L’IGF rend publique sa revue du dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE). Principal constat : « l’État ne dispose pas de moyens d’évaluation et de contrôle du dispositif suffisants pour garantir l’efficacité des politiques mises en œuvre ». L’IGF, le CGE et l’IGEED font 15 propositions. Beaucoup d’entre elles servent à lutter contre les fraudes.
Pourquoi une mission sur les CEE ?
Récemment, la Cour des comptes publiait une analyse critique du dispositif des CEE. La juridiction intervenait alors à la demande de la commission des Finances de l’Assemblée nationale. Cette fois-ci, le ministre de l’Économie, le ministre chargé des Comptes publics et la ministre de la Transition énergétique ont confié une mission à l’IGF (Inspection générale des finances), au CGE (Conseil général de l’économie) et à l’IGEED (Inspection générale de l’environnement et du développement durable).
Le rapport sur les CEE, daté de juillet 2024, a été rendu public la semaine dernière. En synthèse, la mission « estime qu’il n’est pas possible de répondre à la question, posée par les commanditaires, de son efficacité ». En revanche, elle dresse des axes de gouvernances pour pouvoir l’évaluer à l’avenir. Le rapport de 250 pages contient trois grandes parties :
- fonctionnement et caractéristiques à mi-parcours de la 5e période ;
- limites du pilotage du dispositif par la puissance publique ;
- recommandations pour renforcer la performance des CEE.
Les auteurs insistent sur la nécessité d’établir une stratégie claire et partagée, transmise au Parlement. Elle permettra d’atteindre enfin, lors de la 6ème période, la stabilité et la visibilité que tous les acteurs réclament.
améliorer la gestion du dispositif des cee
Actuellement, l’administration ne peut pas procéder à des vérifications efficaces. « Bien que l’ampleur des fraudes et malfaçons soit difficile à estimer, ces phénomènes réduisent de façon sûre les gains à attendre du dispositif et risquent, à terme, de le décrédibiliser ».
La mission invite l’État à définir clairement les objectifs qu’il poursuit. Elle propose aussi des pistes pour mieux gérer le dispositif, entre autres :
- disposer d’études de gisements ;
- acquérir une meilleure connaissance du parc bâtimentaire en croisant les données (DPE détenus par l’ADEME, travaux du CSTB…) ;
- améliorer la connaissance des économies d’énergie générées ;
- donner plus de moyens au PNCEE (Pôle national des CEE) ;
- finir de fusionner les dispositifs CEE et Anah en rénovation globale…
Certaines de ces propositions figuraient déjà dans le rapport de l’IGF paru en novembre 2023. En revanche, le document s’intéressait nettement moins aux moyens de lutter contre les fraudes à la rénovation énergétique.
PNCEE, MICAF Anah et fraudes à la rénovation
Concernant le PNCEE, il faudrait lui donner davantage de visibilité sur les procédures et les données des contrôles réglementaires. Cette évolution s’appuierait sur « une base de données commune de tous les rapports de contrôle menés par les organismes habilités COFRAC pour le compte des obligés ». Le Pôle pourrait ainsi mieux contrôler toutes les entreprises disposant d’une qualification RGE.
En général, les auteurs défendent la coopération entre administrations pour les fraudes massives ou organisées, au-delà des CEE. Elle pourrait s’incarner dans le groupe de travail de La MICAF (mission interministérielle de coordination anti-fraude). Par ailleurs, l’Anah (Agence nationale de l’habitat) avait apparemment évoqué un allègement des taux de contrôle pour les dossiers de rénovation globale… Ils s’y opposent.
En effet, « l’intervention d’un nouvel acteur, Mon Accompagnateur Rénov’, dit MAR, qui n’est pas une instance de contrôle mais d’accompagnement des ménages, et dont l’indépendance vis-à-vis des différentes parties prenantes aux chantiers devra être établie dossier par dossier, ne peut légitimer en soi un allègement des contrôles ». Le MAR pourrait donc être davantage surveillé au cours des prochains mois.
La mission recommande également de travailler sur les moyens de garantir l’indépendance et l’impartialité des acteurs de la chaîne de production des CEE. Cela englobe « les nouveaux MAR mais aussi les contrôleurs CEE habilités COFRAC, d’autant que ces acteurs peuvent disposer de liens capitalistiques avec d’autres intervenants sur des chantiers CEE ».
6ème période des CEE et incertitudes
Cet été, le Conseil d’Analyse économique recommandait de remplacer le dispositif des CEE en abondant le budget MaPrimeRénov’. Le CAE estimait qu’il n’avait pas « apporté la preuve de sa valeur ajoutée par rapport à un dispositif public de subventions ». Le 17 septembre 2024, la Cour des comptes renchérissait en critiquant son fonctionnement.
Le 24 septembre 2024, Colombus Consulting publiait un rapport jugeant les objectifs des pouvoirs publics, pour la 6ème période des CEE, « hors d’atteinte ». Le 17 octobre 2024, avec la publication de ce nouveau rapport, c’est la gouvernance des CEE qui est critiquée. L’avenir des certificats d’économies d’énergie devient donc très incertain.
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