Le DPE était incontestablement erroné. Le diagnostiqueur a classé B un logement qui relevait de la classe E. D’ailleurs, ce n’est pas tout. Il s’est aussi trompé sur l’adresse du bien et sur le mode de chauffage. Même la date de réalisation du diagnostic de performance énergétique était fausse. Que s’est-il passé ? En ce qui concerne les erreurs matérielles (adresse et date), le mystère reste entier. Pour le système de chauffage et le classement, le vendeur a peut-être une part de responsabilité.
Compromis de vente à condition de réaliser des travaux
Mme G. achète une maison d’habitation en février 2012. Le compromis de vente intègre une condition suspensive. Le vendeur, M. W., doit réaliser différents travaux dont l’installation d’un système de chauffage. L’acquéreuse constate, entre autres désordres, un dysfonctionnement du système de chauffage. Après expertise judiciaire, M. W. est condamné, sur le fondement de la responsabilité décennale, à l’indemniser. Nous sommes en février 2016.
Ensuite, Mme G. s’aperçoit que le DPE annexé à l’acte de vente est erroné. Elle croyait acquérir un logement économe en énergie, classé B ; or le nouveau DPE réalisé lors de l’expertise affiche une classe E. En 2017, elle assigne le diagnostiqueur immobilier et l’étude notariale, laquelle aurait manqué à son devoir de conseil, devant le tribunal de grande instance de Dax.
Pompe à chaleur et DPE erroné
Le diagnostiqueur, M. X., s’est trompé sur l’adresse du bien et la date de sa réalisation du DPE. Mais surtout, à propos du chauffage, il a mentionné une pompe à chaleur alors qu’il s’agissait d’une climatisation réversible. Il évalue la consommation à 89 kw/m²/an (classe B). La consommation énergétique est en fait estimée à 263,9 kw/m²/an (classe E).
En fait, le vendeur s’était engagé, dans le compromis de vente, à installer une pompe à chaleur réversible avec VMC double flux. Mais il a finalement doté le bien d’une climatisation réversible, ce dont Mme G « aurait pu s’apercevoir si le diagnostic n’avait pas été erroné ». Forcément, le niveau de performance énergétique du logement n’est pas le même. À cette date, le DPE n’est pas encore opposable.
sur la Responsabilité du notaire
Le notaire a fait preuve de négligence car il aurait dû déceler les erreurs liées à l’adresse du bien et à la date du DPE. Toutefois, selon le compromis de vente, le vendeur devait fournir directement les documents associés à la pompe à chaleur (la facture et la garantie) à l’acheteuse, sans transiter par le notaire.
Mme G. ne lui a pas signalé qu’elle ne les avait pas reçus. Il ne pouvait donc pas savoir que l’estimation de la performance énergétique était faussée à ce point. L’adresse et la date n’ont aucune conséquence sur la performance énergétique. Par conséquent, pour le tribunal, sa faute n’est pas constituée. En revanche, le vendeur et le diagnostiqueur ont potentiellement contribué au même dommage. C’est ce qu’il convient de déterminer.
Condamnation du diagnostiqueur
En juillet 2020, le tribunal judiciaire de DAX condamne le M. X. à payer 15 000 € à titre de dommages et intérêts à l’acquéreuse. Il doit aussi communiquer ses attestations de responsabilité civile professionnelle pour les années 2011 et 2012, sous astreinte de 30 € par jour de retard au-delà d’un mois à partir de la signification du jugement et pendant 3 mois. Il est également condamné à verser 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, et aux dépens.
Selon le diagnostiqueur, Mme G. ne démontre pas qu’il aurait commis une faute lors de sa mission, et sa responsabilité ne peut résulter d’un rapport d’expertise non contradictoire*. Par ailleurs, le prix ayant été fixé entre les parties avant la réalisation du diagnostic litigieux, le préjudice lié à la perte de chance de négocier le prix ne serait pas établi. Il fait donc appel de la décision.
Réparation du préjudice subi par l’acquéreuse
Mme G., quant à elle, réclame la condamnation in solidum de la société de notaires et du diagnostiqueur. En réparation du préjudice qu’elle a subi, l’acheteuse demande 50 002,02 € à titre de dommages et intérêt. Cette somme inclut :
- Le coût des travaux pour l’isolation et le système de chauffage
- Les frais de surconsommation électrique durant 5 hivers
- Les frais de l’expertise judiciaire qui intègre le DPE
- Les frais de formalité pour la réalisation du DPE erroné facturé par le notaire
- Le préjudice moral et le préjudice de jouissance
- La perte de chance subie (impossibilité de négocier le prix de vente à la baisse)
Jugement de la cour d’appel de pau
La responsabilité du diagnostiqueur est de nature délictuelle. Le DPE n’a pas été effectué conformément aux normes édictées et aux règles de l’art. L’expertise judiciaire n’est pas l’unique élément de preuve. La cour commente : « la nature du chauffage, son sous-dimensionnement par rapport à la taille de l’habitation et l’absence d’isolation n’auraient pas dû échapper à un examen sérieux du diagnostiqueur ».
Cependant, le DPE n’ayant alors qu’un caractère informatif, le seul dommage subi réside dans la perte de chance de négocier la réduction du prix de vente. La cour condamne M. X. à payer à Mme G. 16 644 € à titre de dommages et intérêts. Cette condamnation est déclarée in solidum avec celle prononcée contre le vendeur, dans la limite de 16 644 €. Le diagnostiqueur est aussi condamné aux dépens, et au paiement de la somme de 2 000 € au titre des frais non répétibles exposés en appel.
* Cet argument a d’ailleurs déjà été utilisé dans une affaire de rapport technique amiante, sans être retenu non plus.
Cour d’appel de Pau, RG n°20/01695, 15 novembre 2022
Une climatisation réversible est une pompe à chaleur Air/Air !!!
Ce n’est pas l’opinion de la cour ni d’ailleurs du diagnostiqueur qui « ne conteste pas non plus avoir mentionné comme élément de chauffage une pompe à chaleur alors qu’il s’agissait, ainsi que l’a confirmé l’expert, d’une climatisation réversible ». C’est simplement ce qui est écrit dans le jugement rendu.
Autant d’écart pour une pompe à chaleur plutôt qu’un système de clim réversible ? J’y crois pas une seconde. La seule différence réside dans le fait qu’une PAC Air-Air est un système gainable, la clim réversible utilise un système de split. Du point de vue du fonctionnement et du rendement, c’est sensiblement la même chose….
À la lecture du jugement, j’ai l’impression que c’était l’opinion de l’expert dans le cadre de l’expertise judiciaire (selon lui, il y avait un tel écart à cause de l’erreur sur le mode de chauffage). Malheureusement, le DPE n’est pas fourni en annexe de la décision de la cour d’appel.
Ma réponse s’adresse à William
Votre description est erronée une Pac air air ou Clim réversible n’a en rien la différence que vous cite
Les deux peuvent être en gainable, split ou par console au niveau de l’émetteur
Quitte à donner un avis soyez sûr de votre affirmation afin de ne pas induire en erreur les autres lecteurs
Ce jugement est rempli d’erreurs et de non sens, en voici un exemple
« Le nouveau DPE réalisé dans le cadre de l’expertise fait état d’une consommation estimée de
263,9 kw/m2/an pour une classification en classe B, alors que le document établi par M. [X] [L] n’évalue cette consommation qu’à 89 kw/m2/an, conduisant à une classification en classe E. »
Maintenant ce n’est pas moi qui vais plaindre un ODI qui indique une isolation non présente et qui n’est pas capable d’amener les arguments techniques pour se défendre « Le premier juge a justement retenu que M. [Le diagnostiqueur] ne fournit pas d’explication argumentée sur le plan technique susceptible de remettre en cause le diagnostic réalisé dans le cadre de l’expertise et d’expliquer une telle différence d’estimations. »
Et autre fantaisie au moment du diagnostic la PAC n’était pas en place compte tenu « de
l’engagement qu’avait pris le vendeur dans le compromis de vente de doter le bien d’une pompe à chaleur réversible avec VMC double flux et non d’une climatisation réversible. »
Et en fin de compte j’aurais été curieux de connaitre l’expert qui affirmait qu’une clim réversible n’était pas une PAC pour qu’il me le prouve et également qu’il me montre comment entrer une climatisation réversible comme moyen de chauffage dans un DPE …
Pauvre justice, pauvre France ….
Une clim réversible est un type de pompe à chaleur. L’ODI a sans doute dû oublier de renseigner le volet climatisation du DPE et ne remplir que la partie chauffage.
Et je confirme que cette simple différence ne fait pas passer du B au E.
Je trouve toutefois incroyable que personne n’aie encore relevé que le DPE n’était tout simplement pas le bon, et qu’aucun des interlocuteurs sensés le vérifier (agent, notaire) n’aient vu leur responsabilité engagée.
Le diagnostiqueur devait tout simplement avoir fait appel à un avocat généraliste….un avocat d’assurance n’aurait jamais de la vie perdu ce procès
C’est pour çà qu’il faut pratiquer le DPE de manière très stricte, à savoir ne relever que ce qu’on constate, non ce que le client nous dit, et ne pas hésiter à laisser une mauvaise note parce que les critères choisis l’y amène, trop souvent, les pressions poussent à se laisser influencer…
Par contre, comme vous, je ne suis pas un spécialiste des clims mais mon DPE avec mention m’autorise à penser qu’une clim fonctionnant sur le même principe qu’une pompe à chaleur doit présenter à peu de chose près le même COP.
A coup sûr, la vente n’a pas été enregistrée avec le bon DPE, ou alors, il a été totalement bâclé, ce qui ne serait pas étonnant vu les observations fournies.
Une erreur d’adresse et de date, deux dossiers n’auraient-ils pas été intervertis par le diagnostiqueur ? À sa place, j’aurais vérifié le diagnostic réalisé à cette adresse et à cette date car il se pourrait bien qu’il soit également erroné.