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La 1re édition de la Journée contre la précarité énergétique se tenait en novembre 2021. C’était l’année de la réforme du DPE et de la promulgation de la loi Climat Résilience. Aujourd’hui, en cette 4e édition, les associations réclament une accélération des rénovations performantes. Les organisations craignent aussi que les modifications apportées au DPE et au calendrier se fassent au détriment des occupants de passoires thermiques.
précarité énergétique : 2021 vs 2024
Le 10 novembre 2021, la Fondation Abbé Pierre initiait la JCPE, avec des organismes impliqués dans la prévention de la précarité énergétique. Au premier semestre 2021, 20 % des Français déclaraient avoir souffert du froid pendant au moins 24 heures au cours de l’hiver, à cause d’une mauvaise isolation thermique de leur logement (40 %) et pour des raisons financières (36 %). En 2024, 12 millions de personnes sont en situation de précarité énergétique.
Selon le dernier baromètre-énergie info 2024, 30 % des ménages disent avoir souffert du froid pendant au moins 24 heures durant l’hiver. Ils sont 42 % à avoir subi la chaleur. La limitation financière est désormais la première raison évoquée, juste avant la mauvaise isolation (32 %). Bref, la situation ne s’est guère améliorée en 4 ans, au contraire. La précarité énergétique étudiante, notamment, ne cesse de s’aggraver.
Précarité énergétique et passoires thermiques
Pour les associations, l’éradication de la précarité énergétique passe par la disparition des passoires thermiques. Et pour améliorer rapidement le niveau de performance énergétique des logements, il faut accélérer le rythme des rénovations performantes. À ce sujet, deux documents récents se complètent assez bien :
- Le dossier de presse JCPE 2024 ;
- La note de positionnement : proposition de nouvelles normes de rénovation performante pour atteindre les objectifs européens.
Le premier est un état des lieux de la précarité énergétique et un bilan des politiques publiques. Il rappelle, entre autres, que la rénovation des passoires thermiques sauve des vies. L’inefficacité énergétique joue un rôle dans la surmortalité hivernale ; l’humidité du logement accroît le risque d’intoxication au plomb, etc. Le second propose aux décideurs politiques des mesures pour atteindre les objectifs de rénovation européens.
Une année de réforme et d’instabilité
Les auteurs du dossier de presse JCPE constatent que 2024 a été « une année de réforme et d’instabilité » :
- réforme avortée de MaPrimeRénov’ ;
- réforme du DPE au 1er juillet 2024 (petites surfaces…) ;
- annonce de l’adaptation du calendrier et de la simplification du DPE.
« Le financement public des travaux en mono-gestes dans les passoires énergétiques doit, comme initialement prévu, s’arrêter fin 2024 », affirment plusieurs acteurs. La ministre du Logement a récemment annoncé, devant la commission des affaires économiques, que le système mis en place en mai serait prolongé en 2025.
Par ailleurs, « en parallèle de l’obligation de rénover les passoires thermiques, le diagnostic de performance énergétique (DPE) constitue un autre outil de protection des locataires. » Il est « efficace et désormais connu du grand public ». Cependant, l’évolution du DPE des petites surfaces inquiète.
D’abord, elle fait sortir 140 000 logements du statut de passoires thermiques sans nécessiter des travaux, ni réduire les coûts énergétiques pour les occupants. Ensuite, elle crée une inégalité de traitement en fonction de la surface de référence du logement.
Enfin, la loi Climat Résilience protégeait les locataires en gelant les loyers des classes F et G depuis le 24 août 2022. « Toutefois, des remontées témoignent d’un non-respect fréquent de cette disposition, de nombreux locataires continuant à subir des augmentations de loyers abusives alors qu’ils vivent dans des passoires thermiques ou qu’ils n’ont pas accès au DPE ».
Accélérer la rénovation performante
Le second document précité doit surtout permettre d’atteindre les objectifs européens, à commencer par ceux de la DPEB. Le collectif y « préconise une approche multidimensionnelle centrée sur des MEPS appliquées au secteur résidentiel ». Les MEPS sont, en français, les normes minimales de performance énergétique. Il y en aurait 4, selon les typologies de bâtiments, sous forme d’obligations :
- rénovation performante à la mutation des maisons individuelle ;
- isolation lors du ravalement de façade ou à la réfection des toitures en y couplant la rénovation performante des copropriétés ;
- rénovation performante progressive des logements sociaux ;
- rénovation performante lors de la mutation des bâtiments collectifs.
Quatre objectifs sont assignés à ces nouvelles MEP du parc résidentiel, sauf impossibilité technique majeure :
- Atteindre la classe A du DPE en 2050, en rénovant d’abord les passoires thermiques.
- Prendre en compte le confort d’été.
- Faire baisser le carbone incorporé des logements rénovés.
- Couvrir la consommation résiduelle avec une production d’énergies renouvelables, sur site ou à proximité.
Elles s’appliqueraient différemment aux bâtiments à caractéristiques patrimoniales. Des objectifs spécifiques restent donc à définir pour ce bâti. De plus, ces propositions ne pourront aboutir sans l’accompagnement des pouvoirs publics.
De la STABILITÉ et un effort des pouvoirs publics
« Qu’il s’agisse des ménages, des entreprises du bâtiment, des diagnostiqueurs ou des accompagnateurs, tous partagent un point commun : les fluctuations récurrentes des politiques publiques de rénovation énergétique engendrent une incompréhension, une incertitude et un attentisme qui constituent tout autant de freins au déclenchement et à la réalisation des travaux », écrit le collectif.
Pour offrir de la visibilité et de la constance à tous les acteurs de la chaîne, il demande deux mesures. La première consiste à élaborer et à adopter une loi organique de planification pluriannuelle du budget de la rénovation énergétique performante des bâtiments. La seconde réside dans l’élaboration d’un plan de structuration de la filière de la rénovation performante.
Enfin, il est nécessaire de sécuriser et d’encourager les ménages dans leurs travaux. Pour y parvenir, les auteurs proposent diverses dispositions.
- Lutter contre la fraude avec une amende calculée selon le chiffre d’affaires.
- Promouvoir des outils pour garantir la performance énergétique des travaux de rénovation à toutes les phases.
- Poursuivre l’effort de financement public pour les ménages les plus modestes.
- Massifier la distribution de l’éco-PTZ en allongeant la durée de remboursement.
- Suivre la consommation réelle et l’efficacité énergétique post-travaux d’un échantillon aléatoire de rénovations réalisées chaque année.
Ce document a été élaboré par l’association Amorce, le réseau Cler, Dervyn Conseil, Dorémi, le collectif Effinergie, le Groupement du Mur Manteau, Knauf Insulation, l’association négaWatt, l’institut négaWatt et Rénovons. Plusieurs de ces structures pilotent également la journée contre la précarité énergétique.
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