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De la décence dans les diagnostics techniques

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Deux maires proposent de « simplifier et compiler en un seul et unique contrôle technique du logement l’ensemble des diagnostics d’ores et déjà obligatoires, élargi au contrôle de la décence du logement ». Ils jugent aussi nécessaire de renforcer le diagnostic technique global (DTG) et d’y inclure un diagnostic structurel.

Ces propositions figurent dans le rapport de la Mission relative aux outils d’habitat et d’urbanisme à créer ou améliorer pour renforcer la lutte contre l’habitat indigne, remis hier au ministre du Logement. Il inspirera un projet de loi, visant à lutter contre l’habitat indigne et dégradé, annoncé pour la mi-novembre 2023.

mission pour lutter contre l’habitat indigne

Les maires de Mulhouse (Michèle Lutz) et de Saint-Denis (Mathieu Hanotin) ont été chargés de travailler sur les outils permettant de lutter contre l’habitat indigne et dégradé. En effet, on estime à 400 000 le nombre de logements indignes et près de 10 000 copropriétés seraient fragiles. Les 24 propositions des édiles, transmises à Patrice Vergriete le 23 octobre 2023, s’articulent autour de 4 grands axes :

  • renforcer la capacité à agir de la puissance publique sur le foncier ;
  • faciliter les interventions des acteurs de l’habitat privé ;
  • améliorer l’accompagnement et la protection des habitants ;
  • Sanctionner les propriétaires indélicats et les marchands de sommeil.

Chacune des 4 sections contient 3 à 8 propositions, à appliquer dès 2024. Intéressons-nous à celles relatives aux diagnostics obligatoires, qui ciblent les propriétaires de logements.

Diagnostic structurel dans le DTG

La 10e proposition consiste à « clarifier les modalités de réalisation d’un diagnostic structurel et des équipements communs au sein du diagnostic technique global (DTG) ». D’abord, les auteurs jugent indispensable de responsabiliser les copropriétés. Actuellement, la réalisation du DTG est soumise aux conditions de vote à la majorité des copropriétaires. Il n’y a donc pas d’obligation. Ensuite, l’acquéreur n’est pas informé de l’état structurel de l’immeuble et des équipements communs. D’où ces préconisations :

  • établir un diagnostic structurel complet obligatoire avec le DTG,
  • encadrer le DTG par une méthode d’analyse structurelle;
  • inclure au DTG un diagnostic structurel des équipements communs ;
  • rendre obligatoire la réalisation du DTG dans un calendrier,
  • calendrier qui sera cohérent avec le plan pluriannuel de travaux (PPT) ;
  • permettre à la collectivité de réaliser ce diagnostic d’office ;
  • conditionner les autorisations d’urbanisme à la réalisation du DTG.

L’Anah et les collectivités locales pourraient financer ce DTG / structure, afin de limiter les coûts pour les copropriétés fragiles. Par ailleurs le pôle national de lutte contre l’habitat indigne (PNLHI) prévoit d’instaurer une instance d’observatoire national pour définir les critères d’applicabilité et d’élaboration du diagnostic structurel. À titre préventif, il faudrait le rendre obligatoire dans tous les quartiers de concentration d’habitat indigne.

Permis de louer et contrôle technique global

Le permis de louer, né en 2016, est loin de s’appliquer sur l’ensemble du territoire. Selon les deux maires, il faut le généraliser et l’élargir aux locations saisonnières. De plus, la Mission invite à articuler le permis de louer avec un contrôle technique global du logement. C’est sa 21e proposition.

« Les diagnostics techniques actuellement obligatoires ne prennent pas en compte la notion de décence des logements ». Les propriétaires et les locataires n’ont donc pas clairement accès à cette information. Par conséquent, mieux vaut créer un « diagnostic unique et complet », exhaustif, lors de la vente, de la mise en location ou de la relocation. Celui-ci :

  • compilerait l’ensemble des diagnostics immobiliers obligatoires ;
  • informerait l’acquéreur / bailleur / locataire de la conformité du bien ;
  • intégrerait le contrôle de la décence de l’habitation ;
  • faciliterait l’instruction des autorisations de location (permis de louer) ;
  • aurait une valeur contradictoire de l’état global du logement.

Les auteurs se réfèrent à la proposition de loi portant renforcement du contrôle de la décence du logement, présentée le 10 mai 2023 par le député Guillaume Vuilletet.

permis d’acquérir et permis de diviser

Les auteurs préconisent aussi la mise en place d’un « permis d’acquérir ». Ce serait une formation obligatoire pour tout primo-bailleur afin de le responsabiliser quant à ses obligations réglementaires. Cette mesure fait d’ailleurs partie des propositions permettant de mener « une politique de tolérance zéro à l’encontre des propriétaires indélicats ».

Ils suggèrent également d’améliorer les dispositions du permis de diviser pour « renforcer la lutte contre les divisions pavillonnaire illicites ». Les marchands de sommeil, notamment, profitent de la division pavillonnaire non régulée. Ils mettent ainsi en location des locaux par nature impropres à l’habitation. La loi Alur permet d’imposer un permis de diviser avant des travaux de division dans un logement existant. Les auteurs veulent :

  • faciliter sa mise en œuvre : délais d’instruction d’un mois ;
  • mettre en cohérence les documents d’urbanisme et les règles de décence.

À propos du second point, cela revient à interdire la mise en location quand la création de locaux est réalisée sans autorisation d’urbanisme ou qu’elle est en infraction avec les PLU (plan locaux d’urbanisme).

Future loi pour résorber l’habitat indigne

Le ministre chargé du Logement a répondu en s’exprimant au nom du gouvernement. Il dit s’accorder avec la Mission sur de très nombreux points. De plus, « le ministre présentera très prochainement les mesures concrètes que le Gouvernement souhaite mettre en place pour donner suite à ce rapport et accélérer la résorption de l’habitat indigne et dégradé ».

Même si les 24 mesures du rapport feront l’objet d’arbitrages ministériels, « l’objectif, c’est de reprendre si possible la totalité de celles-ci ». M. Patrice Vergriete espère présenter son projet de loi le mois prochain, et le boucler d’ici la fin de l’année. Ainsi, toutes les mesures retenues pourront s’appliquer dès le premier trimestre 2024.

sources et (re)lectures
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3 Commentaires

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  1. E
    Elie 24 octobre 2023 - 15h06

    Bonjour,

    Pouvez vous me dire comment ces mesures pourraient-elles affecter les propriétaires, les locataires et les propriétaires de logements en termes de coûts, de responsabilités et de sécurité ?

    Bien à vous,

    Répondre
    • Cécile, le moteur de Quotidiag 24 octobre 2023 - 15h42

      Bonjour,

      C’est assez difficile à évaluer à ce jour. D’ailleurs, les deux maires proposent de commencer par une expérimentation, conduite par les collectivités et dans certains territoires « à forts enjeux ». Il faudra voir comment le projet de loi reprend et articule ces mesures.

      En tout cas, comme indiqué dans le document et notamment en annexe, les coûts liés aux délais et procédures, lorsque l’habitat est dégradé, peuvent actuellement être très élevés. Ces dispositions visent plutôt à les réduire en informant au plus tôt de l’état global du logement ou de la copropriété. Il est aussi proposé de mettre en place des aides spécifiques de l’Anah.

      En termes de responsabilité, il me semble que la situation resterait assez similaire. L’obligation de louer un logement décent, d’informer précisément l’acquéreur d’un logement, etc. sont déjà inscrites dans la loi. Qu’il y ait plusieurs diagnostics techniques ou un diagnostic global exhaustif, le principe reste le même.

      La mise en place d’un diagnostic structurel, s’il est bien encadré et suffisamment fiable, ne peut que renforcer la sécurité des occupants. Le fait d’intégrer la décence dans les diagnostics obligatoires aussi. Idem pour la lutte contre les marchands de sommeil. Après, il reste à voir comment tout cela prend forme dans la réglementation et en pratique.

      Répondre
  2. F
    François-Eric de la société DIAG 33 27 octobre 2023 - 11h04

    Ce serait pas mal de généraliser le permis de louer. En revanche, il faut que ceux qui sont chargés de le délivrer soient bien formés et en parallèle il faudrait aussi que les diagnostics soient revus.

    Sur Bordeaux, il est demandé aux propriétaires de corriger les anomalies électriques. C’est très bien, sauf que certaines anomalies sont théoriques (par exemple la valeur de la terre par rapport à l’AGCP alors qu’on a un 30 mA), et le propriétaire se retrouve embêté.

    Il faudrait aussi unifier certains textes. Je pense notamment à la décence et plus particulièrement à la surface. J’ai vu plusieurs cas de logements qui selon le CCH avaient une surface suffisante pour être décent, mais qui n’étaient pas conforme au règlement sanitaire départemental. Si un diagnostic de décence est instauré, il faudra un référentiel unique et pas un texte au niveau national et des variations locales.

    Répondre

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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