Kévin Senvardar a 28 ans et un double emploi. Il est technicien de laboratoire en 2×8, et gérant de la société Immoflux Diagnostics. Portrait d’un diagnostiqueur motivé au parcours atypique.
ENFANCE AU CONTACT DU BÂTIMENT
J’ai côtoyé le secteur du bâtiment depuis mon plus jeune âge. Mon père était artisan plâtrier. J’étais souvent au chantier avec lui et je faisais parfois mes devoirs là. J’ai connu et aimé cette ambiance. J’ai fait un baccalauréat scientifique, et après j’ai hésité entre un DUT Génie Civil et un DUT Mesure Physique. J’ai finalement choisi les sciences.
ÉTUDES ET ENTRÉE DANS LA VIE ACTIVE
Après l’obtention de mon DUT Mesure Physique, j’ai fait une licence professionnelle en management de la mesure et du contrôle industriel, en alternance, dans un centre de recherche. Ma mission consistait à développer un système de mesure acoustique pour déterminer les taux de pollution dans les sols. Diplômé, j’ai intégré SERMA TECHNOLOGIES. Je faisais du contrôle qualité sur des composants électroniques destinés à l’aérospatial et au spatial.
TECHNICIEN DE LABORATOIRE EN 2X8
Ensuite, j’ai intégré la société Getrag Ford Transmissions (reprise par Magna International), à côté de l’usine Ford de Blanquefort, en tant que technicien de laboratoire. C’était il y a 8 ans et j’ai signé mon CDI au bout d’un an.
Je suis chargé du contrôle qualité, des retours usine et des retours clients. J’effectue des contrôles métallurgiques au sein d’une usine qui fabrique des boîtes de vitesse manuelles pour les véhicules Ford. Je travaille en 2×8 donc de 6h à 14h une semaine sur deux, et de 14h à 22h. Maintenant, je case mes diagnostics le matin ou l’après-midi.
L’IDÉE DU DIAGNOSTIC IMMOBILIER
L’idée du diagnostic immobilier m’est venue lorsque j’ai acheté ma maison. C’était il y a environ 3 ans. Il y avait des diagnostics. Au fond de moi, j’avais encore ces souvenirs d’enfance du chantier et cette envie de génie civil, mais aussi le goût pour les sciences. Le diagnostic, c’était un peu la combinaison parfaite du génie civil et de ma formation universitaire (le contrôle qualité).
ORIENTATION DANS UNE DOUBLE ACTIVITÉ
Je suis dans une position où j’aime mon métier de technicien de laboratoire. Je ne voulais pas le quitter sans savoir en quoi consistait le métier de diagnostiqueur. Il y a ce qu’on voit de l’extérieur et la pratique réelle. Je voulais être certain que ce métier allait correspondre à mes attentes, être sûr de mes choix. Le fait d’être en 2×8 constitue aussi un avantage par rapport à quelqu’un qui travaille de 8 ou 9 heures à 16-17 heures.
FORMATION EN PÉRIODE DE CRISE SANITAIRE
J’ai rempli mon dossier Fongecif pour le financement de ma formation à distance. J’ai reçu l’avis favorable du dossier et là il y a eu le Covid. Pour moi, c’était une opportunité incroyable, même si ça fait mal au cœur de parler d’opportunité alors qu’il y a eu une crise sanitaire. J’ai eu énormément de temps pour réviser les cours à distance et travailler sérieusement sur ma formation. J’ai fait beaucoup de recherches avec des résumés module par module, etc. J’ai préparé les certifications comme si c’était un concours universitaire.
PASSAGE DES CERTIFICATIONS
Ma formation a pris du temps entre le Covid, le confinement, etc. Et puis j’ai préféré découper mes certifications en deux modules par peur de survoler des éléments importants. Je me suis fixé des délais assez longs. Je ne dis pas ça de manière péjorative mais je m’attendais à ce que ce soit plus compliqué. Finalement, j’ai tout eu du premier coup, mais il s’est passé du temps entre mon inscription et la certification. C’est peut-être mieux car j’ai vraiment eu le temps d’approfondir la théorie. J’ai passé mes certifications à la sortie de la crise Covid.
FORMATION SUR LE TERRAIN
J’ai eu un appel de Virginie [Commercial à Arobiz] pour me proposer ses services. Je lui ai parlé de ma situation et du fait que je venais de passer les certifications. Elle m’a proposé d’appeler Edmond DA SILVA que vous avez interviewé. Déjà, pendant ma formation, un professionnel avait accepté de me prendre sur le terrain de temps en temps pour voir l’aspect pratique du métier. À distance et avec des diapos, c’était difficile de progresser sur l’aspect terrain.
LE GAP DE LA THÉORIE À LA PRATIQUE
Toute formation apporte une théorie et une pratique dans une certaine limite. C’est sur le terrain que l’on se fait vraiment la main car on ne peut pas voir tous les aspects du métier. Pour cela, il faudrait une formation sur 2 ou 3 ans… Edmond a accepté que je vienne avec lui. J’ai pu l’accompagner sur le terrain pendant un bon bout de temps. Grâce à lui, j’ai bien approfondi mes connaissances.
CRÉATION D’ENTREPRISE EN DOUBLE EMPLOI
J’ai lancé mon entreprise le 15 mai 2021. Je réalise mes diagnostics soit le matin, soit l’après-midi. Je travaille également le samedi car en semaine et en 2×8, je ne peux caser qu’un diagnostic par demi-journée. Alors, ça fait de très grosses journées, du 14-15 heures de travail en tout. Le dimanche, je rédige mes rapports. Je veux tout mettre en route soigneusement avant de quitter mon emploi de technicien de laboratoire. Mon but est de devenir diagnostiqueur à temps plein.
DÉVELOPPEMENT COMMERCIAL
Pour me faire connaître, j’ai participé à des apéro réseaux du groupe IAD France, et à des événements BNI. Je ne pouvais pas intégrer BNI à cause de mon emploi du temps. Les repas, etc. coïncidaient avec mes horaires de laboratoire donc j’ai opté pour de petites structures. J’ai consacré quelques demi-journées à démarcher des agences immobilières. Petit à petit, j’ai eu des notes positives sur Google Business alors des particuliers m’ont appelé. Avec le bouche-à-oreille, j’ai commencé à pouvoir remplir une semaine entière.
LANCEMENT D’ACTIVITÉ
Depuis environ 3 mois, mon activité s’est vraiment lancée mais je commence à voir les limites en termes d’organisation. Je débauche à 14h, je case un diagnostic à 15h le temps d’aller sur site, j’en ai pour 3 heures en moyenne, puis je rentre faire mon rapport. J’ai l’avantage d’avoir aussi le samedi pour programmer des diagnostics. Si je me mets à manquer de temps pour répondre à la demande, je risque de faire attendre ma clientèle, et ça peut nuire à mon activité.
DU SALARIAT À L’ENTREPRENEURIAT
Je me suis rendu compte que le salariat n’était pas forcément ce que je recherchais par rapport à mon caractère. Le diagnostic me permet d’avoir une triple casquette de technicien, commercial, directeur… Et puis on est récompensé par soi-même, à l’instant T, après avoir travaillé dur, consacré du temps à déployer son activité, etc.
Certaines personnes disent qu’être à son compte, c’est la liberté. En fait, il y a des contraintes dans tous les cas, salarié ou entrepreneur. Peut-être même qu’il y a plus de contraintes quand on gère son entreprise. On a énormément de tâches et quelle que soit l’heure, il faut les faire.
Être à son compte présente d’autres avantages. Voir grandir son bébé (sa propre société), sa clientèle, son chiffre d’affaires, sans être tributaire d’un certain process, c’est beau. Dans l’entrepreneuriat, il y a une liberté de décision qui est magique. C’est aussi comme ça que j’arrive à tenir le coup avec deux métiers. Il y a une grosse part de volonté.
LA PART UN PEU NÉGATIVE DU MÉTIER
L’aspect un peu négatif, c’est le prix déboursé pour les formations, remises à niveaux, nouvelles formations, PCR, etc. Quand j’explique qu’il faut se recertifier pour faire son métier, les gens sont souvent surpris. Je sais bien qu’il y a des évolutions de la réglementation, des techniques de constructions, etc. Je ne veux pas être trop critique car c’est très important, mais c’est un budget énorme. Moi, encore, je suis seul et à mon niveau, c’est déjà contraignant. Je n’ose pas imaginer ce que c’est pour un chef d’entreprise qui a des salariés à chapeauter.
PROJETS DE DÉVELOPPEMENT
Je me suis fixé l’échéance de janvier 2023, au plus tard, pour vraiment me consacrer au diagnostic à temps plein. Dans tous les cas, je laisserai passer les vacances d’été. Pour l’instant, je propose uniquement des diagnostics immobiliers avant location ou vente. Je prévois aussi de proposer le DPE avec mention. Pour tout ce qui est repérages avant travaux / démolition, j’ai une petite appréhension. Je pense qu’il faut étudier de nombreux aspects avant de se lancer.
À propos de l’audit énergétique, je crois que je vais attendre la « 2e vague », après avoir vu les retombées. J’ai vécu l’expérience du nouveau DPE. Je suis une petite entreprise, c’est encore tout frais, je ne vais donc pas me lancer tête baissée dans l’audit. Je ne sais pas si le fait d’attendre va me porter préjudice ou si j’en sortirai gagnant. Je suppose que c’est un coup de poker.
REMERCIEMENTS
Avec Edmond DA SILVA (EDS), Thibault et Aude de DGLM Expertises et Amaury qui est aussi à son compte, on forme un groupe de diagnostiqueurs. Nous échangeons très souvent. Quand je leur pose des questions, ils me répondent. C’est un métier où il est important d’avoir un support technique sur le terrain. S’il y a un souci, ils sont toujours disponibles et prêts à aider. Je voudrais donc profiter de cette occasion pour les remercier.
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