La décision de la Cour d’appel de Toulouse, la semaine dernière, révèle l’importance de la partie « recommandations » du DPE. En effet, le diagnostiqueur a été condamné à cause de l’absence de recommandations, laquelle a induit en erreur les acquéreurs. Cette affaire montre aussi les limites de la méthode de calcul basée sur les factures pour le bâti ancien.
DPE sur factures et logement ancien classé B
Le litige trouve son origine en décembre 2016, lors de la vente d’une maison d’habitation construite avant le 1er janvier 1948. Le diagnostiqueur se base sur les factures (la consommation d’énergie réelle) pour réaliser le DPE. En effet, c’était la réglementation applicable. Le logement obtient une classe B pour l’étiquette énergie et une classe A pour l’étiquette climat. Le niveau de performance énergétique est donc très bon, mais irréaliste. Les acquéreurs s’en aperçoivent rapidement, à cause des factures de chauffage anormalement élevées.
Ils sollicitent alors une expertise amiable. Faute de réussir à trouver un accord sur le montant de la réparation, ils saisissent le juge des référés. Ce dernier ordonne une expertise judiciaire. En avril 2022, le tribunal judiciaire de Montauban énonce que le diagnostiqueur a engagé sa responsabilité envers les acheteurs au titre du DPE erroné. Il le condamne, avec son assureur, en réparation de la perte de chance subie (7 560 €). L’affaire se retrouve devant la Cour d’appel de Toulouse, le 14 mai 2024.
Réglementation inadaptée ou faute du diagnostiqueur ?
Le diagnostiqueur a utilisé une méthode de calcul conforme à la réglementation prévue pour les bâtiments antérieurs à 1948. Cependant, la maison n’était occupée qu’une partie de l’année, car la venderesse résidait aussi au Mexique. De plus, elle n’habitait et ne chauffait que la zone côté nord. Forcément, ses consommations d’énergie étaient très basses, d’où cet excellent DPE. Par conséquent, l’opérateur considère que c’est la réglementation qui est mal faite. Lui, il s’est contenté de l’appliquer.
Pour l’expert, ce bâtiment médiéval, un immeuble classé, ne peut pas avoir une note B. « Un tel classement correspond à celui d’un appartement moderne parfaitement isolé ». D’ailleurs, à sa revente en 2020 et malgré la réalisation de travaux d’isolation, la maison obtient une étiquette E. Pour la cour, « en sa qualité de professionnel, elle [la société de diagnostics] ne pouvait ignorer l’incohérence existant entre les consommations réelles, telles qu’elles ressortent des factures […] et les caractéristiques du bâtiment. » Qu’aurait-elle dû faire dans un tel contexte ? Des recommandations !
conséquences de l’absence de recommandations
Le diagnostiqueur n’a pas fait mention de cette incohérence dans son rapport. Elle aurait dû apparaître dans la partie consacrée aux recommandations pour l’amélioration de la performance énergétique. « L’absence de recommandations a incontestablement induit en erreur les acquéreurs sur l’appréciation de la qualité énergétique du bien ». Ce faisant, la société a engagé sa responsabilité envers eux.
Les appelants évaluent leur préjudice au montant des travaux nécessaires à l’amélioration de la performance énergétique. Ils ont tort, puisque le DPE n’a alors qu’une visée informative. Leurs dépenses résultent d’abord des caractéristiques de l’immeuble, et non de la faute du diagnostiqueur. Finalement, la cour condamne le diagnostiqueur et sa compagnie d’assurance à payer 22 560 € en réparation de la perte de chance, et 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Enseignements de cette décision juridique
Cette décision ne relève pas de la Cour de cassation et elle a une portée très limitée. En fait, elle nous semble intéressante, car elle fait écho à des sujets actuels. D’une part, la question du retour à la méthode sur factures revient souvent dans les débats. Sa prise en compte de la consommation réelle la rendrait plus fiable que la méthode conventionnelle. On constate ici à quel point elle peut tromper les futurs occupants. Avec la méthode 3CL actuelle, cette maison n’aurait jamais pu avoir une note B.
D’autre part, l’opposabilité du DPE est théoriquement entrée en vigueur le 1er juillet 2021. Toutefois, la partie « recommandations » du rapport a toujours une valeur informative. Pour autant, il semble utile de rappeler que le diagnostiqueur immobilier engage aussi sa responsabilité sur ce volet. En l’occurrence, il est condamné « faute d’avoir accompli sa mission avec la diligence requise. »
Cour d’appel de Toulouse, RG n°22/0165, 14 mai 2024.
Si le bien n’était occupé qu’une partie de l’année, le diagnostiqueur avait alors deux solutions pour éviter tout litige :
-Soit, il laissait ce classement pleinement conscient que ce dernier ne reflète pas la typologie du bien.
-Soit, il ne prenait pas en compte ces relevés anormalement faible et laissait paraitre un DPE vierge.
Ensuite et le plus important, ces deux solutions doivent absolument être accompagnées d’un commentaire expliquant le résultat de l’une ou l’autre solution avec des recommandations adaptés.
enfin une jurisprudence qui remet de l’ordre dans cette cacophonie du DPE.
ce métier mériterait d’avoir un Référentiel niveau v au minimum.
au lieu d’avoir des formations de commerciaux tâcherons…
un jugement parfaitement rendu
juste retour des choses
me rassure dans ma politique deontologique
C’est marrant, aujourd’hui c’est l’inverse qui se produit avec la méthode 3CL certaines personnes me disent, votre DPE ne correspond pas à mes consommations réelles (surtout si c’est désavantageux). Bon quand même la méthode 3CL est bien plus cohérente avec la réalité, même si certains trouveront toujours à redire sur tout.
La faute est bien là. Mais comment les centres de formation ne sont elles pas plus rigoureuse.
J aime le qualificatif de Pascal » Commerciaux tâcherons »
cela est bien représentatif de bons nombres d’opérateurs dans notre métier.