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CGV/CGI : comment éviter des litiges couteux ?

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Maître Damien Jost, avocat spécialisé dans le domaine immobilier, insiste sur l’essentialité des CGV, des CGI et des rapports de mission. Il intervient depuis plus de 15 ans sur des litiges liés au diagnostic. Selon lui, avec de bonnes conditions générales de vente/conditions générales d’intervention, 2/3 des litiges pourraient être évités. Il vient donc de rédiger, à destination des diagnostiqueurs, les trames de CGV/CGI et les annotations à mettre dans les rapports.

Différents termes coexistent : CGV, CGI, CGE… CGI et CGE (exécution), c’est la même chose ?

Absolument. Pour ma part, j’applique mon critère de distinction entre ce qui relève de la vente, juridiquement parlant, et ce qui relève de l’exécution, que l’on appelle généralement l’intervention. Mais en pratique, il y a un mélange des concepts. Cette confusion est inefficace. D’où l’utilité de la démarche, qui m’a été proposée par Arobiz, de travailler sur des trames CGV/CGI plus lisibles du point de vue du consommateur.

Les CGV/CGI sont des informations précontractuelles, n’est-ce pas ?

Effectivement. Nous sommes dans ce registre juridique. Il s’agit d’abord d’expliquer au co-contractant – nommé ainsi dans les livres de droit – qu’il y a une relation contractuelle. Il n’en a pas toujours conscience. On lui explique comment va se passer la relation contractuelle, régie par les CGV. Ensuite, on affine les choses en lui parlant du contenu de la prestation « diagnostic immobilier ». C’est là que nous en arrivons au concept de CGI, c’est-à-dire à la façon dont se déroulera la prestation.

Quelle est la différence entre les CGI et l’ordre de mission (ODM) ?

La fonction n’est pas tout à fait la même. Souvent, les deux sont complémentaires. L’ODM, c’est ce que l’on appelle familièrement un « bon de commande ». C’est l’acte par lequel le client confirme sa commande. Idéalement, c’est avant que le client formalise sa demande qu’il faudrait porter à sa connaissance les CGV et les CGI. C’est le b.a.-ba du contrat. Il est important que le client qui passe commande au professionnel sache à quoi il s’engage, contractuellement mais pas seulement. Il doit savoir aussi comment va se passer la prestation qu’il est en train de commander.

Qu’est-ce que c’est, de bonnes CGV et de bonnes CGI ?

C’est, avant tout, quelque chose qui est à la portée du client. Le lecteur de niveau intermédiaire, sans être péjoratif, celui que l’on appelle un non-sachant ou un profane, va être à même de s’approprier l’esprit général de la relation contractuelle. Avec une lecture rapide et un tout petit effort d’attention, sans avoir besoin de sortir un dictionnaire, il doit comprendre le fonctionnement et les obligations.

Concrètement, de bonnes CGV commencent par rappeler au donneur d’ordre que lorsqu’on passe commande d’un diagnostic, ou prestation assimilée comme le mesurage loi Carrez, il y a contrat. Qui dit contrat, dit réciprocité des obligations. Le propriétaire ou son représentant a une obligation de bonne foi. Il doit être transparent avec le prestataire qu’il a choisi. C’est du donnant-donnant. Pour prendre un exemple banal, il doit lui révéler les informations apportées par d’anciens diagnostics : présence d’amiante, de parasites du bois…

Quel exemple de litige pourrait être évité avec de bonnes CGV ou CGI ?

Il y a une problématique que je rencontre très souvent dans les litiges. C’est un donneur d’ordre, propriétaire, qui sollicite le diagnostiqueur en vue d’une vente, généralement imminente, et qui va « oublier » une information. Par exemple, il va omettre de révéler qu’il a eu connaissance d’une infestation parasitaire ayant donné lieu à un traitement.

Quand litige il y aura et que moi, chargé de défendre le diagnostiqueur, je m’étonnerai de « l’amnésie » du client, celui-ci ou son avocat ne manquera pas de me dire : « attendez, vous ne pouvez pas inverser les responsabilités. La moindre des choses eût été que l’on pose la question. Le professionnel aurait dû interroger le propriétaire sur le passé du bien, lui demander s’il détenait un diagnostic dans un tiroir… Il ne l’a pas fait. Il n’en apporte pas la preuve à tout le moins. »

On arrive en effet très vite à cette notion de preuve écrite. C’est un peu pervers car dans l’immense majorité des cas, il n’y a même pas d’ordre de mission. Souvent, tout commence par un coup de téléphone, même si j’évoque le problème à longueur de formations. En parallèle de l’activité judiciaire, j’ai choisi d’être présent en amont du sinistre, dans les centres de formation ou sur le terrain dans des entreprises. Je rencontre régulièrement d’anciens donneurs d’ordre qui jouent les innocents au début du litige. Personne ne leur a posé de question ou, en tout cas, il n’y a pas de preuve des questions posées. Même si cela peut paraître naïf, il faut mettre l’accent sur cette transparence.

En prime, il y a un déficit criant, actuellement, dans les CGV telles que je peux les connaître. C’est pour cette raison que j’ai accepté la proposition de Jérôme Vergnolle. J’y ai vu l’opportunité de proposer au plus grand nombre d’entreprises de diagnostics, petites, moyennes ou grandes, des CGV qui mettront d’abord l’accent sur cette base contractuelle, à savoir la réciprocité et la bonne foi. Après, de bonnes CGV, ce sont aussi des CGV qui vont vulgariser ce qu’est le diagnostic.

Pourquoi cette vulgarisation du diagnostic est-elle aussi importante ?

Le diagnostic reste une prestation très méconnue, entourée de beaucoup de préjugés souvent défavorables. Nous avons tous en tête des images de télévision ou des propos négatifs, tenus par des journalistes, des avocats, ou même des membres de la profession parfois. Il y a aussi des problèmes assurantiels qui se posent.

Ce métier a une vingtaine d’années, c’est encore jeune. À mon avis, il commence à entrer dans la maturité parce qu’il a déjà les moyens de tirer un premier bilan de son activité. Et dans ce contexte, il y a peut-être une réelle opportunité. C’est le moment où chacun, dans la profession, peut prendre conscience qu’il est temps de recadrer les choses dans la relation avec le client. Pour les recadrer, il faut lui parler de contrats, d’obligations, de ce qu’est un diagnostic, du déroulement d’un diag…

Concrètement, j’arrive sur le terrain et j’ai une difficulté. Les locaux sont encombrés et certains endroits sont inaccessibles. Le donneur d’ordre refuse les prélèvements amiante parce que cela lui coûte trop cher. Etc. Il faut saisir l’opportunité de ce bilan historique pour que les CGV soient l’occasion d’exposer la situation à des néophytes. Le diagnostic se passe comme cela et pour qu’il se passe bien, voilà ce qu’il faudrait faire de chaque côté, et surtout du côté du donneur d’ordre.

Outre la question des litiges, CGV/CGI peuvent donner une meilleure image du diagnostiqueur ?

Exactement. Il y a une double entrée. On met en place des défenses pour le cas où il y aurait litige ou pépin, c’est le côté proactif, préventif. Et puis, il y a ce qui pourrait relever de la communication ou peut-être de la démythification. Nous cassons les idées reçues et les préjugés.

Autrefois, pendant plus de dix ans, j’ai accompagné et défendu les notaires dans leurs litiges. C’est d’ailleurs à cette occasion que j’ai vu arriver les diagnostics. Les notaires, comme d’autres professionnels de l’immobilier tels que les agents, ont une image qui n’est pas très positive des diagnostics. Certains affirment qu’un rapport de diagnostic est illisible par le notaire.

C’est un alibi car le notaire est mieux placé qu’un acheteur de base pour comprendre ce que veut dire un diagnostic. Ce n’est peut-être pas le cas du jeune collaborateur de notaire. En revanche, le patron sait décrypter et lire entre les lignes. Mais cet alibi, confortable, consiste à dire qu’un diagnostiqueur ne sait pas écrire clairement. C’est la tarte à la crème qu’on m’oppose à longueur de litige.

Dans ce contexte-là, il me semble important de construire des outils de travail – ordre de mission, CGV, CGI, rapports de diagnostics – qui permettent aux uns et aux autres, professionnels et non professionnels, de comprendre à quoi sert un diagnostic, en quoi c’est utile, quelle est la valeur ajoutée… Dans bien des cas, si le diagnostic avait été lu attentivement, le litige aurait été évité. Mais il aurait fallu prendre le temps de le lire attentivement.

En fait, dans toute la chaîne de l’immobilier, le diagnostic semble avoir été banalisé et vidé de sa substance. Aujourd’hui, on ne sait pas exactement à quoi ça sert. C’est obligatoire donc il faut y passer et les gens qui le font n’ont pas très bonne presse. Tout cela s’appuie sur des idées reçues et des lieux communs. Je pense donc que le préventif consiste aussi à faciliter la compréhension du sens du diagnostic et de son utilité.

Les diagnostiqueurs ne sont pas assez conscients de l’importance de l’écrit par rapport au terrain ?

Oui, effectivement. Dans l’immense majorité des cas, il y a d’abord un coup de téléphone et ces documents – les CGV, l’ordre de mission, etc. – sont réduits à une notion de « paperasse ». Il est peut-être temps de permettre aux diagnostiqueurs de reprendre la main sur le cadre technico-juridique de leurs prestations. C’est un axe essentiel.

Vous avez raison de souligner que dans la tête de certains diagnostiqueurs, l’essentiel c’est la phase terrain. Mais c’est une illusion totale. Devant le juge, tout va se jouer sur l’écrit.  Comme, dans la plupart des cas, il n’y a pas d’ODM, la qualité du contenu rédactionnel du rapport est décisive.

La maîtrise rédactionnelle est l’un des facteurs essentiels de sécurité juridique pour le diagnostiqueur. Beaucoup de formateurs de diagnostiqueurs ne semblent pas l’avoir compris. J’ai connu des diagnostiqueurs qui avaient une capacité rédactionnelle remarquable. Malheureusement, ce n’est pas la majorité. En général, ces personnes sont en reconversion. Elles arrivent avec un rédactionnel très technique voire technocratique.

Évidemment, personne ne leur demande de s’ériger en fine plume. Simplement, la sécurité juridique – pour l’avocat que je suis, la sécurité juridique désigne la sécurité professionnelle – va passer par une phrase claire, simple, aussi concise que possible. La clarté du message est beaucoup plus importante que l’hyper précision technique.

C’est également important pour les assurances ?

Bien sûr. Je suis issu du monde de l’assurance. Tout à l’heure, je disais avoir accompagné des notaires. En fait, j’étais juriste chez l’assureur des notaires. J’essaie, depuis des années, d’inciter et d’associer les assureurs à s’impliquer dans cet accompagnement juridico-rédactionnel. Je ne vois pas d’autre issue. Il y a quelques mois, nous avons vécu le retrait de MMA, l’assureur historique du secteur. C’est aussi l’assureur des notaires donc nous nous connaissons très bien. C’était le premier assureur à arriver sur le diag en 2002. Vingt ans après, ils ont dû arrêter à cause d’une perte financière excessive.

Heureusement, il y a encore de grands assureurs sur le secteur. Mais si nous souhaitons qu’ils y restent, il faut leur montrer que la profession a décidé de se prendre en main. C’est l’état d’esprit dans lequel j’ai abordé les différents travaux que m’a confié Jérôme Vergnolle. J’espère que toutes ces idées se retrouveront dans mes propositions rédactionnelles pour les CGV et les CGI.

Comme vous l’avez certainement compris, la société Arobiz a fait appel à Maître Damien Jost pour rédiger des CGV et des CGI destinées à ses Clients diagnostiqueurs immobiliers. Ces derniers peuvent désormais commander un pack CGV/CGI, personnalisé à l’image de leur société.

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3 Commentaires

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  1. B
    BENJAMIN 30 mars 2023 - 12h05

    Bonjour

    cette solution est génial! L’initiative aurait du etre prise par nos assurance, encore une fois Merci Jérôme de nous offrir des solutions pour pouvoir tenter de continuer à exercer sereinement notre métier de diagnostiqueur immobilier.

    Benjamin ODUL
    gérant créateur de Active Diag13 en région PACA

    Répondre
  2. L
    Las 4 avril 2023 - 18h33

    Bonjour et merci pour votre contenu toujours au top !
    Juste une petite rectification à vous indiquer en fin d’article

    Vous indiquez « tous les diagnostiqueurs immobiliers peuvent désormais commander un pack CGU/CGI », or lorsqu’on clique sur le lien, et que l’on sélectionne qu’on est pas client Arobiz, on nous indique que ce service est réservé aux clients (ce qui est dommage 😉 )

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    • Cécile, le moteur de Quotidiag 4 avril 2023 - 19h41

      Bonjour et merci à vous !

      À la phrase précédente, nous avions indiqué  » la société Arobiz a fait appel à Maître Damien Jost pour rédiger des CGV et des CGI destinées à ses Clients ». Pour nous, c’était donc sous-entendu mais effectivement, cela manquait de clarté.
      Veuillez nous en excuser. C’est désormais corrigé.

      Répondre

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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