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Un beau métier, pollué par des pseudos diagnostiqueurs

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Michaël Guidez a créé le bureau d’étude thermique et l’entreprise de diagnostics immobiliers DIRET-Conseil en novembre 2021. Il débute dans le métier et fait face aux difficultés vécues par de nombreux professionnels de la filière. Portrait d’un nouveau diagnostiqueur qui prévoit de se spécialiser dans la thermique du bâtiment.

De la restauration à la thermique du bâtiment

Contrairement à d’autres diagnostiqueurs immobiliers, Michaël Guidez n’est pas issu du bâtiment. Il travaillait dans le domaine de la restauration, le service à table. Après le Covid et un licenciement économique, il a décidé de se recycler.

« J’ai toujours aimé bricoler. Dans ma maison personnelle, j’ai voulu réaliser des travaux d’isolation, un gros chantier global. Pour être tranquille, j’ai fait appel à une société spécialisée en rénovation et au final, je vais certainement finir au tribunal avec eux. J’ai été très déçu. Alors je me suis dit, pourquoi ne pas me lancer là-dedans ? En effectuant quelques recherches et en regardant les formations, la thermique du bâtiment m’a passionné. C’était super intéressant. Mon but, maintenant, c’est vraiment d’accompagner le particulier. »

Finalement, il s’est inscrit dans toutes les formations techniques et logiciels, pour le diagnostic immobilier et la thermique du bâtiment.

En formation, la partie terrain manque

Pour réussir sa reconversion professionnelle, l’ancien directeur d’un restaurant en Picardie a donc suivi beaucoup de formations. Il s’est formé à la réalisation de tous les diagnostics immobiliers, a validé une formation certifiante pour de la thermographie infrarouge, un diplôme en thermique du bâtiment, les formations logiciels nécessaires et l’infiltrométrie ou étanchéité à l’air du bâtiment. Lors de notre entretien, il se préparait à participer à une formation à la ventilation en maisons individuelles pour la nouvelle norme RE2020.

« J’ai fait mes formations en distanciel car j’avais des contraintes personnelles. Je vis dans la campagne profonde avec 4 enfants à charge. J’ai galéré car on n’est pas accompagné comme en présentiel. J’ai fait des compléments de recherche, lu tous les arrêtés et décrets réglementaires, etc. Ce qui m’a le plus manqué, c’est la partie pratique. Peu de formations incluent la partie terrain en plus des contenus théoriques or c’est primordial. »

Lors de sa première mission, sur une maison de 80 m², il est arrivé à 8 heures du matin pour repartir à 18 heures. 10 heures, c’est long, mais il lui fallait mettre en pratique la théorie et trouver ses marques.

Difficultés pour créer et lancer l’entreprise

Si l’entreprise est née le 1er novembre 2021, le diagnostiqueur n’a obtenu sa première mission que le 28 novembre. Les créations d’entreprises s’accompagnent souvent de nombreux retards. Pendant la période de Noël, les commandes ont été rares. Maintenant, il commence à y avoir des devis… qui ne se finalisent pas tous, et rarement en demandes de contrat.

« C’est un beau métier mais malheureusement pollué par des pseudos diagnostiqueurs. Quelqu’un qui fait une complète sur une maison individuelle pour 200 €, ce n’est pas un diagnostiqueur. Si j’interviens sur une maison individuelle d’environ 100 mètres carrés, pour une complète c’est au bas mot 4 heures de repérage, plus le temps pour la rédaction des rapports. Sinon, c’est qu’on ne fait pas des diagnostics. Parfois je vois des rapports qui me font peur et pourtant je ne fais que débuter, ça ne me rassure pas. »

L’ouverture de l’audit énergétique aux diagnostiqueurs l’inquiète pour la même raison. C’est une bonne idée car on va manquer d’auditeurs, mais certains opérateurs vont faire du remplissage de papier. Un audit se facture actuellement entre 750 et 1000 € mais « si c’est le même cinéma qu’avec le diagnostic immobilier, ça se vendra 300 € dans un an et demi ».

Assainir le marché du diagnostic immobilier

Selon le gérant de DIRET-Conseil, le gouvernement a énormément de bonnes idées, notamment pour la rénovation du parc existant et des passoires thermiques. En revanche, il constate un réel problème au niveau des tarifs pratiqués, surtout en tenant compte des coûts derrière, notamment pour la certification.

« Pour moi, il y a 2 solutions pour assainir le marché du diagnostic immobilier : soit les centres de certification durcissent les contrôles, soit il faut des tarifs réglementés et cohérents. Là, les clients feront davantage attention à ce qu’ils signent. Moi, je ne baisserai pas mes prix. Je dis clairement qu’à ce prix-là, les propriétaires ne sécurisent pas la transaction avec leurs acquéreurs. Ils se contentent de transmettre un papier à leur notaire. »

Pour lui, les organisations, syndicats et « pseudos syndicats » qui se créent sont inutiles sur ce point, puisque rien n’est fait. « Le problème est présent depuis des années mais rien ne change. » Au contraire, il salue la vraie entraide présente sur les groupes Facebook de diagnostiqueurs. En tout cas, impossible de donner bonne image du technicien sans rendre les prix cohérents. Il nous confie : « Je ne fais pas que du diag immo, sinon je m’interrogerais à poursuivre ».

AMO rénovation énergétique, le gros projet

En effet, Michaël Guidez est également responsable d’un bureau d’études thermiques. Son objectif est de proposer une assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO), aux particuliers, pour la rénovation énergétique des maisons individuelles. C’est également compliqué de se lancer dans ce secteur, mais pour d’autres raisons.

« J’ai remporté un marché public avec la SPEE (Service Public d’Efficacité Energétique) dans ma région pour l’Audit Energétique et l’accompagnement en rénovation énergétique en maison individuelle, avec le suivi des travaux, jusqu’à la fin du chantier et sa réception. Là, c’est en stand-by car comme je n’ai pas d’expérience, aucun assureur ne veut me suivre… Il faut aussi monter des dossiers compliqués et attendre plusieurs semaines pour avoir la certification Qualibat… Bref, c’est un projet pour la deuxième partie de l’année. »

Il n’a pas trop peur de la concurrence avec les bureaux d’études et les architectes dans le domaine de la construction. Dans la Somme et ses alentours, ce sont surtout de grosses structures axées sur le collectif. À l’inverse, son créneau, c’est l’accompagnement du particulier et le contact humain. Faire en sorte que le chantier soit bien réalisé comparativement à ce que l’on est en droit d’attendre.

Optimiste pour l’avenir malgré tout

L’entrepreneur s’attend à mettre plus longtemps que prévu pour développer son activité parce qu’il est sur le marché du qualitatif et du réel. Néanmoins, lorsqu’il se sera implanté et aura obtenu la reconnaissance méritée pour son travail, ses tarifs seront jugés cohérents, et les clients signeront ses devis. Il a aussi foi en l’avenir du diagnostic immobilier.

« Je pense que dans les années à venir, de plus en plus d’acquéreurs vont s’intéresser concrètement aux diagnostics. Il y a encore quelques années, le diagnostic immobilier était un papier obligatoire que personne ne regardait. Maintenant, les acquéreurs regardent les diagnostics techniques de plus près et surtout le DPE. C’est l’acquéreur qui est le plus concerné. Il devrait beaucoup plus feuilleter son dossier de diagnostic technique ».

Il souhaite aussi que tous les diagnostics obligatoires soient exigés bien avant la vente, comme pour le DPE. Ainsi, chaque potentiel acquéreur aurait le temps de les lire avant de s’engager. Lui-même insiste sur le fait qu’il ne se contente pas de rédiger des rapports. Il reste disponible pour le propriétaire bailleur ou le vendeur, mais aussi pour tout acquéreur qui se poserait des questions.

« Il faut qu’il y ait une vision plus sérieuse des diagnostiqueurs. On est un maillon important de la chaîne de la vente ou de la location, sans être reconnus à notre juste valeur, par rapport à un agent immobilier ou à un notaire. Mais je pense que tout ça va évoluer. »

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1 Commentaire

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  1. E
    ENGUERRAND 19 mai 2022 - 0h48

    Félicitation pour votre reconversion, et bienvenu dans ce beau métier ! Je partage ++ le point de vue de la qualité et du sérieux de nos interventions et rapports, même si il est souvent difficile et contraignant de coller aux évolutions techniques et réglementaires.
    Certains se contentent d’éditer des « rapports » sans aucune conscience professionnelle ni démarche qualité, et bien qu’ils réalisent un CA souvent supérieur, bien qu’en proposant des prix bas, il est à mon sens bien plus rentable d’avoir une conscience professionnelle.

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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