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La semaine dernière, nous apprenions la création de l’Organisation Nationale d’Éthique du Diagnostic Immobilier. Qu’est-ce qui fait la singularité de l’ONEDI ? À l’heure où plus rien ne va dans le métier de diagnostiqueur que prévoit-elle de faire, concrètement ? Son président, Patrick Gombaud, nous détaille les objectifs et les actions à venir de l’association.
Peut-on dire que l’éthique est le cheval de bataille de l’ONEDI, comme la certification est le cheval de bataille de l’association LDI ?
Notre cheval de bataille, c’est l’éthique et la qualité, mais pour atteindre un objectif : être au service de l’intérêt public, de l’intérêt général. En réalité, c’est le seul objectif que nous poursuivons, pour une raison simple. Nos diagnostics relèvent de la santé publique et environnementale. Si nous ne centrons pas l’action de notre organisation sur le fait de mettre l’information au service du public, nous nous trompons de mission.
C’est le fil rouge de l’ONEDI. Elle se met à disposition du public pour l’informer et lui faire connaître le diagnostic, ses tenants et aboutissants. Derrière, puisqu’il s’agit d’une mission de service public, il ne peut y avoir que de l’éthique et une recherche de qualité optimale. C’est le seul moyen d’y arriver. Si nous avions autre chose à vendre, ce serait une tromperie.
En quoi l’ONEDI se distingue de l’ANDI (Association Nationale du Diagnostic Immobilier), qui a aussi été créée récemment ?
Nous sommes centrés sur les diagnostiqueurs et leur mission d’intérêt général. On va rester focus sur les certifiés et leurs pratiques quotidiennes : l’exercice du métier, la rédaction d’un rapport, l’engagement de responsabilité… L’ANDI, d’après ce que j’ai compris, vise d’autres choses. Par exemple, elle s’intéresse à l’organisation et au pilotage d’entreprise, aux responsabilités du chef de cabinet. C’est parfaitement complémentaire. Il y a des points sur lesquels nous allons diverger, mais nous sommes d’accord sur l’essentiel en ce qui concerne l’exercice du métier.
Quelles sont les actions concrètes que vous allez mettre en place ?
C’est vaste. En voici quelques-unes, qui ne sont pas forcément dans l’ordre de priorité.
– La suppression du contrôle documentaire pour la certification DPE. Il n’a plus de raison d’être puisque le rapport est formaté de A à Z.
– L’assurance des diagnostiqueurs : mise en place d’un système bonus-malus.
– La création d’ateliers compétences : une fois par semaine, nous aborderons un sujet précis, animé par un référent ou quelqu’un d’expérimenté. Nous aborderons directement une problématique quotidienne ou des sujets beaucoup plus généralistes. L’un des premiers ateliers traitera de toutes les dimensions juridiques autour des diagnostics, parce que ce n’est jamais abordé en formation ni en certification. Les nouveaux certifiés se retrouvent plongés dans un environnement juridique auquel ils n’ont pas été préparés.
– La lutte contre la désinformation sur le diagnostic (DPE bashing, diag bashing).
– La question du tarif réglementé : nous allons lancer une réflexion dessus en constituant un groupe de travail.
– Le congé certifié et la prise en compte de l’antériorité de la certification. C’est l’un des sujets que nous allons traiter en priorité. Je m’explique. Quelqu’un est certifié sur tel ou tel domaine et doit avoir un contrôle sur ouvrage tel jour. Malheureusement, il a eu un accident de la route. Non seulement il ne peut pas être à son CSO, mais il n’a pas pu produire de diagnostics sur le mois précédent. Or le CSO se fait sur les diagnostics du mois précédent.
Il y a aussi le cas du congé maternité. Dans tous ces cas de figure, il doit y avoir un processus d’adaptation, autre que la perte ou la suspension de certification. Actuellement, le cadre est beaucoup trop strict.
Citons également la situation où le certificateur prévient beaucoup trop tard le certifié. Il lui annonce qu’il doit préparer sa recertification sous 48 heures. Faute d’être dans les délais, il y a une perte de certif’, plus le retour en certification initiale. Quoiqu’il arrive et quelles que soient les dates, nous demandons la prise en compte de l’antériorité de certification. Quelqu’un qui a été certifié pendant quelques années, disons au moins 3 ans, n’a pas à repasser en certification initiale.
– L’interdiction des plateformes de mise en relation. Des personnes qui n’ont aucune compétence dans ce domaine proposent et vendent du diagnostic. Nous avons d’ores et déjà préparé l’insertion d’un texte que nous soumettrons à nos parlementaires.
– Interroger le législateur sur la légitimité de détention du certificat. Aujourd’hui, le certificateur en est le détenteur et nous n’en sommes que les dépositaires. Cela remettra en cause la notion de transfert de certification. À défaut, s’il n’y a pas de possibilité de modification de cet ordre-là, nous demanderons la mise en cause systématique de l’organisme de certification lors de procédure judiciaire, en tant que détenteur du certificat.
– Le paiement des diagnostics lors des successions. Elles peuvent prendre jusqu’à 2-3 ans et donner lieu à des impayés. Nous pourrions soit faire inscrire dans la loi, soit obtenir de la Chambre nationale des notaires, un accord de principe sur le paiement à priori sur les fonds de la succession, sans forcément avoir à demander l’autorisation au bénéficiaire de la succession.
– La liste obligatoire des données pour les systèmes de chauffage en copropriété. C’est du ponctuel, mais c’est un point sur lequel nous pouvons agir. Aujourd’hui, il est inscrit dans la loi, de façon très vague, que le gestionnaire doit transmettre les données. Oui, mais lesquelles ? Ce n’est pas précisé et il faudrait que ça le soit.
Certaines de nos actions sont pratiques et pragmatiques au quotidien, avec une application pouvant être rapide. D’autres ne pourront se concrétiser qu’à moyen terme ou à très long terme. Enfin, il y aura des actions en continu, comme la lutte contre la désinformation.
Quels sont vos services pour le grand public ?
Outre une information sur tous les aspects du diagnostic immobilier, nous leur fournirons une assistance à la compréhension des diagnostics. Même lorsque le diagnostiqueur n’est pas disponible, un Comité d’Éthique est à leur écoute.
Nous leur proposons également une assistance impartiale à la résolution de litiges. Par exemple, la semaine dernière, une cliente d’un de nos adhérents nous fait savoir qu’elle n’est pas contente de son diagnostiqueur. Il a écrit, à propos de l’appartement qu’elle vient d’acheter, qu’il y a une pompe à chaleur et des radiateurs électriques. Or, il n’y a que la petite climatisation réversible qui fonctionne. Les radiateurs ne marchent pas.
C’est simplement l’application de la réglementation. Nous ne sommes pas là pour vérifier ce qui fonctionne ou pas. Mais pour elle, c’était de la publicité mensongère. Quelqu’un d’indépendant du diagnostiqueur, qui représente un Comité d’Éthique, lui explique que l’opérateur a parfaitement appliqué la réglementation. Il lui faut appeler un électricien pour rebrancher les radiateurs. Cela suffit à lui éviter d’aller devant la justice. Ce service apporte donc une meilleure compréhension pour le grand public et une tranquillité d’esprit pour le diagnostiqueur.
En tenant compte des missions pour le grand public et de celles pour les professionnels, le travail s’annonce colossal…
Exactement. Nous nous sommes donné un travail colossal, qui n’a jamais été fait par personne. L’information du grand public aurait dû être faite par les pouvoirs publics. Il y a encore des clients qui demandent s’ils doivent faire le chèque des diagnostics à l’ordre du Trésor public ! Nous allons avoir besoin de monde pour répondre à toute cette demande.
Et puis, nous allons devoir rentrer en contact avec des décideurs politiques, des parlementaires, le CESE qui devrait être notre interlocuteur privilégié… Je comprends les personnes qui se sont découragées par le passé. Il y a eu plusieurs tentatives d’associations de diagnostiqueurs, de création d’un ordre… Mais nous avons affaire à des gens attentistes. Il y a ceux qui considèrent qu’ils sont « clients » d’une fédération. Nous, ce n’est pas notre mentalité. Nous avons en commun cette mission, en plus de nos missions habituelles.
Vous avez parlé des tentatives passées, notamment au début des années 2010. La situation actuelle est-elle plus propice au changement ?
Je l’espère oui, parce que bizarrement notre métier est en danger. Il est en grand danger de disparition pour plusieurs raisons. Il y a des initiatives de lobbying, qui pourraient fondamentalement aboutir. On voit une dépossession de la profession, de ses missions initiales. Si on confie ces missions de diagnostics à d’autres ou qu’elles sont vidées de leur substance, le diagnostiqueur disparaîtra.
Nous espérons qu’il y aura une prise de conscience. Nous savons parfaitement que l’individualisme des indépendants et le peu d’intérêt pour l’évolution de la profession des salariés jouent contre nous. Ce n’est pas pour autant qu’il faut baisser les bras. Comme les autres, nous allons essayer, par notre discours et par nos actions.
L’ONEDI envisage-t-elle de travailler avec les fédérations ou le récent syndicat l’Alliance du Diagnostic Immobilier ?
Nous serons plus ou moins obligés de travailler avec ces organisations, puisqu’elles sont déjà inscrites dans le processus historique. En revanche, nous insisterons sur le fait qu’elles ne sont pas légitimes à parler au nom des diagnostiqueurs. Certaines de ces fédérations seraient légitimes si elles formaient, par exemple, un syndicat de vendeurs de franchises ou d’organismes de formations.
Elles font de partie de l’environnement du métier, sans représenter les diagnostiqueurs. Imaginez un syndicat de médecins représenté par un laboratoire ou un fabricant de matériel. Comment pourrait-il parler au nom des médecins ? Chez nous, il n’y a que des diagnostiqueurs certifiés et nous sommes donc les seuls à pouvoir parler en leur nom.
D’ailleurs, parmi vos adhérents, si ce n’est pas indiscret, il y a davantage d’indépendants, de salariés ou un peu de tout ?
Il y a un peu de tout et nous avons même eu quelques belles surprises. Je pense à l’appel d’une patronne d’un cabinet de diagnostics, très intéressée par la démarche. Elle-même n’est pas certifiée, mais elle a deux certifiés dans son entreprise. Elle a envoyé les bulletins d’inscription avec les chèques de ses deux salariés, avec leur accord évidemment. En fait, elle a compris que cette démarche d’éthique et de qualité ne pourrait avoir que des avantages pour elle en tant que cheffe d’entreprise.
Nous avons des diagnostiqueurs qui appartiennent à des réseaux franchisés. Il y a également des salariés qui nous ont demandé de rendre la liste des adhérents strictement confidentielle pour éviter tout conflit avec leur employeur. Sinon, les indépendants constituent, pour le moment, la majorité des adhérents. Je pense que c’est représentatif du métier.
Par ailleurs, beaucoup sont venus parce qu’ils sont mis en difficulté par leur clientèle, par la pression pouvant être exercée par certains prescripteurs, pas les réponses qu’ils aimeraient apporter et qu’ils n’ont pas, faute de formation adéquate… On les a pris pour des techniciens du bâtiment. Or notre métier est plus juridique que technique.
Vous avez une équipe de juristes, me semble-t-il ?
Oui, l’association s’appuie sur deux cabinets d’avocats. L’un est spécialiste en droit général, l’autre en droit immobilier. Nous commençons à avoir des sollicitations de certains organismes de formation qui souhaitent être associés à notre démarche. Tant mieux, c’est dans nos statuts, de faire appel à des intervenants extérieurs. Autant l’association ne comptera que des certifiés, autant nous ferons intervenir des juristes, des médecins, des professionnels du bâtiment, des éditeurs de logiciel, des assureurs… tous corps de métier qui tourne autour du diagnostic. Il faut aborder tous ces domaines.
Comment adhérer à l’ONEDI ?
Pour adhérer, on peut nous écrire à l’adresse , ou récupérer un bulletin d’adhésion sur notre page Facebook. Nous venons aussi de mettre en ligne notre site Internet sur lequel il est possible d’adhérer directement en ligne à l’ONEDI.
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