Vincent Delaroche ouvre DIT·FORMATION, un centre de formation pratique pour les diagnostiqueurs immobiliers. Il nous explique pourquoi il a vendu son cabinet de diagnostics immobiliers pour se lancer dans ce projet. L’ancien diagnostiqueur nous en dit aussi plus sur le contenu des sessions de formation qui débuteront très prochainement.
QUEL A ÉTÉ VOTRE PARCOURS PROFESSIONNEL ?
Je fais partie des anciennes générations de diagnostiqueurs. J’ai été formé et certifié en 2008, année où j’ai créé ma société avec mon associé. Ensuite il est parti et j’ai continué tout seul. Puis, j’ai développé mon entreprise et embauché jusqu’à 6 salariés. J’ai été certifié en 2008, en 2013, en 2018 puis en 2023, donc j’ai réalisé beaucoup de diagnostics durant 16 ans.
J’ai aussi fait quelques interventions en formation et participé à des jurys d’examen pour l’OFIB (Organisme de Formation en Immobilier et Bâtiment). Dans le même temps, je faisais passer des entretiens d’embauche à des techniciens pour ma propre société.
POURQUOI OUVRIR UN CENTRE DE FORMATION PRATIQUE ?
J’ai relevé quelque chose de nouveau par rapport à ce que j’avais connu. Ce n’était pas une baisse de niveau ou de compétences, mais la formation semblait de plus en plus axée sur le passage des certifications. En quelque sorte, la formation servait à réussir l’examen plutôt qu’à devenir diagnostiqueur immobilier. Quand j’étais dans le jury pour l’examen du niveau V, autant la théorie se passait bien, autant côté pratique je constatais de grosses lacunes. À mon avis, la pandémie de Covid y a contribué.
Je l’ai vraiment ressenti, y compris pour mes techniciens. Je leur faisais systématiquement passer une semaine ou deux en immersion. Au fil des années, il leur fallait de plus en plus de semaines de terrain avant d’être prêts. De 2-3 semaines, on passait à 8-10 semaines. Ce n’est pas évident pour un employeur. C’est là que j’ai commencé à m’intéresser à la formation spécifique terrain. J’ai vu que cela n’existait pas ou peu.
Quand j’ai commencé à en parler autour de moi, je me suis aperçu qu’il y avait une forte demande. De mon côté, j’avais fait un petit peu le tour du diagnostic immobilier avec mon entreprise. J’avais besoin d’un nouveau challenge pour mon épanouissement personnel et professionnel. Alors, j’ai vendu mon activité de diagnostic immobilier pour transformer ma société en un centre de formation terrain.
EN QUOI EST-CE UN ÉPANOUISSEMENT ?
Auparavant, je faisais beaucoup de pédagogie auprès des notaires et des agences immobilières. On m’a toujours dit que j’étais très pédagogue. C’était une qualité appréciée par mes prescripteurs, alors je me suis d’abord dit : pourquoi pas ? J’aime partager. De plus, le métier de diagnostiqueur est un métier que j’aime énormément et qui a très mauvaise presse. Mais je pense que cette réputation s’explique notamment par un manque de communication sur les bonnes pratiques…
Les médias ont mis en avant les diagnostiqueurs qui ont de mauvaises pratiques et qui, malheureusement, existent toujours aujourd’hui. On devrait mettre plus en avant les personnes qui font bien leur travail. C’est toujours plus facile de parler de ce qui va mal. J’espère contribuer, à mon niveau, à donner une meilleure image du métier. Je ne cherche pas à remplacer les centres de formation certifiés. C’est un complément. Je veux que ceux qui ressentent le besoin de faire du terrain puissent venir dans mon centre.
DIT·FORMATION EXISTE DEPUIS COMBIEN DE TEMPS ?
J’ai vendu l’activité fin mars-début avril 2024. J’ai investi les tout premiers bureaux historiques de ma société. Je les avais gardés à titre personnel. J’ai fait faire des travaux de peinture, mis des équipements de bureau, etc. pour en faire un centre de formation. À côté, j’ai investi dans une maison-témoin pour emmener les stagiaires. Avoir une maison disponible pour faire les diagnostics, il n’y a rien de mieux.
Franchement, j’ai trouvé la maison qu’il fallait pour parler de toutes les petites astuces, des pièges à éviter et des subtilités. Elle sera idéale pour voir comment ils se débrouillent et partager mon expérience. Un tel projet se met en place lentement. Au fil des mois, j’ai préparé tout ce que je pouvais. Maintenant, on va pouvoir se lancer à fond. J’ai l’intention de démarrer les sessions de formation fin septembre-début octobre 2024. J’ai mes premiers contacts intéressés.
COMMENT SE DÉROULE UNE SESSION DE FORMATION PRATIQUE ?
Nous passerons la première journée dans une salle pour discuter. Chacun va se présenter, parce que j’ai besoin de connaître les gens pour m’adapter à leur personnalité. J’ai préparé des PowerPoint si besoin. Nous allons parler des surfaces, car il n’y a pas de certification loi Carrez ou loi Boutin. C’est un domaine sur lequel on ne s’attarde pas en formation.
J’expliquerai les différences entre toutes les surfaces que l’on retrouve dans le diagnostic immobilier. Nous aborderons aussi des aspects juridiques. Bref, cette première journée sert à tout mettre en place. Je leur présenterai la méthodologie avec laquelle je me sens à l’aise. Ils seront libres de l’adopter ou non, mais ils pourront voir une façon de travailler. Ensuite, pendant le reste de la semaine, nous irons sur le terrain faire des diagnostics ensemble.
Je prends un exemple en amiante. S’il y a du linoléum sur le sol, j’attirerai leur attention dessus. Nous n’avons pas le droit de l’arracher, ni de l’enlever. Par contre, dans le rapport, il faut noter qu’il n’a pas été possible de constater l’origine du sol du fait de la présence d’un revêtement du type linoléum, etc. Au moins, le jour où l’acquéreur prendra possession de la maison ou de l’appartement et qu’en faisant des travaux, il trouvera des dalles de sol amiantées, le diagnostiqueur sera couvert.
Ce sont des pièges dans lesquels on tombe souvent quand on débute. Nous avancerons donc tous ensemble dans la réalisation des diagnostics. Je veux qu’ils comprennent qu’avant tout, il faut être consciencieux, méticuleux, curieux et faire de l’investigation. Le dernier jour, je leur laisserai réaliser les diagnostics seuls, chacun de leur côté. Ils éditeront leurs rapports et leur DDT. Enfin, nous en discuterons pour voir ce qui a été retenu et ce qu’il faut éventuellement revoir.
J’AI LU QU’IL Y AVAIT UN PRÉREQUIS : ÊTRE CERTIFIÉ ?
Oui, car est-il vraiment intéressant de venir sans avoir suivi de formation initiale ? Je pense que non, parce que ça ne parlera pas aux stagiaires. Je pourrais accueillir des personnes en formation qui ne sont pas encore certifiées. Mais en général, les certifications se passent dans la foulée de la formation voire en même temps. Et puis sinon, ce serait une « formation découverte », or ce n’est pas mon objectif actuellement.
FUTURS DIAGNOSTIQUEURS ET DIAGNOSTIQUEURS EXPÉRIMENTÉS PARTAGERONT LA MËME EXPÉRIENCE TERRAIN ?
Mon idée première est qu’ils participent tous à la même session, dans un petit groupe de 8 personnes. J’ai eu quelques demandes de diagnostiqueurs expérimentés. Par exemple, l’un d’eux m’a dit : « je ne suis pas très serein sur le DPE, si je pouvais venir une semaine, ça m’intéresserait ». À ce jour, je ne vois pas l’intérêt de les séparer par niveau d’expérience ou autre. D’abord, nous verrons tous la même chose : la pratique des diagnostics. Ensuite, un diagnostiqueur expérimenté pourra apporter quelque chose de personnel et d’intéressant pour les autres : une anecdote, un point sensible… C’est bien qu’il puisse le partager avec un diagnostiqueur néo-certifié.
Actuellement, j’ai beaucoup de demandes de diagnostiqueurs en solo qui font leur première démarche d’embauche. Ils passent par France Travail (Pôle Emploi). Ils ont une aide s’il y a une promesse de première embauche, mais ils savent pertinemment que la formation ne suffira pas. Ces nouveaux employeurs me demandent donc d’accueillir leurs futurs techniciens, après la certification, pour une formation terrain. Je ne pensais pas qu’ils seraient les premiers à m’appeler. En même temps, je les comprends. Être un diagnostiqueur tout seul et gérer la formation à côté, c’est difficile.
DIT·FORMATION EST-IL CERTIFIÉ QUALIOPI ?
Au départ, je pensais être contacté principalement par un autre public. Il y a beaucoup de personnes qui se lancent dans le diagnostic avec l’intention de se mettre à leur compte. Au fur et à mesure de leur formation, elles se rendent compte que c’est compliqué et risqué. Elles se mettent à douter de leur capacité à se lancer seules. C’était ma première cible. Je prévoyais de les rassurer, avec une expérience terrain, pour les aider à se lancer sereinement.
Je voulais faire de l’accompagnement terrain, en complément des centres certifiés. Finalement, j’ai des demandes d’employeurs, donc je réalise qu’il faudrait penser à Qualiopi. C’est un axe sur lequel je vais travailler. Après, quand je leur dis que j’ai 16 ans d’expérience, un centre de formation équipé et une maison sur laquelle faire des diagnostics, ça les rassure.
VOUS ÊTES SEUL AUX COMMANDES, D’AUTRES FORMATEURS VOUS REJOINDRONT ?
Quand je fais quelque chose, c’est toujours dans l’optique d’aller le plus loin possible, mais ce n’est pas mon ambition première. J’ai fait des diagnostics pendant 15 ans, j’ai vu des choses bien, d’autres nettement moins. Comme beaucoup de boîtes, j’ai eu des litiges à cause de certains techniciens et il a fallu les régler. Outre la compétence technique, qui est hyper importante, il y a la gestion et le domaine juridique. J’aimerais préparer mes stagiaires à appréhender tous ces aspects qui peuvent être hyper stressants.
L’aspect juridique fait très peur. Il peut y avoir un technicien qui a été moins attentif tel jour, un propriétaire qui a caché quelque chose volontairement… Je veux apprendre à mes stagiaires à anticiper et à gérer ces situations. Je prévois aussi de leur parler des mentions à inclure dans les rapports de diagnostic pour se protéger. J’ai beaucoup d’anecdotes et d’expérience à partager sur tous ces domaines. Je propose vraiment de l’accompagnement.
On voit parfois des commentaires très négatifs qui viennent de gens qui ne connaissent pas du tout cette profession. Ils répètent ce qu’ils ont vu ou entendu. Nous travaillerons donc également sur la pédagogie, essentielle dans ce métier. J’espère aider mes stagiaires à la pratiquer, à donner une belle image d’eux et de leur société, au-delà du côté purement technique du diagnostic. Cependant, je ne me fixe pas de limites. Si demain, j’ai beaucoup de demandes, qu’il faut s’agrandir et embaucher des formateurs, je le ferai.
IL Y A ÉGALEMENT UNE FORMATION AUX logiciels…
Oui, l’idée est de les aider aussi à maîtriser leur logiciel, toujours dans cette optique de pratique terrain. Je travaille, depuis plusieurs années, avec un logiciel très répandu. Cela dit, si les diagnostiqueurs arrivent avec un autre logiciel, on trouvera des analogies et on s’adaptera. C’est la même trame, même lorsque l’interface est différente.
DIT·FORMATION SE SITUE DANS LA SARTHE, MAIS S’ADRESSE À TOUTE LA FRANCE ?
Oui, bien sûr. Il y a de quoi se loger à côté de mon centre de formation. Il y a des hôtels, des Airbnb, des maisons d’hôte, etc. Toutes les personnes qui souhaitent suivre cette formation sont les bienvenues, d’où qu’elles viennent.
Commentaires