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La peinture, solution universelle d’économie d’énergie ?

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Des chercheurs de l’Université de Stanford viennent d’inventer des peintures colorées à faible émissivité. Celles-ci offriraient notamment d’importantes économies d’énergie en matière de chauffage et de refroidissement. Leur étude a été publiée dans PNAS, la prestigieuse revue officielle de l’Académie nationale des sciences des États-Unis. C’était le 15 août 2023, en pleine période de congés estivaux, d’où le retentissement assez limité de la publication en France. L’invention semble pourtant prometteuse.

Une peinture pour sauver la planète ?

Suffit-il d’un coup de peinture pour réduire fortement les consommations d’énergie CVC (chauffage, ventilation, climatisation) ? Le principe prête à sourire. Certes, les peintures thermo-isolantes et la technique du coolroofing se développent ces dernières années. Cependant, l’efficacité de la première laisse à désirer sur des bâtiments peu isolés, à l’instar des passoires thermiques. La couleur blanche de la seconde fait aussi hésiter. À titre d’exemple, les toits gris appartiennent au patrimoine de Paris.

Sous tous ces angles, l’étude Colorful low-emissivity paints for space heating and cooling energy savings est assez convaincante. L’application de ces peintures aiderait réellement à conserver la chaleur par saison froide, et la fraicheur en période de forte chaleur. D’où une importante réduction des besoins en chauffage et en climatisation. En prime, les nombreuses couleurs lui confèrent un attrait esthétique, contrairement aux peintures réflectives.

Comment sont conçues ces peintures ?

Cette solution permet de former des revêtements en deux couches. Chacune est appliquée séparément. La couche inférieure réfléchit l’infrarouge grâce à des fibres d’aluminium. La couche supérieure, ultrafine, est transparente à l’infrarouge grâce à des nanoparticules inorganiques. Les nombreuses couleurs sont celles des peintures conventionnelles. En revanche, le coefficient de réflexion dans l’infrarouge est beaucoup plus élevé. Les avantages seraient multiples :

  • isolation thermique supplémentaire,
  • diminution de l’échange thermique radiatif,
  • économie d’énergie,
  • réduction des coûts en chauffage / refroidissement,
  • diminution des émissions carbone,
  • confort thermique (été comme hiver),
  • qualités esthétiques.

En outre, ces revêtements semblent avoir une très bonne durabilité environnementale et une couleur résistante. Après conservation à haute température, à basse température (azote liquide), dans de l’acide sulfurique, etc., les spectres MIR des échantillons n’étaient pas affectés. La couleur a aussi survécu à un rinçage à l’eau en continu. De plus, ces peintures se nettoient très facilement. Enfin et surtout, elles pourraient constituer une « solution universelle d’économie d’énergie ».

économies d’énergie, isolation et climat

Pour calculer les économies d’énergie, les chercheurs ont mené des simulations avec EnergyPlus (version 9.5). Le bâtiment objet des simulations était un immeuble d’habitation de taille moyenne (4 étages) construit après 1980. À partir de ce modèle, ils ont utilisé les données météorologiques horaires de différentes villes. Entre autres paramètres extérieurs pris en compte, citons la température, l’humidité relative, la direction et la vitesse du vent et le rayonnement solaire. Ils ont aussi fait varier les conditions d’isolation des bâtiments (valeurs U).

D’après les résultats des simulations, l’application des peintures débouche sur des économies en chauffage, refroidissement et ventilation. En revanche, leur importance varie en fonction de la zone climatique et du degré d’isolation du bâtiment. Concernant les économies d’énergie pour le refroidissement, l’effet est plus important dans les immeubles mal isolés situés dans des zones  chaudes. L’économie annuelle d’énergie, pour le refroidissement, s’élève ainsi à 11,37MJ/m²/an (mégajoules par mètre carré par an) à Miami.

Les économies d’énergie pour le chauffage sont plus prononcées dans les passoires thermiques situées en zone froide. En Alaska, l’effet était minime car l’isolation des bâtiments est meilleure. En définitive, la valeur annuelle d’économie d’énergie, pour le chauffage varie entre 0,102 MJ/m²/an (Kona, Hawaï) à 21,07 MJ/m²/an (Winslow, Arizona). Les économies totales de CVC dépendent aussi du  chauffage solaire, de la chaleur propagée par le sol, etc. En résumé, « ces peintures réduisent efficacement les besoins en chauffage d’environ 36 %, et les besoins en refroidissement de 20,8 % dans les espaces fermés soumis à des environnements chauds / froids artificiels. »

Affiner la solution avant commercialisation

Les inventeurs de ces peintures innovantes prévoient cependant d’améliorer encore leur solution avant commercialisation. D’abord, dans certaines villes américaines, l’utilisation de la peinture a légèrement augmenté le recours à la climatisation. Il n’y a toutefois pas eu de hausse de la consommation totale des systèmes CVC. Ils pensent pouvoir agir sur le phénomène, propre à certaines zones urbaines.

Ensuite, les solvants organiques utilisés sont moins respectueux de l’environnement que les solutions à base d’eau. C’est donc un point sur lequel ils vont travailler. L’innovation n’en est pas moins riche en promesses. Par ailleurs, ces peintures ne concernent pas uniquement les bâtiments. Elles pourraient aussi réduire les besoins en chauffage / climatisation dans les trains et les camions frigorifiques.

Sources
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5 Commentaires

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  1. P
    Pascal 13 septembre 2023 - 13h06

    Euh …. vu que 1 MJ=0.28 kWh
    Si on gagne 11.37 MJ/(m².an) ça fait 3.2 kWh(m².an)
    EN prenant les valeurs des gains extrêmes de 0.10 et 21 MJ on obtient respectivement 0.03 et 5.9 3.2 kWh(m².an).
    OK on gagne mais quant à passer de ces chiffres à 36% … faudrait pas non plus nous prendre pour ce que l’on est pas 😉

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 13 septembre 2023 - 16h08

      Je n’ai pas aligné tous les exemples et résultats de l’étude, ç’aurait été assez ennuyeux à lire. Par ailleurs, je n’ai pas suivi une formation poussée en thermique du bâtiment.
      Cette citation est néanmoins bien tirée de l’article scientifique. Je suppose que les 36 % sont, en moyenne haute, ce qu’il est possible d’espérer compte tenu des différents paramètres. Je la relirai pour mieux comprendre comment ils en arrivent à cette conclusion et je modifierai peut-être ce commentaire ensuite.

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      • S
        Sophie 13 septembre 2023 - 18h53

        En France, un organisme certifie ou pas les matériaux isolants : l’Association pour la CERtification des Matériaux Isolants …
        Lorsque que tels produits auront été validés par eux, je me pencherai sur la question !
        Pas de lambda ni de R indiqués…
        Cela fait la deuxième fois que j’entends parler de cette arnaque, je trouve cela dommage.

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        • Cécile, le moteur de Quotidiag 13 septembre 2023 - 18h58

          Il s’agit avant tout d’un article publié dans une revue scientifique et non d’un produit commercialisé.
          Peut-être est-il un peu tôt pour parler d’arnaque au sujet d’une innovation encore en cours d’étude ?
          Ou alors, vous avez raison et c’est mon tempérament optimiste qui s’exprime…
          En tout cas, je suivrai l’évolution de ce projet.

          Répondre
  2. M
    Maxime 29 septembre 2023 - 8h14

    Madame bonjour,

    il existe au États-Unis une peinture de la marque ThermaCote. Elle est distribué en Feance et affiche un R de 1.87 pour 1mm d’épaisseur. Il existe une norme appelée ISO9869:2015 qui permet de définir un R sur un film mince directement sur chantier. Je partage donc votre optimiste et comme toutes innovations, il y a toujours des réfractaires et il reste toujours difficile de changer les habitudes sur le R par une épaisseur.

    Bonne journée

    Répondre

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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