Le Cerema et Effinergie ont étudié les rénovations BBC dans le cadre du dispositif éco-énergie tertiaire (DEET). Permettent-elle d’atteindre les exigences du DEET ? Si oui, quels travaux réaliser ? À quel coût ? Pour quelles économies d’énergie ? Le document Rénovation BBC et exigences du dispositif éco énergie tertiaire ne se contente pas de répondre à ces questions. C’est un guide pour la rénovation énergétique des bâtiments tertiaires.
Réalisation de l’étude BBC/DEET
L’étude ne tient pas compte des projets engagés avec le nouveau label BBC Effinergie rénovation, applicable depuis le 1er janvier 2024. Elle repose surtout sur l’exploitation de la base de données de l’Observatoire BBC d’Effinergie. Cette dernière contient les rapports techniques (étude thermique) communiqués et validés par les organismes certificateurs, les régions et les directions régionales de l’ADEME.
Le seuil en valeur absolue correspond à l’arrêté du 13 avril 2022, alors en vigueur. Les surfaces coïncident avec la surface de référence du label BBC en rénovation. Enfin, de nombreux experts, issus du CSTB, de l’ADEME et de la DHUP ont contribué à l’élaboration de cette publication. « Elle apporte un éclairage sur ce parc [de bâtiments tertiaires] à l’échelle nationale, sans pour autant être représentative de l’ensemble des projets rénovés en France ».
Le DEET oblige les propriétaires et occupants de bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m² à réduire progressivement leurs consommations d’énergie ou à atteindre un objectif de consommation en valeur absolue. Il dépend de la catégorie d’activité, de l’implantation et de l’intensité d’usage. Depuis 2009, le label BBC-Effinergie a permis d’engager des rénovations performantes sur 4,6 Mm² dans le tertiaire.
Rénovations BBC et seuils du DEET
Dans l’échantillon étudié, les bâtiments avaient un classement énergétique avant travaux :
- E, F ou G : 48 % des bâtiments ;
- D : 38 % des bâtiments ;
- C : 14 % des bâtiments.
L’Observatoire BBC inclut les 5 usages réglementaires et exprime les consommations énergétiques en énergie primaire. Le DEET se réfère à l’énergie finale, tous usages confondus. Il a donc fallu recalculer les données de consommation pour les transposer d’un référentiel à l’autre. Après rénovation, les gains sur les 5 usages réglementaires sont similaires, malgré des niveaux de consommations énergétiques initiales différents.
Parmi les bureaux rénovés BBC, il y a 62 % de conformité à l’exigence en valeur relative, à l’horizon 2030. Ce taux de conformité descend à 38 % pour l’objectif relatif de 2040 et à 18 % pour celui de 2050. En revanche, 92 % des bâtiments d’enseignement rénovés sont conformes à l’exigence en valeur relative en 2030. Le taux passe à 85 % pour 2040 et à 64 % en 2050. « La consommation initiale du projet est le facteur clé déterminant le taux de conformité ».
Par ailleurs, il reste possible d’espérer une conformité plus élevée. En effet, les résultats ne prennent pas en considération toutes les actions pouvant être mises en place. Par exemple, avec une réduction de 20 % des consommations liées aux usages, le taux de conformité au DEET atteindrait 71 % en 2030 pour les bureaux rénovés BBC. Enfin, le taux de conformité des rénovations BBC atteint 97 % pour l’objectif de valeur absolue à l’horizon 2030.
Isolation de l’enveloppe : murs
Les maîtres d’ouvrage « se sont orientés quasi systématiquement vers des travaux portant à la fois sur l’enveloppe, les équipements CVC-ECS (chauffage, ventilation, climatisation, eau chaude sanitaire) et l’éclairage ». Autrement dit, ils ont entrepris une rénovation globale. Concernant l’enveloppe, les bâtiments soumis à une rénovation BBC Effinergie présentent certaines caractéristiques. Ils sont :
- anciens: 83 % construits avant 1982, 34 % d’avant 1948, 36 % entre 1948 et 1974 ;
- avec des parois peu ou pas du tout isolées ;
- majoritairement construits en béton (61 %) ou en pierre (23 %).
Il y a eu réalisation de travaux d’isolation des murs extérieurs sur 97 % des opérations. Les bâtiments construits en pierre ont été majoritairement isolés par l’intérieur (ITI). Les constructions en béton, briques ou parpaings ont eu droit à une part quasi égale d’ITI (40 %) et d’isolation par l’extérieur (44 % d’ITE). 15 % des façades ont bénéficié d’une double isolation (ITI et ITE). À propos des matériaux isolants, la laine minérale a été utilisée pour 71 % des murs, avant le plastique alvéolaire (21 %).
L’isolation à base de matériaux biosourcés s’est appliquée à 19 % des murs. Cependant, ce taux s’élève à 36 % pour les projets rénovés avec des dispositifs régionaux. En effet, les régions incitent les maîtres d’ouvrage à opter pour des matériaux biosourcés avec des aides financières. La résistance thermique après travaux oscillait entre 3,9 m²/K/W lors d’une ITI et 4,6 m².K/W avec une ITE. Sa performance atteignait 5,67 m².K/W en cumulant ITI et ITE.
Isolation : planchers bas, toitures, menuiseries
Dans 74 % des opérations analysées, il y a eu une isolation des planchers bas et une réduction des pertes thermiques. Dans 91 % des projets, la toiture a été isolée. En revanche, les résistances des combles et des rampants s’avéraient supérieures à celles des toitures-terrasses. Le plastique alvéolaire ou la laine minérale a été utilisée pour 87 % des toitures.
89 % des opérations comprenaient un remplacement des menuiseries extérieures, avec protections solaires mobiles dans 71 % des cas. Globalement, « la rénovation BBC n’impose pas de solutions dites « catalogue », mais préconise une analyse pertinente de l’état initial, afin d’apporter des solutions adaptées aux matériaux existants, sans générer pour autant de nouvelles pathologies. »
Systèmes : chauffage et refroidissement
L’installation ou la rénovation d’un générateur et/ou des émetteurs de chauffage concerne 95 % des opérations étudiées. Après rénovation, l’énergie de chauffage est :
- une solution thermodynamique : 36 % des bâtiments ;
- un réseau de chaleur urbain : 24 % ;
- le bois : 19 % de chauffage au bois
- le gaz : 18 % de chaudières à gaz.
Cependant, la répartition varie selon la localisation, la présence ou non d’une solution de refroidissement, l’énergie de chauffage avant travaux…
Système : ventilation, éclairage, électricité
L’installation ou le remplacement du système de ventilation a eu lieu dans 96 % des opérations. Dans 77 % des cas, le choix se porte sur un système de ventilation double-flux. Toutefois, l’usage du bâtiment joue un rôle déterminant. Les bureaux sont plus souvent équipés de ventilation double-flux que les bâtiments d’éducation
Dans tous les projets étudiés, des travaux de rénovation sur le poste « éclairage » ont été engagés. Il faisait généralement partie d’un bouquet de travaux, pour associer l’interrupteur avec un détecteur de présence (45 %), un gradateur et un détecteur de présence (39 %), un gradateur (9 %) ou une horloge (7 %). 13 % des bâtiments rénovés ont installé une production locale d’électricité. La production d’eau chaude sanitaire (ECS) n’étant pas prise en compte dans les calculs réglementaires pour les bureaux, elle n’a pas été analysée.
Performance des bâtiments après travaux
Les règles techniques du label BBC rénovation Effinergie n’intégraient pas de seuil d’étanchéité à l’air jusqu’en 2021. Néanmoins, les tests réalisés montrent une valeur moyenne de Q4PA_surf après travaux égale à 1,09 m3/(h.m²), « soit 35 % plus performant que les valeurs conventionnelles prises en compte dans la construction de tertiaire neuf ». C’est équivalent au niveau de performance exigé pour les logements collectifs soumis à la RE2020.
Les déperditions moyennes de l’enveloppe du bâtiment (Ubat) après travaux sont de 0,63 W/(m².K). Elles sont donc supérieures de 39 % à celles des maisons individuelles. En revanche, leur niveau est équivalent à celles des logements collectifs. La comparaison avant travaux/après travaux montre une amélioration de la qualité thermique de l’enveloppe.
La consommation énergétique réglementaire après travaux est en moyenne de 74,4 kWhep/m².an. La rénovation BBC permet de la réduire d’un facteur 4,4, ce qui équivaut à des économies d’énergie après travaux de 68 %. Enfin, 90 % des bâtiments rénovés ont des émissions de GES comprises entre 1 et 1,8 kgéqCO2/m²/an. Ce niveau d’émission varie évidemment selon l’énergie de chauffage utilisée avant et après travaux.
Montant des travaux et financement
Pour répondre aux exigences du DEET, il faut investir dans les travaux de rénovation énergétique à hauteur d’environ :
- 300 €/m² pour l’objectif 2030 ;
- 500 €/m² pour l’objectif 2040 ;
- 600 €/m² pour l’objectif 2050.
Bien entendu, il faut appréhender ces coûts en tenant compte des conséquences positives d’une rénovation globale. Le maître d’ouvrage peut ainsi réduire ses dépenses énergétiques, augmenter la valeur patrimoniale du bâtiment (valeur verte et valeur d’usage), améliorer la résilience du bâtiment aux éventuelles hausses des coûts de l’énergie, etc.
Pour la collectivité, cette rénovation apporte une réduction des émissions de GES, une montée en compétences, la création de nouveaux emplois, le développement de nouvelles filières économiques, l’amélioration du confort estival, acoustique et visuel…
Enfin, « Pour atteindre les exigences du DEET, la rénovation doit s’inscrire dans une stratégie patrimoniale à long terme et non plus opportuniste ». Elle doit notamment inclure un plan d’intervention pluriannuel avec un plan de financement adapté.
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