Pour la 1re journée nationale de la résilience face aux risques naturels et technologiques, parlons de la conformité des ERP. Guillaume Girard est le directeur commercial de Septeo Proptech (ex-Kinaxia). Cette société développe la solution Preventimmo, laquelle délivre plus d’1 million d’états des risques par an pour les 36 000 communes de France. Le groupe travaille avec le notariat et les diagnostiqueurs. Guillaume Girard est lui-même est un ancien diagnostiqueur. Il connaît parfaitement les enjeux liés à l’état des risques et pollutions.
L’instauration d’une journée « tous résilients face aux risques » montre une prise de conscience accrue des risques naturels, technologiques, etc.
Ce sujet a de plus en plus d’importance. On le voit d’ailleurs avec le décret du 1er octobre qui oblige à avoir un état des risques complet au moment de la première visite de l’immeuble. Dès la mise en vente ou en location, il doit y avoir une mention relative aux risques dans l’annonce immobilière.
Cette décision s’explique aussi par l’augmentation des sinistres liés à de mauvaises ou à de fausses déclarations sur des zones à risques naturels, miniers, et technologiques. En plus des litiges, il y a aussi des drames, des vies brisées, par exemple en cas d’inondation ou de sécheresse.
Qu’est-ce qu’un état des risques et pollutions conforme ?
Pour avoir un état des risques conforme, il faut indiquer des risques justes, localisés précisément, avec exhaustivité. Il doit aussi y avoir les secteurs d’informations sur les sols, ce que l’on appelle les SIS. Ce sont les zones polluées ou qui ont accueilli des activités polluantes.
Aussi, un ERP conforme tient compte des prescriptions de travaux. Cette notion de prescription de travaux est très importante car l’obligation de faire des travaux peut engendrer des dépenses allant jusqu’à 10% de la valeur du bien !
Pourquoi faut-il impérativement mentionner les prescriptions de travaux ?
Parce que s’il fallait commencer à déplacer toutes les populations qui sont dans des zones à risque, eh bien il n’y aurait plus d’espace pour les loger. Je vais prendre l’exemple d’une grande ville française : Nice. C’est une zone sismique très forte où il y a des zones d’éboulement et des fontis. Vous avez des cavités et, parfois, des immeubles qui ont tendance à bouger.
Les prescriptions de travaux permettent de dire ce qu’il faut faire pour être en sécurité et pour s’assurer s’il y a un risque avéré. On appelle cela réduire la vulnérabilité des biens existants en zone à risque.
À propos d’information sur les sols, il est précisé, dans le décret, qu’un document d’information sur les sols doit être annexé au contrat. C’est nouveau ?
Ce sont les SIS. Non, ce n’est pas nouveau. Ce sont simplement les informations à fournir qui ont été clarifiées.
L’obligation de remettre un état des risques dès la visite ne va-t-elle pas poser un problème sachant que la durée de validité n’est que de 6 mois ?
En fait, le projet de loi, à la base, prévoyait même de réduire la durée de validité à 3 mois. Sur la totalité des communes, il y a 90 mises à jour quotidiennes sur les plans de prévention des risques. Si vous prenez une équipe comme Preventimmo ERP Diagnostics, ça mobilise 12 emplois à temps plein.
Notre travail, c’est de mettre à jour cette information en s’assurant de le faire correctement. L’état des risques n’est pas juste un bout de papier ! l’obligation légale est qu’il soit de moins de 6 mois à la première visite puis à jour à la signature de l’acte authentique donc sa durée de validité n’a pas réellement de sens.
L’importance de l’état des risques et pollutions est donc sous-estimée…
Pour être tout à fait honnête, j’ai été diagnostiqueur pendant 10 ans. J’avais un gros cabinet avec 20 collaborateurs. Nous faisions à peu près 500 dossiers par mois et l’état des risques n’était vraiment pas notre priorité. Mais quand on voit les litiges maintenant… Il y a eu des problèmes et on l’a notamment vu avec le retrait de MMA.
Je pensais que le retrait de MMA était plus lié aux problèmes de fiabilité du DPE par exemple…
Non, ce n’est pas ce qui leur coûte le plus cher. En général, avec tous les diagnostics, ce sont des sanctions où on s’arrange. Avec l’état des risques, la sanction est ce que l’on appelle la résolution du contrat, donc la résolution de la vente ou du bail. C’est un vrai problème parce qu’il y a la tentation du low cost sur l’état des risques.
Les litiges sur l’ERP sont donc en augmentation ?
En fait, dans un langage assurantiel, la fréquence est faible, mais l’intensité est forte en matière d’état des risques. Le 1er litige, en 2014, a coûté 22 500 €. Le 2e litige, 170 000 €. Le 3e, l’affaire du camping en zone inondable non déclarée, c’est un litige qui a atteint 400 000 € : 260 000 € d’immobilier, 140 000 €. Cette situation ne se produit pas avec un DPE ni avec un diagnostic amiante.
Les litiges jugés en appel et cassation datent de 2009, c’était le démarrage de l’obligation ERP. Malheureusement, les jugements devraient croitre car à l’époque, l’obligation d’établir un ERP existait sur beaucoup moins de communes qu’aujourd’hui…
La nouvelle mention à intégrer dans les annonces renvoie à Géorisques, mais ce site n’est pas forcément à jour ?
Exactement. Pour différentes raisons, notamment les plans de prévention qui ne sont pas systématiquement à jour sur Géorisques. On constate un énorme décalage dans les mises à jour. C’est lié aux traitements manuels, nécessaires pour mettre à jour ces cartographies au plus vite. Géorisques ne propose que des données vectorisées disponibles beaucoup plus tardivement. Quant aux prescriptions de travaux, elles ne sont pas du tout mentionnées dans Géorisques.
Les informations Géorisques sont intéressantes, mais il peut manquer des informations exigées dans le décret du 1er octobre 2022, telles que le nom de la zone à risque où se trouve le terrain, le règlement du plan, la cartographie officielle du zonage… La problématique vient essentiellement de la mise à jour des plans de prévention. Il y a plus de 1 500 ajouts/modifications/annulations de plans par an, or c’est une information difficile à saisir qui nécessite une intervention humaine. C’est un peu comme le site ERRIAL en termes de responsabilité.
Précisément, quelle est la place de l’ERRIAL par rapport à l’ERP ?
Il est bien précisé, sur le site de l’ERRIAL, que le propriétaire reste entièrement responsable de toutes les informations qui sont données. Ce sont des éléments à prendre à titre informatif, et non pour argent comptant. Le site mentionne bien que des éléments doivent être complétés par ailleurs (cartographies et règlement). Confier l’état des risques à un professionnel, c’est bénéficier de la compétence et de l’assurance d’un professionnel en cas de litige.
L’ERRIAL est gratuit, mais il n’y a aucune assurance. On laisse le particulier face à ces risques. Finalement, ça va vaguement à l’encontre du décret IAL. L’ERRIAL est surtout un sujet politique, un moyen de mettre de la gratuité dans l’ERP. C’est une information intéressante préalable à un état des risques.
Pourriez-vous faire un petit rappel des bonnes pratiques en matière d’ERP ?
Les bonnes pratiques concernent le contenu, la manière de réaliser l’ERP, et le livrable attendu. Le contenu figure dans l’article 125-5 du Code de l’environnement. Il faut prendre les cartes de risques vectorisées ou PDF existantes, la liste des arrêtés de catastrophe naturelle et les plans de prévention des risques prescrits ou approuvés. C’est une liste non exhaustive puisque c’est le préfet qui, préfecture par préfecture, définit les documents utiles.
En ce qui concerne la manière de réaliser l’ERP, la localisation à la parcelle est très importante, car même si une petite partie de la parcelle est concernée, il faudra considérer que le bien est concerné. Je prends un calque, je localise les biens et je mets autant de calques qu’il y a de risques. C’est là où le numérique apporte vraiment une solution rapide. Les systèmes d’information géographique accélèrent la réalisation de l’état des risques.
À propos du livrable attendu, il y a souvent un abus de langage, car on parle de Cerfa. Mais ce papier rose n’est pas un Cerfa. Il n’y a nulle part la mention de Cerfa. C’est une présentation presque normative avec un rappel des différents PPR, de leur prescription ou approbation. Un ERP peut être rédigé sur papier libre, l’important est le contenu pas le contenant.
Enfin, outre ce papier-là, il faut une déclaration des catastrophes naturelles subies par le propriétaire vendeur ou le propriétaire bailleur. C’est fondamental de préciser les sinistres car quelquefois, aucun plan n’existe et seuls les événements passés peuvent éclairer sur la nature des risques existants.
Il doit également y avoir des annexes pour indiquer quels documents ont été utilisés pour cet ERP (cartographies intégrales permettant la localisation du bien, règlement et note de présentation du ou des PPR, fiche de synthèse séisme, radon, etc.). Le décret d’octobre vient rajouter et surtout normer tous les livrables attendus. Il apporte aussi d’autres précisions qui feront l’objet d’un prochain article.
Bonjour, Je trouve cette article intéressant. Car je réside dans une région ou il y eu a beaucoup
de catastrophe naturel et je pense que cela va accentué avec le temps et de pas négliger cette aspect; Cordialement Monsieur Dahi