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Surface inexacte, DPE erroné et responsabilité

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Le DPE est passé de la classe C à la classe G, et la surface habitable de la maison de 169 m² à 147,53 m². Mais le propriétaire avait mal réalisé les travaux d’isolation lors de la construction. Il a aussi mentionné une surface erronée dans les annonces immobilières. Le préjudice subi au titre de la responsabilité décennale, due par le vendeur, se confond avec celui subi au titre de la responsabilité du diagnostiqueur.

Écarts de DPE et de surface habitable

M.V. fait construire une maison. Il participe aux travaux qui s’achèvent en avril 2005. En septembre 2015, M. J. et Mme N. signent un compromis de vente avec les consorts vendeurs, puis l’acte authentique fin 2015. Le DPE, établi par la société E. en mars 2012, mentionne une surface habitable de 169 m², un DPE de classe C et des frais annuels d’énergie de 1072,79 €.

Le 5 février 2016, les acquéreurs font réaliser un DPE par la société AD. Désormais, la surface habitable est de 142 m² et la maison se voit attribuer une classe E au DPE. M. J. et Mme N. font intervenir un autre diagnostiqueur le 1er juin 2016. La société DB. indique une surface habitable de 150,40 m² et un niveau de performance énergétique de classe F. Les propriétaires exigent la réparation de leur préjudice à hauteur de 64 295 € pour :

  • la différence entre la surface annoncée et la surface réelle ;
  • l’erreur de classification du diagnostic de performance énergétique.
La maison classée C est une passoire thermique

Le juge des référés du tribunal de grande instance de Lorient ordonne une expertise, confiée à M. Y. L’expert fait appel à un bureau d’étude thermique pour contrôler la performance énergétique de la maison lors de la réalisation du DPE de la société E. La méthode de calcul était alors celle définie dans l’arrêté du 15 septembre 2006. Ce DPE aboutit à un classement G, en raison de travaux non conformes aux règles de l’art.

L’expert note un défaut d’isolation à l’origine de frais annuels d’énergie excessifs. Selon lui, « l’ouvrage est impropre à sa destination en période hivernale ». Mais ces conclusions découlent de la mauvaise isolation du logement, et non des écarts de DPE. Par conséquent, la demande en garantie, basée sur l’article 1792 du Code civil, est fondée. « Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage des dommages… ».

Erreur de surface, responsabilité du propriétaire

M.V. mentionne une surface de 169 m² dans les annonces immobilières lors de la vente de la maison. La société E. a repris cette surface. C’est d’ailleurs la surface hors œuvre brute déclarée lors de la demande de permis de construire. Mais l’expert trouve une surface habitable de 147,53 m² au rez-de-chaussée, outre les combles. Il y a donc une erreur de surface de 21 m².

Le tribunal retient la responsabilité de M.V. au titre de la garantie des vices cachés. Les acquéreurs ne pouvaient s’en apercevoir, or la surface est un élément déterminant du prix de vente. M.V. prétend qu’il s’en est remis au métrage du diagnostiqueur. Pour les raisons exposées au paragraphe précédent, l’argument ne convainc pas la cour. Selon l’annexe 2 de l’arrêté du 15 septembre 2006, le diagnostiqueur obtient la surface habitable sur la base des informations fournies par le propriétaire.

Erreurs du diagnostiqueur

Malgré tout, le rapport d’expertise met en évidence les erreurs du diagnostiqueur en tant que professionnel averti. Selon l’expert, il aurait dû vérifier, même de manière sommaire, la surface indiquée. Le niveau de performance énergétique n’aurait sans doute pas été le même. De plus, la société E. n’a pas pris en compte les volumes non chauffés (escalier et combles). En fait, son DPE n’indique pas la présence d’étage ni d’escalier.

Mais le préjudice subi pour ce DPE erroné ne peut être réparé qu’au titre de la perte de chance de ne pas acquérir la maison, ou d’en négocier le prix de vente à la baisse. Le DPE n’avait alors, de toute façon, qu’une valeur informative. Ce préjudice est évalué à 21 500 €.

Condamnation du diagnostiqueur et du vendeur

« Le préjudice subi par les consorts au titre de la responsabilité décennale due par M.V. et au titre de la responsabilité du diagnostiqueur se confond, même s’il résulte de faits ou fautes différentes. La condamnation sera donc prononcée in solidum ».

M.V., le diagnostiqueur et son assureur, sont condamnés aux entiers dépens. La société E. et son assureur garantissent M.V. du montant des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 21 500 € au titre de l’indemnisation de la perte de chance. Ils doivent aussi verser 3500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

En revanche, M. V. est condamné à payer aux acquéreurs les sommes suivantes :

  • 5000 € : travaux d’isolation par le sol,
  • 5780 € : trouble de jouissance,
  • 2500 € chacun : préjudice moral,
  • 83 465,23 € : travaux de reprise de l’isolation pour atteindre la classe C,
  • 3282 € : surconsommation d’énergie et coût des DPE,
  • 24 945 € avec intérêts au taux légal à partir du 4 novembre 2020 : réduction du prix de vente.

Cour d’appel de Rennes, RG n°20/05887, 23 mai 2023.

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3 Commentaires

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  1. D
    Donnie 11 juin 2023 - 15h17

    Article intéressant, merci pour votre partage.

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  2. I
    Isabelle 10 janvier 2024 - 16h10

    J’ai acquis une maison en 2011 , le diagnostic montrait une surface de 140 M2
    Aujourd’hui je veux vendre cette maison et un nouveau diagnostic a été établi et mentionne une surface de 123 M2 !
    Est ce que je peux avoir un recours , me retourner contre le diagnostiqueur de l’époque ?
    La différence est énorme
    Merci pour votre réponse

    Répondre
    • Cécile, le moteur de Quotidiag 10 janvier 2024 - 17h30

      De quelle surface s’agit-il ? Comme ce n’est pas une copropriété, ce n’est pas la surface Carrez. Puisque ce n’est pas une location, ce n’est pas la surface habitable loi Boutin.
      A priori, c’est contre le vendeur que vous devez vous retourner.
      Le problème, c’est que le délai pour intenter une action en diminution de prix est d’un an. Il est de 5 ans pour exiger des dommages et intérêts.
      Vous pouvez néanmoins essayer de saisir le Tribunal judiciaire, mais vos chances de succès sont malheureusement très faibles.

      Répondre

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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