendant, je ne peux rien faire d’autre.

    Répondre
    • Cécile, le moteur de Quotidiag 9 octobre 2023 - 13h30

      Bonjour,
      Sur quoi vous basez-vous pour affirmer qu’il est impossible de faire mieux qu’une classe E ? Un DPE projeté ? Un audit énergétique ?
      Des dérogations à l’obligation de rénovation performante sont prévues pour tenir compte des cas où la réalisation des travaux est impossible. Par ailleurs, en ce qui concerne le montant des dépenses, les aides vont être augmentées.

      Même si la rénovation peut améliorer la situation de l’occupant (diminution des factures d’énergie et meilleur confort), le but est aussi d’agir face au dérèglement climatique. Que le locataire se plaigne ou non de sa passoire thermique, un logement très énergivore fait augmenter les émissions de gaz à effet de serre.

      Répondre
  3. D
    Didier 9 octobre 2023 - 17h41

    En fait personne ne peut estimer l’augmentation des coût de l’énergie dans l’avenir, quand le ministre dit que le montant des factures diminuent aprés une rénovation, rien n’est moins sur car tous dépend du niveau de rénovation et des futures augmentations de l’énergie, je pense que beaucoup de personnes qui vont faire des travaux seront deçu car leurs factures ne vont pas baisser car l’augmentation des énergies ne le permettra pas, par contre leurs consommation va baisser, il s auront donc bien fait un geste pour la planète, ce qui n’est déjà pas si mal, c’est le probleme de ce gouvernement et du « en même temps » beaucoup de bonne volonté apparente mais toujours 50% à coté de la plaque.

    Répondre
  4. F
    François-Eric de la société DIAG 33 10 octobre 2023 - 9h27

    PAP qui dit que la loi ne sera pas respectée, je ne pense pas.
    Déjà, tout ce qui passe par agence immobilière sera conforme. Si un AI loue un logement en G après la date fatidique, c’est lui qui aura de gros problème pas le propriétaire.
    Ensuite, on a les villes où il y a un permis de louer, là pas moyen d’y échapper.

    Il reste les locations entre particuliers, et/ou les villes sans permis de louer. Mis à part les ignorants de bonne foi, et les marchands de sommeil, les gens sont quand même informés et honnêtes. Donc je pense que ce sera appliqué, mais cela aura pour effet de sortir du marché locatif un certain nombre de logement.

    Répondre
  5. R
    Randolph 13 octobre 2023 - 22h59

    Super article !
    Merci pour ce bon travail qui est essentiel au notre.
    Bonne continuation

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

.
Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

Diagnostic amiante en visio

Previous article

49 % d’énergies renouvelables dans les bâtiments en 2030

Next article