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Burn-out des diagnostiqueurs : combien faudra-t-il de silences avant qu’on nous entende ?

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Rédigé par Smeralda Marzano, diagnostiqueuse certifiée (CasaDiag Expertises).

Je suis diagnostiqueur immobilier.

J’exerce un métier invisible mais essentiel. J’entre dans les logements, j’en analyse les murs, les installations, les matériaux, l’état général. Je cherche les risques, j’en mesure les conséquences. Je traduis la réalité du bâti en données, en constats, en décisions. Et ce que je ressens aujourd’hui, ce n’est plus simplement de la fatigue. C’est de l’usure. Une usure profonde, partagée. Un burn-out collectif qui ne dit pas son nom.

Un métier juridique, technique, administratif… et humain

Notre métier ne se limite pas à « passer faire un DPE ». Il est à la croisée de plusieurs mondes.
Nous sommes techniciens du bâtiment, capables de lire un logement en profondeur, de comprendre ses pathologies, ses failles, son histoire.
Nous sommes juristes, car chaque diagnostic est encadré par des textes, des arrêtés, des responsabilités, parfois même des contentieux.
Nous sommes secrétaires, gestionnaires, planificateurs : c’est nous qui traitons les appels, rédigeons les rapports, assurons la relation client.
Nous sommes commerciaux, car il faut faire vivre nos entreprises.
Et nous sommes, au quotidien, pédagogues : nous devons expliquer, rassurer, argumenter, justifier.
Ce millefeuille de compétences, nous l’assumons. Mais il faut bien comprendre que derrière ce métier, il y a des journées sans fin, une pression constante, des attentes souvent démesurées. Et aucune reconnaissance.

Des réformes précipitées, sans nous

La réforme du DPE a marqué un tournant. Un diagnostic devenu central dans les politiques publiques, sans que ceux qui le réalisent aient été réellement écoutés en amont.
Nous avons vécu des mises à jour à répétition, des guides contradictoires, des seuils modifiés dans la précipitation.
Nous avons dû expliquer aux clients ce que même les textes officiels peinaient à clarifier.
Nous avons fait avec. Encore. Mais à quel prix ?
Mais nous ne faisons pas que le DPE. Nous sommes un métier de sécurité : électricité, plomb, amiante, gaz. Ces diagnostics n’existent pas pour le grand public. Pour eux, nous sommes Monsieur ou Madame DPE. Et c’est tout.

Le mépris comme bruit de fond

Ce qui use le plus, ce n’est pas la charge. C’est l’indifférence.
Quand un guide contient des erreurs, nous le signalons : aucune réponse.
Quand nous proposons des pistes d’amélioration : pas d’écoute.
Quand nous tentons de défendre notre métier : on nous renvoie à notre devoir d’exécution.
Nous sommes les yeux du terrain. Les capteurs de la réalité.
Et pourtant, nous ne sommes considérés ni comme des acteurs de la rénovation, ni comme des interlocuteurs légitimes.

Tenir, mais jusqu’à quand ?

Aujourd’hui, beaucoup tiennent par habitude, par passion, par engagement.
Mais chaque jour, des diagnostiqueurs raccrochent. D’autres changent de voie. Certains s’isolent, se taisent, se replient.
Et cela ne fait qu’aggraver la situation. Car ce sont souvent les plus compétents, les plus aguerris, qui partent les premiers. Lassés de devoir tout absorber. Fatigués de devoir toujours justifier leur place.

Alors maintenant : commençons.

Commençons à nous faire respecter.

Nous ne demandons pas des privilèges.

Nous demandons du respect. Et de la considération.

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19 Commentaires

Commenter
  1. Y
    Yves 10 juillet 2025 - 12h30

    moi aussi je ressens un raz le bol dans un métier qui n apporte plys les satisfactions d il y a 15 ans. nos poluticiens font des lous des reglements acec passage par des ocr des surveillances des formations continues des contrôles sur ouvrages. des spécialistes gouvernementaux qui ont seul pouvoir de décision

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  2. P
    PATRICK 10 juillet 2025 - 12h31

    BRAVO

    Répondre
  3. F
    Francois 10 juillet 2025 - 12h35

    Merci!

    Répondre
  4. G
    GILLES 10 juillet 2025 - 12h40

    Bravo pour ton analyse très réaliste de ce que vis chacun de nous. A quand un grand mouvement des diagnostiqueurs pour se faire entendre ?
    Les syndicats sensés nous représenter ne nous défendent pas pour la plupart et ne sont bon qu’a prendre nos cotisations, c’est ahurissant de voir tel ou tel représentant dans des conférences en costar cravate expliqué ce que nous vivons, personnellement je les vomis. Je suis peu etre un peu dur mais c’est le ras le bol et le manque de considération qui me font réagir ainsi.
    Encore bravo pour cet article et merci a quotidiag de nous offrir cette page de dialogue

    Répondre
  5. J
    JEAN FRANCOIS 10 juillet 2025 - 12h53

    Je suis diagnostiqueur immobilier. Et franchement, aujourd’hui, je suis à bout.
    J’aime mon métier, je l’ai choisi par intérêt pour le bâtiment, par envie d’être utile, mais depuis quelque temps, je n’y trouve plus de sens, ni de sérénité.
    On gagne de moins en moins, et on paie de plus en plus : assurances en hausse, obligations en cascade, logiciels, mises à jour, contrôles, temps administratif… Pendant ce temps, les tarifs baissent, la concurrence s’intensifie, et les marges fondent.
    On nous en demande toujours plus, pour toujours moins.
    Et ce n’est pas juste une question de fatigue, c’est une forme d’épuisement, une pression constante, une perte de reconnaissance.
    Ce métier, c’est bien plus que « faire un DPE ».
    C’est technique, juridique, pédagogique, commercial… Il faut savoir tout faire.
    Et surtout, tout assumer, seul, avec le sourire.
    Mais ce que je ressens aujourd’hui, c’est que notre profession est dévalorisée, invisible, et essentiellement perçue comme une formalité administrative.
    Pourtant, nous jouons un rôle clé dans la sécurité des logements, dans la fiabilité des ventes, dans les décisions de rénovation énergétique.
    Alors oui, il faut le dire :
    Nous ne sommes pas juste des cases à cocher.
    Nous sommes des professionnels compétents, responsables, et investis.
    Et nous avons besoin d’écoute, de respect, et d’un cadre qui nous permette simplement de vivre de notre travail.

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    • C
      Christophe 10 juillet 2025 - 22h08

      Bien résumé…
      Gardez courage, la profession se mobilise, des gens se bougent aussi pour vous avec plein d’empathie et de bonnes volonté ..
      Soutien et force aux diagnosticoeurs !!

      Répondre
  6. H
    HOUSSINE 10 juillet 2025 - 14h29

    merci d’écrire pour nous
    Aucun corps de métier dans le bâtiment n’est aussi étouffé par le :
    JURIDIQUE DE LA POLITIQUE
    LA TECHNIQUE QUI CHANGE REGULIEREMENT PARFSOIS SANS COMPREHENSION
    NEGOCIAIATION DES PRIX PAR LES CLIENTS
    …….

    Mais le flame est toujours la malgré l’envie de craquer.

    Répondre
  7. Y
    Yann 10 juillet 2025 - 14h43

    Nous sommes 3 amis diagnostiqueurs. Dans 2 ans, c’est une nouvelle recertification. Et sur les 3 un jette l’éponge, le 2nd hésite plus que fortement c’est moi et le 3e continuera car malheureusement pour lui il n’a pas le choix….
    Tout cela en raison de l’incompétence crasse de nos ministres et des fonctionnaires en charge de notre profession.
    Est ce que je vous étonnerais si je vous dis qu’aux prochaines élections les 3, pourtant apolitiques, pensent unanimement qu’il est grand temps de mettre un énorme coup de pied dans la fourmilière ?!

    Répondre
  8. O
    Olivier 10 juillet 2025 - 15h29

    Le diagnostiqueur immobilier subit un harcèlement permanent et c’est une véritable vache à lait des OC, OF, franchises, syndicats, sans parler des passeurs de plat qui raclent les marges. Cela oblige de travailler comme un forcené pour payer les autres, parfois sans ce payer, Sans prendre de vacances !
    Si le système actuel ne fonctionne pas, il est temps de changer et de créer un ordre pour accompagner, sécuriser la carrière des personnes afin de réaliser de façon sereine ces missions d’utilité publique avec une tva à 5.5% et éviter de pondres des lois rustines tous les mois !

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  9. B
    Benoit 11 juillet 2025 - 13h18

    merci

    Répondre
  10. F
    Franck 11 juillet 2025 - 14h16

    bravo smeralda
    tout est dit
    je pense qu une petite pétition rédigée peut être par smeralda avec quotidiag et mise en ligne serai un indice pour leur faire comprendre notre ras le bol.
    la seule chose est qu il ne faut pas que cela soit récupéré par ces pseudo organisme qui ne représente qu eux[onedi sidiane ect…]
    bon courage moi j arrête après la fin de mes certifs….

    Répondre
  11. L
    Ludovic 11 juillet 2025 - 14h42

    Merci pour ce témoignage. Je fais ce métier depuis 4 ans et déjà je sature. Ma femme et mes enfants me font part de leur manque, pas assez présent et quand je suis là, je suis fatigué et irritable. devant les clients, toujours souriant et avenant, mais à quel prix ?
    Je ne sais pas combien de temps je vais tenir à ce rythme infernal, avec cette pression, cette épée de Damocles continuellement au-dessus de la tête.
    Pour le moment, je courbe l’echine et espère des lendemains meilleurs.

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    • F
      Frederic 11 juillet 2025 - 19h48

      hé oui ta raison
      moi ça fait 15 ans et j y ai laissé des plumes je pensais tenir jusqu’à la retraite
      mais vu la situation j y arriverai pas
      c est comme ça retour a la case départ

      Répondre
  12. P
    Pascal 11 juillet 2025 - 16h37

    Elle parle bien la « nouvelle » … 😉

    Répondre
  13. C
    Cathy 12 juillet 2025 - 18h29

    Tu as raison. Perso après 14 ans de diag j’ai fermé ma boite, épuisée. Je vous dis bravo d’y croire encore pour celles et ceux qui continuent. Perso je vous défends encore et m’énerve quand les gens ne comprennent pas votre métier vos tarifs etc…. Je me ferai votre avocate dorénavant. Courage!

    Répondre
  14. A
    Antoine 18 juillet 2025 - 17h15

    Merci pour cette analyse. Je partage complètement ce point de vue.

    Répondre
  15. T
    Thomas 22 juillet 2025 - 17h21

    Bravo Smeralda

    Répondre
  16. L
    Lambert 30 juillet 2025 - 12h37

    Le métier de diagnostiqueur immobilier est aujourd’hui l’un des plus surveillés, normés et constamment modifiés.
    Le DPE est devenu une véritable usine à gaz, stressante non seulement pour les diagnostiqueurs mais également pour les vendeurs, les acquéreurs, les agences, les notaires, les banques.
    Je consulte régulièrement des audits réalisés par des entreprises RGE. Ces audits tiennent en à peine six pages ! C’est sidérant de constater l’écart réglementaire entre ce que produit une entreprise RGE et ce que l’on exige d’un diagnostiqueur certifié. Certains de ces audits ne comportent même pas de numéro ADEME…

    Il est temps d’arrêter ce DPE tel qu’il est aujourd’hui. Il bloque les ventes et les locations, et doit cesser d’être juridiquement opposable. Il faut le rendre à nouveau simplement informatif.

    Les acquéreurs sont tellement stressés par le DPE qu’ils n’achètent plus un bien qui leur plaît vraiment : ils achètent une lettre.
    « Ce bien est en E ? Je n’achète pas. Celui-ci est en D ? D’accord, je l’achète. »
    Il faut stopper cette dérive du DPE.

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  17. S
    Stéphane 30 juillet 2025 - 15h00

    Bonjour et merci pour ce coup de projecteur sur notre profession.
    En effet, notre métier est très souvent montré du doigt, la masse de travail, les risques de se retrouver en justice, l’absence réelle de soutien, l’anarchie tarifaire (Imposition, certification, contrôle sur ouvrage payant bien sûr ect…), bref je n’envisage pas de faire cela longtemps et pourtant issu d’une famille de maçon, j’ai la passion du bati qui coule dans mes veines, et de plus guider les gens qui le demande pour améliorer leur bien me procure un sentiment d’utilité sociale.
    A bon entendeur…

    Répondre

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Article rédigé par auteurtribune,

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