Le diagnostiqueur n’a-t-il donc tant vécu que pour cette infamie ?
Au contraire, c’est une opportunité commerciale et un moyen pour la filière d’être enfin reconnue, affirment les représentants des fédérations. Bien entendu, mais tant d’interrogations subsistent encore malgré la mise en place officielle de cet audit énergétique réglementaire.
Le législateur met la charrue avant les bœufs
L’obligation de réaliser un audit énergétique à la vente d’une passoire thermique est prévue depuis la publication de la loi Climat Résilience d’août 2021. Le report de l’entrée en vigueur s’expliquait surtout, selon les pouvoirs publics, par le manque de professionnels formés. Pourtant, tout semble avoir été fait dans l’urgence et sans réelle anticipation des conséquences. La mise en ligne précipitée du guide général sur l’audit énergétique n’en est qu’un exemple anecdotique.
En réalité, le ministère de la Transition écologique ne donne pas l’impression d’avoir tiré des enseignements des précipitations passées. Lors du webinaire pour améliorer la qualité de réalisation du DPE ce matin, M. Olivier Klein a d’ailleurs déclaré : « tenir le calendrier, c’est la crédibilité de la parole publique qu’il ne faut pas entamer ».
Les diagnostiqueurs devront-ils rééditer des documents comme avec le nouveau DPE lancé en juillet 2021 ? Seront-ils encore obligés de porter la responsabilité d’une législation précipitée ? Vont-ils à nouveau subir les critiques des médias ? Il y a, hélas, plusieurs raisons de jouer les Cassandre en cette première semaine d’avril.
Tant d’inconnues : formation, logiciels, assurance pro, prix
Au cours des derniers mois, tous les diagnostiqueurs n’ont pas suivi la même formation à la réalisation de l’audit énergétique. Et pour cause, le référentiel de compétences, qui prévoit notamment une formation longue (10 jours), ne sera appliqué qu’en 2024. Ceux habilités à réaliser des audits énergétiques avant cette date sont-ils suffisamment préparés ?
Si oui, quid de l’outil nécessaire pour effectuer l’audit ? À ce jour, tous les éléments ne sont pas finalisés dans les logiciels. Outre les doutes quant à la fiabilité de la méthode DPE actuelle, nous sommes en phase transitoire de l’évaluation des logiciels jusqu’en juillet 2023. L’Ademe ne pourra pas enregistrer les numéros des audits dans sa base avant cet été.
En prime, d’un logiciel à l’autre, les méthodes pour chiffrer les travaux diffèrent. Or la question des travaux – recommandations et chiffrage – inquiète grandement les assureurs. Il suffit de les écouter pour constater que la couverture RC Pro est suspendue aux décisions des juges. En cas de sinistre ou de litige, le diagnostiqueur risque de se sentir très seul.
Enfin, des grilles tarifaires avec des prix bradés circulent déjà. Des sociétés profitent aussi de la confusion entre l’audit énergétique réglementaire et l’audit incitatif pour tenter d’arnaquer des particuliers. On rappelle que l’audit n’est pourtant en vigueur que depuis moins d’une semaine.
Assurer la fiabilité de l’audit avant sa mise en œuvre
Aucune sanction n’est prévue quand le propriétaire ne respecte pas l’obligation d’audit énergétique réglementaire. Est-ce rassurant ? Pas vraiment. Ce document pourra être exigé dès la première visite, et de toute façon, le notaire le réclamera. Par ailleurs, même si l’acquéreur n’est pas obligé de réaliser les travaux recommandés, la loi Climat Résilience va l’y inciter. Sinon, le bien ne pourra plus être loué.
« À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire », dit également le poète. Certes, mais les diagnostiqueurs en ont déjà trop subi, sans pour autant améliorer leur renommée. Très sincèrement, nous espérons que tout ira bien. Néanmoins, les inquiétudes de la profession sont justifiées. Il aurait été préférable d’attendre que tout soit en place – formation encadrée, logiciels finalisés, etc. – avant de lancer l’audit énergétique. Nous pourrions alors nous réjouir de cette opportunité.
La rédac’ de Quotidiag remercie Johan Naguy Pro de NJ DiaG pour le même à l’origine du visuel principal de l’article.
Je pense que du moment qu’il y a une guide .. c’est que l’on fait mauvaise route, cela signifie en effet que les textes ne sont pas clair (voir Amiante, DPE, audit) ….
Il aurait été si simple de rajouter simplement les 3 packs de l’audit avec leur objectif propre au DPE (en obligeant les éditeurs à implémenter toutes les reco possibles au passage !)
Toute nouvelle action ou proposition est aujourd’hui contestée, les critères législatifs, techniques, numériques, professionnels et autres resteront toujours un frein pour le bon développement d’un outil louable et essentiel à la sauvegarde de notre biosphère.
Il est tout simplement déplorable de constater que chaque fois qu’une idée lumineuse axée sur une cause légitime se concrétise, un groupuscule est constamment à l’affût pour pouvoir exploiter ce nouveau projet et dégager un profit matériel et financier au détriment d’une conscience professionnelle et d’un savoir faire exemplaires.
Concernant cet audit énergétique réglementaire, il aurait été beaucoup plus logique de l’intégrer systématiquement aux DPE classés F ou G sur l’étiquette énergétique, de ce fait le diagnostiqueur auditeur restait unique intervenant et surtout maîtrisait les données.
Merci pour vos articles toujours intéressants.