Les vacances ont été agitées pour plusieurs maires, obligés de réparer des écoles après les émeutes. Celles-ci ont souvent révélé la présence d’amiante. Finalement, le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, Gabriel Attal, a annoncé que seuls 5 établissements scolaires seraient fermés à la rentrée. Des solutions ont été mises en place pour les élèves. En revanche, le problème de l’amiante à l’école reste fondamentalement irrésolu.
L’éternel risque amiante à l’école
L’histoire de l’amiante dans les écoles se répète depuis longtemps. Un rapport ou une enquête crée un scandale, chacun s’insurge, et puis le soufflé retombe. Du premier état des lieux du patrimoine scolaire en 1998 jusqu’au recensement des équipes de « Vert de rage » en juin 2023, le scénario reste identique. Les réactions publiques ne sont pas suivies d’actes. En cette rentrée 2023, l’amiante a de nouveau été associé aux établissements scolaires, à cause des bâtiments incendiés lors des émeutes de juillet.
Généralement, c’était de l’amiante piégé. Mais faute d’information claire sur la présence d’amiante dans les écoles, les familles peuvent sans cesse craindre le pire. L’absence de transparence incite à croire à l’existence d’un risque amiante. En effet, la présence d’amiante dans les établissements scolaires n’est pas le cœur du problème. Le pire, c’est l’incapacité à évaluer les risques d’exposition à l’amiante pour les écoliers.
obligations réglementaires dans les écoles
Les rapports de L’ONS (Observatoire national de la sécurité dans les établissements scolaires et d’enseignement supérieur) n’étaient pas rassurants. En 2016, 80 % des lycées professionnels, 77 % des lycées généraux et 73 % des collèges contenaient de l’amiante. Surtout, les dossiers techniques amiante (DTA) obligatoires, lorsqu’ils existaient, étaient rarement tenus à jour. Alors comment être certain qu’il s’agit de matériaux non accessibles, en bon état de conservation, etc. ? Et si des travaux étaient réalisés sans repérage amiante préalable, par méconnaissance ?
En 2019, le rapport remis par les inspecteurs ISST (santé et sécurité au travail) au CHCST (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) était également inquiétant. Les collectivités n’avaient pas établi de DTA pour 46 % des écoles élémentaires visitées par les inspecteurs et construites avant 1997. L’obligation de mise à jour du DTA était rarement respectée. Souvent, personne n’avait accès à la fiche récapitulative. De plus, la disparition de l’ONS, en juin 2020, a alimenté les rumeurs. En effet, leurs enquêtes indépendantes étaient souvent gênantes…
Dossier amiante lourd à gérer et coûteux
Revenons à la situation présente. Dans l’école maternelle Jean Zay de Mâcon, par exemple, l’amiante se trouvait dans les bandes liant les cloisons d’une salle de classe brûlée. A priori, avant l’incendie, le risque était inexistant. Désormais, l’accès à l’école est interdit jusqu’à la fin des travaux de désamiantage. Or les assureurs des collectivités sont en difficulté. Les violences urbaines devraient leur coûter 650 millions d’euros, selon la fédération France assureurs. Un assureur a ainsi refusé de prendre en charge le désamiantage de l’école maternelle Robert Doisneau (Petit-Quevilly, Seine Maritime).
En général, il y a un problème de temps et d’argent. En prime, les municipalités s’estiment mal accompagnées par l’inspection académique, le ministère de l’Éducation nationale et l’État. C’est notamment ce qui ressort du rapport de la mission d’information sur le bâti scolaire à l’épreuve de la transition écologique. À ce propos, le mot « amiante » est étrangement absent du programme EduRénov. N’est-ce pas stupéfiant qu’en 2023, on puisse parler de rénovation énergétique, dans des bâtiments très majoritairement construits avant 1997, sans évoquer un RAAT ?
Vers une information publique amiante en 2024 ?
La municipalité de Strasbourg a été l’une des seules à fournir toutes les informations requises aux équipes de « Vert de rage ». Le gestionnaire du patrimoine école, Jérémie Leymarie, a eu une réaction évidente et néanmoins rare : « On a tout intérêt à ce que ces documents soient publics. Le pire serait qu’il y ait une méconnaissance du sujet et que des personnes fassent des travaux là où il y a de l’amiante. »
A-t-il inspiré la mairie de Paris ? En juillet 2023, cette dernière a promis de mettre tous les DTA en open data sur paris.fr. Espérons qu’elle tiendra parole. En effet, il suffirait déjà de faire preuve de transparence pour rassurer l’ensemble des citoyens concernés. Chacun vivrait ainsi une rentrée des classes et une année scolaire plus sereines.
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