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5 % de marge d’erreur sur la Carrez

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« Vous pouvez bien me rajouter un peu de surface Carrez, puisque vous avez les 5 % de marge ! » La demande peut provenir d’un agent immobilier ou d’un propriétaire vendeur. Elle tend à être moins fréquente, car le DPE devient le principal levier de négociation du prix de vente. Néanmoins, elle perdure, aux risques et périls des parties prenantes.

Prix du mètre carré et surface Carrez

On parle beaucoup des DPE de complaisance, moins des pressions exercées pour modifier la surface mentionnée. « Allez, vous pouvez bien me rajouter quelques mètres carrés ? » Des diagnostiqueurs entendent ce type de demande, surtout dans les villes où le prix au mètre carré est élevé. Au-delà du prix, l’espace est un critère d’achat ou de location. D’ailleurs, des agences immobilières ont déjà fait rire le web en mentionnant les mètres carrés ressentis dans leurs annonces.

Dans tous les cas, il y a tromperie sur les caractéristiques réelles du logement ou du local. Cependant, lorsqu’il s’agit d’augmenter la Carrez, le vendeur ou l’agent immobilier s’appuie fréquemment sur la marge d’erreur de 5 %. Ils y voient une marge de tolérance de l’erreur. Or, il n’y a pas de marge d’erreur qui tienne vraiment, que ce soit pour la Carrez, pour la surface habitable loi Boutin ou pour le DPE. L’article R156-1 du CCH, encadrant la SHAB, ne mentionne rien de tel. Quant à la Carrez…

C’est quoi cette marge d’erreur Carrez de 5 % ?

Les 5 % de tolérance de la loi Carrez proviennent d’une interprétation douteuse d’un texte de référence. À l’origine, il y a l’article 46 de la loi n°65-567 du 10 juillet 1965. On y lit : « si la superficie est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans l’acte, le vendeur, à la demande de l’acquéreur, supporte une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure… ». Au contraire, une superficie supérieure à celle exprimée dans l’acte, ne débouche sur aucun supplément de prix.

Le préjudice réside ici dans la perte de chance de vendre le lot ou la fraction de lot au même prix pour une superficie effective moindre. En effet, la surface est l’un des critères qui détermine le prix de vente. Mais d’une part, une différence de moins de 5 % peut avoir de réelles conséquences sur le prix, qui dépend aussi de la localisation. D’autre part, l’acheteur peut démontrer qu’il est victime d’un autre préjudice liée à un défaut de mesurage.

Métrage minutieux et jurisprudence

À ce jour, la jurisprudence tend à appliquer le principe des 5 % dans les copropriétés. Il n’en serait pas moins dangereux d’y voir une marge de tolérance. Le métrage Carrez comporte de nombreux pièges, évolue avec la jurisprudence, et constitue une cause fréquente de litiges. Laissons donc le diagnostiqueur l’effectuer au plus près de la réalité. Enfin, mettons-nous un peu à la place de l’acquéreur. Il a droit à une information transparente avant de prendre une décision aux conséquences majeures.

Par ailleurs, les annonces de maisons individuelles comportent fréquemment la mention de la Carrez. Or la loi Carrez ne l’impose qu’en copropriété. Par le passé, les députés ont régulièrement débattu de l’idée d’étendre ce dispositif aux maisons. Le ministre du Logement s’y refusait, car la valeur d’une maison dépend également de son terrain.  En revanche, avec l’opposabilité des données du DPE, l’acheteur dispose d’un recours en cas de SHAB erronée. Bref, désengorgeons dès maintenant les tribunaux en acceptant, collectivement, de respecter scrupuleusement la réglementation.

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2 Commentaires

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  1. E
    EN COLERE 26 janvier 2024 - 18h52

    Je suis dans le diagnostic depuis de nombreuses années, avant l’apparition du DPE en 2007. Malheureusement je ne suis pas surpris par ce type de pratique.
    Il faut absolument rompre l’aspect financier avec l’agent immobilier. Nous avons eu le décret anti commission il y a quelques année et c’était une bonne chose.
    Maintenant il faut absolument interdire le fait que les agents immobiliers puissent offrir les diagnostics à leurs clients. Dans ce type de cas c’est l’ouverture à toutes les dérives, car les agents immobiliers font pression sur le diagnostiqueur en terme de coût et de résultats.
    Je pense que la DGCCRF irait dans ce sens, maintenant c’est au législateur de faire le nécessaire…

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  2. P
    Pic 29 janvier 2024 - 23h06

    Il faut au contraire entériner la marge acceptable de 5% d’erreur.
    C’est très peu 5% d’erreur et c’est tout à fait admissible au quotidien.
    Un diagnostiqueur rentre des centaines de données par jour, l’erreur est parfaitement humaine et 5% d’une surface ne devrait pas constituer un changement du prix de vente.
    Si c’est le cas, c’est parce que les marchés sont complètement déphasés et ceci n’est pas à reporter sur les épaules du diagnostiqueur, cela suffit.

    On l’emmerde déjà suffisament avec tout, et de plus en plus.

    Personnellement, je m’accorde environ 2% de droit à l’erreur. Mais 5% cela ne me choque pas outre mesure.

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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