Mme Z. achète une passoire thermique dans laquelle il y a des matériaux et produits contenant de l’amiante, des anomalies électriques et de type DGI (danger grave imminent) et des champignons lignivores. Pendant les 6 années suivantes, elle se bat pour faire condamner le diagnostiqueur, les notaires, l’agence immobilière et la venderesse.
Acquisition et diagnostics techniques
Mme Z. s’est contentée d’une visite virtuelle avant d’acquérir une maison d’habitation en septembre 2017. Les diagnostics techniques, réalisés dix jours avant, auraient pourtant pu la faire hésiter :
- état d’amiante : repérage de matériaux et produits en contenant ;
- diagnostic électrique : existence d’anomalies électriques graves ;
- diagnostic gaz : existence de plusieurs anomalies de type DGI ;
- DPE : G pour la consommation énergétique, F pour l’étiquette climat.
- état parasitaire : présence d’agents de dégradations biologiques du bois.
Néanmoins, Mme Z, qui cherchait avant tout à vivre dans un environnement calme, achète le bien en précisant qu’elle n’exclut pas d’y faire des travaux.
Diagnostics immobiliers incompréhensibles
Cependant, face à l’importance des désordres et au coût des travaux, elle poursuit la résolution de la vente et sollicite sa nullité. L’acquéreuse s’appuie successivement sur le défaut de conformité et la garantie des vices cachés, le dol et l’erreur sur une qualité substantielle.
Elle pensait avoir acheté un « bien habitable », car l’annonce immobilière présentait la maison comme étant à réhabiliter ou à rénover. Or, son logement est insalubre. Son consentement a donc été vicié. D’après elle, tous les acteurs de la vente ont commis des fautes :
- le diagnostiqueur aurait établi un diagnostic amiante incomplet ;
- la venderesse l’aurait mal informée de l’état du bien immobilier ;
- l’agent immobilier lui aurait fait croire que la maison était habitable ;
- les notaires auraient manqué à leur devoir de conseil et d’information.
L’agence immobilière aurait aussi dû lui expliquer les anomalies retenues par le diagnostiqueur. Mme Z. fait le même reproche aux notaires, qui « auraient dû particulièrement attirer son attention sur le contenu des diagnostics, ceux-ci n’étant pas compréhensibles pour un profane ». Outre l’annulation de la vente et la restitution du prix, l’acheteuse demande l’indemnisation de ses préjudices matériels, moraux et physiques, ainsi que d’un préjudice de jouissance.
À propos des diagnostics incomplets
Mme Z. a fait établir un rapport d’expertise amiable en juin 2018. Il conclut notamment à la présence d’amiante non détectée par le diagnostiqueur. Cette situation rend impossible la réalisation des travaux nécessaires, car « les artisans refusent d’intervenir dans une maison amiantée ». Toutefois, l’expert a simplement déduit la présence d’amiante du procédé constructif, qu’il estimait non conforme.
« La cour ne saurait prononcer la nullité de la vente […] sur la base d’une simple déduction, résultant d’un rapport d’expertise amiable non contradictoire, qui n’est corroboré par aucun autre élément de preuve. » Ce problème se pose également avec l’infestation généralisée par un champignon lignivore décelée par l’expert. De plus, un an s’est écoulé entre l’état parasitaire, qui révélait des indices de présence d’agents de dégradation biologique du bois, et ce rapport d’expertise.
négligence à l’achat du bien immobilier
La venderesse rappelle que ses parents ont occupé la maison pendant 45 ans et y ont vécu presque centenaires. Le bien était donc habitable et salubre le jour de la vente. De plus, Mme Z. a signé et paraphé tous les diagnostics techniques. Ils lui ont d’ailleurs permis de négocier le prix de vente à la baisse, alors qu’il était déjà très bas. Elle a prétendu faire son affaire personnelle des désordres parasitaires, de la présence d’amiante, etc.
L’agence immobilière estime n’avoir commis aucune faute. « L’agent immobilier n’est tenu qu’à une obligation d’information, de moyen ». Elle rappelle, à son tour, que le caractère vétuste du bien et la présence d’amiante ont permis à Mme Z. de négocier le prix. Le notaire conteste toute responsabilité, affirmant avoir rempli son devoir de conseil. Il estime que Mme Z. a été trop négligente. Telle est également la conclusion de la cour.
Défaut d’entretien et de conservation
La cour d’appel considère que « l’état actuel de la maison est imputable à un défaut d’entretien et de conservation » de Mme Z. Elle vit dans cette maison depuis 6 ans (de procédure) et ne peut s’en prendre qu’à sa négligence. En effet, les rapports de diagnostics insistaient sur le caractère urgent des travaux, notamment concernant la mise en conformité des installations de gaz et d’électricité.
Pourtant, l’appelante ne produit aucune facture de travaux, exceptée pour l’installation d’un chauffe-eau et d’un mitigeur. Elle est déboutée de toutes ses demandes, mais condamnée à payer à la venderesse 500 € à titre de dommages et intérêts et 2000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Cour d’appel de Rennes, RG n°22/0637, 9 avril 2024.
Et bien pour une fois que le tribunal s’est prononcé dans ce sens c’est bien de le signaler, bravo, car trop souvent nos confrères sont traînés devant les tribunaux par des acquéreurs souhaitant faire bonbance sur le dos des prestataires liés à la vente.