Des sociétés matraquent les consommateurs de publicités mensongères relatives à la rénovation énergétique. Interrogé par des députés, le ministre de l’Économie affirme : « La lutte contre les pratiques abusives en matière de rénovation énergétique constitue une priorité du Gouvernement ». Ceci est un véritable leitmotiv. Le ministère de la Transition écologique prononçait aussi cette phrase, à l’identique, il y a deux ans. Et en effet, les outils de lutte augmentent, mais les pratiques frauduleuses se multiplient tout aussi vite.
fraudeurs imaginatifs et consommateurs
Avec la loi du 24 juillet 2020, le gouvernement a interdit le démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique. La seule exception concerne les sollicitations dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours avec un client. Malheureusement, cela ne dissuade pas les escrocs. Voici quelques-uns de leurs outils favoris pour appâter les propriétaires de logements :
- courriers et prospectus (audit énergétique à prix cassé, travaux d’isolation aidés…) ;
- porte à porte d’individus se réclamant de l’Anah, du ministère, de l’ADIL, etc. ;
- publicités en ligne, sur les réseaux sociaux surtout, avec d’extraordinaires promos…
Entre l’obligation de rénovation des passoires thermiques et les prix élevés de l’énergie, le consommateur veut croire à ces offres. De plus, il ignore les aides auxquelles il a droit. Il ne sait pas non plus à qui accorder sa confiance. Enfin, certaines sociétés sont organisées en réseau. Par exemple, tel acteur recueille les données de l’internaute, puis les revend à des entreprises d’installation sans fabrication. En prime, le siège se situe souvent à l’étranger. D’une part, l’argent est rapidement transféré hors du territoire. D’autre part, ce contexte limite les moyens d’action de la répression des fraudes.
rénovation énergétique : interdire la publicité ?
Plusieurs députés ont récemment appelé M. Bruno Lemaire à agir. M. Romain Daubié propose d’interdire les publicités relatives aux travaux de rénovation énergétique. Il cite notamment les pages Facebook Plan Transition Énergie et Programme Transition Énergétique qui ont permis à Facebook de gagner environ 1,4 million d’euros pour de la publicité en 4 ans. L’affaire avait été révélée par BFM TV en mars 2023. Si ces pages ont été supprimées, d’autres les ont remplacées.
Le député Jean-Luc Warsmann s’intéresse quant à lui aux courriers et aux fausses promesses auprès des consommateurs et des consommatrices. « Les déceptions sur le rapport qualité-prix des produits vendus ou sur la non-atteinte des performances présentées comme certaines sont nombreuses et laissent souvent des concitoyens désemparés face à un organisme bancaire qui a accordé un prêt pour financer l’opération et exige le remboursement ». Le ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique leur a répondu.
Réponses du ministère concernant ces fraudes
La DGCCRF n’est pas inactive, en témoignent les chiffres cités par le ministère. Elle a contrôlé 817 établissements en 2022, avec un taux d’anomalie de 54,7 %. En 2023, la DGCCRF se fixe un objectif de 1 200 visites. Les services concernés ont aussi amélioré leurs échanges d’informations. En outre, les pouvoirs publics travaillent sur le renforcement des exigences du label RGE. Et puis, il y a la mise en place de Mon Accompagnateur Rénov’, le fameux interlocuteur « neutre et de confiance ». (NDLR : l’ennui est qu’en réalité, il y a déjà des usurpateurs Mon Accompagnateur Rénov’.)
Concernant les arnaques en ligne, le Gouvernement insiste notamment sur l’injonction numérique issue de la loi DDADUE. Elle permet d’ordonner l’affichage d’un avertissement sur le site, un déréférencement, un blocage, etc. Pour finir, le ministre mentionne le projet de loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique. Adopté par le Sénat le 5 juillet 2023, il instaure un filtre anti-arnaque. Après avoir reçu un SMS ou un courriel frauduleux les invitant à consulter un site, les consommateurs recevraient un message d’alerte. Cela les protégerait de l’hameçonnage (pishing).
Cependant, il reste à savoir comment les fraudeurs s’adapteront à ces changements. Bref, mieux vaut acquérir de bons réflexes pour identifier les comportements suspects. Terminons donc avec quelques conseils qui s’adressent spécifiquement aux propriétaires de biens immobiliers.
Fraudes à la rénovation : déjouer les pièges
La loi pour la confiance dans l’économie numérique oblige toute personne morale à afficher sur son site Internet, entre autres, sa dénomination sociale, l’adresse de son siège ainsi qu’une adresse de courrier électronique ou un numéro de téléphone. Les conditions générales de vente (CGV) doivent également figurer sur les sites marchands. Par ailleurs, si la société a des avis positifs des internautes, vérifiez leur provenance. En effet, certaines entreprises affichent de faux avis Trustpilot quand les vrais sont négatifs. Ne communiquez pas vos coordonnées bancaires, documents fiscaux, etc. sans être certain de la fiabilité de l’entreprise.
Sachez que les services publics ne démarchent jamais, d’aucune manière (par mail, à domicile ou par courrier). Si la société vous vend un produit en se réclamant d’EDF, de la mairie, de l’ADEME, etc., quelque chose est forcément louche. De manière générale, un particulier ne doit pas donner suite au démarchage téléphonique ou à domicile dans le secteur de la rénovation énergétique. La société qui agit ainsi est déjà dans l’illégalité. Enfin, sachez que les offres frauduleuses à la mode concernent les travaux d’isolation, l’installation de panneaux solaires ou d’une pompe à chaleur et les changements de chaudière.
Dès qu’une société dit bénéficier d’un label, l’information est vérifiable sur un site en gouv.fr. Les diagnostiqueurs certifiés habilités à réaliser un audit réglementaire sont listés sur l’annuaire du ministère de la Transition écologique. S’il s’agit d’une entreprise RGE, vérifiez sur l’annuaire des professionnels France Rénov’. L’espace France Rénov’ vous permet également de voir si vous avez droit aux aides annoncées. Ne signez rien avant d’avoir soigneusement lu le document et comparé les offres. Si vous avez signé, vous bénéficiez d’un délai de rétractation de 14 jours. Et en cas d’escroquerie, rendez-vous sur Signal Conso, la plateforme en ligne de la DGCCRF.
Sources et textes réglementaires
- Question n°6958 de M. Romain Daubié
- Question n°7601 de M. Jean-Luc Warsmann
- Loi du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique
- L’injonction numérique : un outil précieux
- Projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique
- Loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique
- Code de la consommation, art. L223-1 3e alinéa et 223-2
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