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Philippe Le Tutour est diagnostiqueur immobilier depuis 2003. Toujours passionné par son métier, il revient sur ses débuts.
Pourquoi ce choix, en 2003, de devenir diagnostiqueur immobilier ?
J’occupais alors un poste d’encadrant dans les BTP. Deux accidents du travail successifs m’ont amené à réfléchir à une nouvelle orientation professionnelle.
Mon beau-père qui était notaire m’expliquait que pour les ventes immobilières, il fallait annexer des contrôles sur les bâtiments. Je me suis renseigné sur le sujet, j’ai aussi consulté un ami qui s’était déjà engagé sur cette voie deux ans avant. Cela m’a conforté dans l’idée de franchir le pas.
Une reconversion professionnelle qui est arrivée tôt. C’était un jeune métier à l’époque, comment vous êtes-vous formé ?
Au début, il n’y avait que le CESI qui dispensait les formations nécessaires. Je me suis donc formé à mes frais durant mes congés. Il n’y avait pas de prise en charge.
Puis j’ai démissionné pour partir à l’aventure.
Vous vous souvenez du coût de ces formations ?
Le coût était conséquent, environ 8.500 € pour le déplacement, l’hébergement et la formation. Mais c’était une vraie volonté.
Vous vous êtes vite rendu compte que ce métier était fait pour vous ?
Oui en effet, cela permettait d’allier curiosité rigueur et autonomie, avec un côté technique et juridique attractif, et la possibilité d’évoluer de façon indépendante.
C’était l’une de vos motivations pour exercer ce métier qui était en lien avec le bâtiment ?
Je m’étais toujours dit qu’un jour je volerais de mes propres ailes et cela a été l’élément déclencheur. Être indépendant : une ambition.
Donc vous avez créé votre cabinet et vous êtes resté indépendant ? Comment avez-vous évolué ? Vous travaillez seul ?
Je suis resté seul pendant 16 ans en suivant toutes les évolutions réglementaires. Pour le DPE, lorsqu’il est devenu obligatoire en novembre 2006, j’ai fait appel à un bureau d’étude thermique, comme cela se faisait dans certains pays européens. Puis j’ai appris à leur contact, jusqu’à passer la certification en 2007.
Aujourd’hui, il y a Clément, mon fils, certifié DPE. Il peut aussi réaliser des études thermiques mais il préfère numériser par scanner et drone des bâtiments. Puis il y a Grégory, notre BIM modeleur, pour la réalisation des maquettes 3D sous Revit ou Archicad, et les plans 2D pour cartographier l’amiante. Personnellement, je continue d’utiliser Autocad.
Quelle était votre mission préférée quand vous avez débuté ?
Au début, il n’y avait que la recherche d’amiante et la loi Carrez d’obligatoire au niveau national. La recherche de plomb (ERAP) et état parasitaire (termites) dépendaient d’arrêtés préfectoraux.
Ce qui est excitant dans ce métier, c’est d’investiguer et de découvrir tous les jours de nouvelles pathologies, notamment celles du bois.
Que pensez-vous justement de cet état parasitaire ? Ce ne serait pas judicieux de le rendre obligatoire ?
Il a été abandonné trop vite au profit du diagnostic termites.
Le législateur a séparé, sous pression des professionnels de la vente, la recherche de termites à la charge du propriétaire, et l’état parasitaire à la charge de l’acquéreur.
Rares sont les acheteurs qui sollicitent un état parasitaire.
Il y a des arrêtés mérule dans certains départements, et c’est une bonne chose.
Vous réalisez des DTG ?
J’ai eu réalisé des diagnostics techniques SRU pour mise en copropriété, mais je ne pratique pas les DTG de la loi ALUR.
Comment avez-vous vécu l’arrivée de formations et certifications ?
En 2006, il y avait les partisans de la certification d’entreprise. C’est l’entreprise qui était certifiée et pas les opérateurs de diagnostics.
À l’Unectpi, nous avons poussé pour que cela devienne une certification de personne, même si nous n’en voulions pas.
La disparité des niveaux des différents OC a ouvert les portes du discrédit.
Ce n’est pas la certification qui qualifie, mais les formations auxquelles vous vous astreignez pour évoluer.
Aucune valorisation des acquis au bout de 20 ans, obliger de repasser des examens comme les entrants… Je ne connais pas de profession à qui on impose cette humiliation .
Quatre cycles de recertification, ce n’est pas cela qui m’a rendu plus compétent et il a fallu que je débourse 40.000 € juste pour exercer. Je ne connais pas non plus de profession à qui on inflige cette punition.
Les certifications se multiplient et sont très coûteuses, notamment pour les jeunes qui s’installent
Le montant à débourser pour les entrants dans la profession est effectivement important, même si des prises en charge existent.
Les formations qui préparent à la certification telles qu’elles sont dispensées, notamment la partie pratique, sont très insuffisantes. J’ai pu m’en rendre compte lorsque mon fils a passé sa certification DPE.
L’empilage de règlementation et de norme pour chaque domaine, comme la prochaine pour le DPE, m’amène à croire que l’accès à la profession doit être entièrement repensé.
Justement, la profession pourrait-elle être mieux encadrée par la création d’un ordre ? C’est un sujet à l’étude en ce moment
En 2005 et 2006, nous avions noué des contacts avec le Conseil Supérieur du Notariat, des Procureurs de la République, et l’ordre des avocats pour justement pousser à la création d’un ordre. Les pouvoirs publics nous avaient opposé un véto. J’ai l’impression que l’on a perdu 20 ans.
La création d’un ordre, cela suppose un diplôme d’État dispensé par les Universités françaises. Puisque nous avons des missions de Santé Publique, nous sommes réglementés.
Il devrait s’obtenir par une licence professionnelle à BAC+3, effectuée en alternance dans un cabinet à partir d’un DUT ou BTS des métiers du bâtiment. Nos missions méritent d’être justement valorisées.
La suppression de la certification, la mise en place de quotas de formation annuelle, tout comme les architectes, et une surveillance interne comme les notaires, doivent permettre de mieux nous structurer.
Voilà une vision à long terme pour la reconnaissance ou la naissance d’une profession.
Beaucoup de jeunes se retrouvent un peu perdus après leurs formations, n’ayant jamais été en situation concrète. L’alternance pourrait pallier ce manque d’accompagnement ?
Parfaitement. Cela doit devenir le cadre d’entrée dans la profession. Avoir un tuteur pour tous les domaines. Et l’installation de façon indépendante devrait être préalablement soumise à cinq ans d’exercice en entreprise.
Un petit mot sur la géolocalisation dont a parlé Valérie Létard ?
Lorsque vous réalisez un DPE, vous collectez un certain nombre d’informations qui ne sont pas toujours disponibles in situ (facture d’isolation, changement de chaudière, de menuiseries…) et que l’on vous communique ultérieurement.
Lorsque vous vous déplacez chez un donneur d’ordre qui ne peut vous ouvrir qu’à partir de 17 h pour raison professionnelle, vous n’allez pas rester jusqu’à 21 h pour réaliser sur place votre DPE.
Plus globalement, que pensez-vous de la méthode de calcul du DPE ?
Il y a des améliorations à apporter. Je pratique la 3CL depuis le début (j’ai utilisé Perrenoud-Batidiag et maintenant Analysimmo). Sur des DPE réalisés en 2007-2008, lorsque que je suis sollicité pour les refaire, j’obtiens des résultats relativement proches, en corrigeant des linéaires de ponts thermiques, sur les quantités d’énergie finales. J’y vois une certaine fiabilité.
Vous avez débuté par un poste dans les BTP, vous êtes certifié pour l’avant-travaux ?
Je suis certifié DPE et amiante avec mention depuis que cela a été nécessaire. Je suis aussi titulaire de la SS4 et membre du réseau Démoldiag.
C’est un bon complément ?
C’est avant tout des missions plus techniques, plus complexes, donc mieux valorisées. En terme d’offre, cela nous permet de couvrir tout le cycle de vie des bâtiments, de l’étude thermique et ACV pour le dépôt de permis jusqu’à la démolition.
On peut parler tarif : globalement, pensez-vous que les tarifs appliqués aujourd’hui soient justes ?
Il y a une concurrence exacerbée qui tire les prix vers le bas sur les diagnostics vente et location. Il y a 20 ans, pour amiante-termite-plomb sur un corps de ferme, c’était de l’ordre de 700 € TTC.
Aujourd’hui, pour les mêmes diagnostics plus le DPE, l’électricité et le gaz, vous êtes à 500 € TTC.
Les obligations de certification, les contrôles, les formations, le ressourcing, les assurances pèsent lourdement.
La rémunération n’est pas au rendez-vous au regard des responsabilités.
Bonjour,
je suis entièrement d’accord avec Philippe Le Tutour, tous ses points relevés sont exacts, je suis dans le diagnostic depuis 2004 et j’ai les mêmes constatations, un ordre serait vraiment une réelle reconnaissance du métier. Je trouve aujourd’hui que les différentes fédérations ne sont pas assez agressives auprès des politiques et du coup nous ne pesons en aucun cas dans leurs décisions, nous ne sommes que leurs marionnettes ! Ils ne nous prennent pas au sérieux !
bonjour
je souhaite rebondir sur le tarif.
effectivement, qd on vout qu’un audit energetique se facture autour de 800 euros, le tarif du DDT complet devrait être du même ordre car entre la visite terrain et les rapports, le travail est largement aussi important. Certains continuent à brader leurs compétences et leurs qualifications.
Bonjour,
Il faut structurer le métier rapidement maintenant , ne pas laisser dégrader l’image du métier par des journalistes pas assez informer avec des reportages assassins.
il y a des mauvais et des bons comme partout et dans tout les métiers.
Déjà créer une police de l’immobilier avec des contrôles !
Tout à fait d’accord, les évolutions crées ne tiennent pas compte de l’investissement du diagnostiqueur soumis au dictat des OCR et de la DHU trop excessifs. Trop coûteux.
si c’est pour se retrouver avec un ordre type ordre des médecins corrompu avec de nouvelles charges pour nos sociétés.
ce n’est pas lordre qui changera quoique se soit mais la fin dun système global et corrompu avec des centres de certifications qui feront du controle et de la remise à niveau annuel
mais un ordre, c’est des postes bien rémunérés, des cotisations. alléchant pour les promoteurs de type de structure.
nous avons toujours demandé un formation continue annuel pour une montée en connaissance.