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Chère Valérie de Charente-Maritime, vous avez contacté Le 13H à vos côtés pour savoir comment être indemnisée après un DPE erroné. Par pitié, oubliez l’essentiel de ce que vous a dit Valentin Depret, dans le JT de TF1 Info. Presque tout était faux. Vous n’êtes pas Valérie ? Si vous êtes journaliste ou propriétaire d’un logement, cet article vous concerne aussi. Il vous évitera peut-être de dire ou de croire des âneries.
DPE erroné ou diagnostic électricité ?
Chers propriétaires, nous sommes navrés pour la désinformation que vous subissez à longueur de temps. Prenons l’exemple du JT de TF1 Info le 27 janvier 2025. Valérie explique que sa fille a acheté un appartement classé en DPE D. Ensuite, elles ont « pu faire une contre-expertise » et cette dernière mentionnait « la lettre F ainsi que des anomalies électriques ».
Déjà, quelque chose cloche. Le diagnostic de performance énergétique ne mentionne jamais les anomalies électriques. Ce n’est pas un état de l’installation intérieure d’électricité ou diagnostic électrique. Lors d’un DPE, le diagnostiqueur vérifie la présence des équipements, et non leur fonctionnement. Il y a donc un quiproquo dès le départ.
Valérie a peut-être eu deux diagnostics erronés dans son dossier de diagnostic technique (DDT) : un DPE et un diagnostic électricité. Comme beaucoup trop de propriétaires, elle croit sans doute détenir une DPE électrique.
curieuse obsession des anomalies électriques
Le journaliste connaît si bien le sujet que cette incohérence ne l’étonne pas du tout. Au contraire, il arrive à voir des anomalies électriques en comparant la première page du DPE en G et celle du DPE en D, affichées sur l’écran. « Dans le premier cas, aucune anomalie électrique, il y en a plusieurs dans le second », explique-t-il. Ah bon !? Mais où donc ?
Il persistera jusqu’à la fin de sa présentation. Ainsi, au moment de conseiller Valérie, il déclare : « Déjà, quand vous avez un doute sur le diagnostic, faites comme Valérie, réalisez un second DPE, c’est votre preuve qu’il y a eu une erreur, ici de nombreux dysfonctionnements électriques non signalés… » Mais enfin, quelle substance hallucinogène a-t-il absorbée ?
Mis à part ça, ce qui le choque le plus, c’est le montant estimé des travaux. Ben oui, Valentin, il y a plus de travaux coûteux à réaliser pour rénover une passoire thermique qu’un logement classé D ! Bref…
DPE erroné et montant de l’indemnisation
S’ensuivent diverses approximations, comme sa définition d’un vice caché. Non, cela ne signifie pas que le vendeur était au courant avant la vente et qu’il n’a rien dit. Un vice peut être caché pour le vendeur et pour l’acquéreur. Dans la situation dont vous parlez, nous sommes plutôt face à un dol. Passons, venons-en à l’indemnisation après un DPE erroné.
Dressez l’oreille, car à 2:18 de son intervention, notre journaliste dit quelque chose de vrai ! Le montant de l’indemnisation correspond généralement aux travaux nécessaires pour atteindre la lettre du DPE initialement annoncée (donc, en l’occurrence, pour passer de F à D). Malheureusement, dans la foulée, il rappelle qu’il faut « envoyer le devis de l’électricien ».
Recours en cas de DPE erroné
M. Depret vous indique ensuite la procédure à suivre pour contester un DPE et être indemnisé. Il vous conseille de poster une lettre en recommandé pour mettre en demeure le 1er diagnostiqueur et le vendeur. Dans votre courrier, vous demanderez une indemnisation. Ensuite normalement, la RC PRO se chargera de la compensation financière. Sinon, tout cela s’achèvera au tribunal sur la base d’un 3e DPE qui fera référence. Mais à en croire le 13H, rien ne sera possible sans le 2e DPE faisant office de preuve.
D’ailleurs, le présentateur insiste lourdement sur la nécessité de faire deux DPE, juste au cas où. « Une fois la promesse de vente signée, n’hésitez pas à réaliser au plus vite un 2e DPE avant la signature définitive. Cela vous évitera de vous retrouver face à de nombreux travaux imprévus ». D’une part, il y a quelques incohérences dans ce raisonnement. D’autre part, il existe des moyens moins procéduriers de résoudre un conflit.
Deux DPE avant la signature ?
D’abord, Valentin s’adresse à la personne qui achète le bien, celle qui aura des « travaux imprévus » à cause d’une erreur de classement. Or le plus à même de réaliser un second DPE avant la signature définitive, c’est le vendeur. Mais tant qu’à faire, plutôt que de réclamer plusieurs DPE, mieux vaut prendre des précautions pour éviter un classement erroné. Exemples :
- vérifier la certification du professionnel sur l’annuaire des diagnostiqueurs ;
- fournir un max d’informations à l’opérateur (voir Préparer mon DPE) ;
- se méfier des DPE express proposés à un prix anormalement bas ;
- contrôler la présence d’un numéro ADEME sur le rapport du DPE ;
- lire réellement le DPE fourni (en s’aidant de Comprendre mon DPE).
Ensuite, en cas de doute sur un diagnostic, la première étape consiste à contacter le diagnostiqueur. Nul besoin de le mettre en demeure pour lui poser des questions. Il est même joignable au téléphone. En discutant avec lui, vous vous apercevrez peut-être que vous avez confondu le DPE avec le diagnostic électrique…
Médiation et recours en justice
Puis, si l’incompréhension entre vous et lui persiste, vous avez le processus de médiation. Tout diagnostiqueur doit avoir un médiateur et afficher ses coordonnées. Il paye ce service pour permettre la résolution de litiges à l’amiable, sans frais pour vous. Cela n’empêche en rien la compensation financière lorsqu’un préjudice est avéré.
Enfin, il y a le recours en justice. A priori, vous pensez que votre DPE est faux parce que vous avez constaté quelque chose d’anormal. Le DPE est opposable, donc contestable. Vous pouvez faire réaliser un contre-DPE pour prouver vos dires, mais ce n’est pas une obligation légale. Le juge ordonnera une expertise qui fera effectivement référence. Elle peut impliquer les autres acteurs de la transaction.
Pour en revenir au JT, il y a un triste constat à en tirer. La mention d’anomalies électriques à propos d’un DPE est absurde pour tout opérateur de diagnostic immobilier. Cependant, un journaliste peut baser son argumentaire sur cette erreur, à une heure de grande écoute, sans choquer personne (à part l’ODI). En effet, ceux qui parlent le plus du DPE, et dont la parole porte loin, ne sont hélas pas ceux qui maîtrisent le mieux le sujet.
EDIT au 04/02/2025 : Le journaliste m’a contactée pour s’excuser de son erreur. Je pense que d’une certaine manière, il présentait ses excuses à la filière. Des coupures ont été faites dans la vidéo pour supprimer les passages les plus problématiques.
😃 c’est peut être parce que son immeuble datait d’avant 97 et que du coup c’était un DPE amiante … 😛
Toutes les hypothèses sont envisageables, même celle-ci, quand il n’y a que des DPE et rien que des DPE…
Voir même avant 1949, donc un diag plomb DPisé 🙂
Excellent travail de Cécile.
Merci pour nous.
❤️
Magnifique article Cécile, mais malheureusement ce n’est pas le première fois que ce type de journaliste sois-disant d’investigation aborde de manière plus que légère notre métier… Le fait de maîtriser ce sujet nous permet de nous rendre compte a quel point l’information est traité avec approximation de nos jours, ce reportage de TF1 manque cruellement de professionnalisme et à été visiblement ou volontairement (on peu aussi se poser la question) bâclé… De quoi remettre en perspective ce que l’on pourrait apprendre des sujets que l’on ne connait pas… Visiblement le service journalisme de TF1 connait lui aussi une grosse baisse de compétence…
Merci ! Parfois, voire souvent, j’ai l’impression que c’est la quête de sensationnalisme qui explique les erreurs et approximations. Mais en l’occurrence, je ne vois pas en quoi le fait d’intégrer les anomalies électriques au DPE génèrerait des vues ou des clics. C’est simplement du travail bâclé. Il faut dire que quand la majorité des téléspectateurs n’y connaît rien, tout peut passer. Effectivement, constater de telles erreurs nous fait douter de la qualité des informations délivrées sur d’autres sujets, que nous maîtrisons moins.
Merci pour l’article, je ne savais pas que l’on pouvait contester un DPE !
Bonjour Cécile,
Ne serait-il pas judicieux de se rapprocher de ces dits journalistes et de leur proposer une formation à notre métier, qu’ils puissent parler le même langage que nous ?
En tant que journalistes, vous pouvez leur apporter votre aide à la compréhension du métier…
En-tout-cas merci à vous.
Bonjour Patrick
Vous me flattez. Mais il faudrait qu’ils acceptent de se remettre en question et de se former à ce métier. En outre, m’informer et continuer à me former moi-même me prend déjà un temps considérable. Je pense surtout qu’il faudrait une vaste campagne de communication pour améliorer la compréhension de tous, du grand public jusqu’à la presse généraliste…
Bonjour, J’avais également réagi en envoyant à TF1 un mail resté sans réponse.
J’ai failli m’étrangler en écoutant le reportage
Bonjour,
Je ne pense pas que TF1 prenne la peine de réagir à cet article non plus, mais dans le cas contraire, nous vous en informerons. Oui, il y a de quoi s’étrangler…
J’ai abandonné depuis longtemps l’idée d’exercer un métier compris par les gens.
J’entame dès cette année des démarches pour sortir de cette gabégie.
MERCI
Il est surtout malheureux de constater l’indifférence et l’absence de réaction totale de ces fédérations sensées nous représenter.
Votre article démontre encore une fois la nullité des journalistes et médias, toutefois il faut souligner le mea-culpa du journaliste, trop rare.
J’espère que vous l’avez recadré sur ce qui était faux et proposé de l’accompagner pour les aider à communiquer sur notre sujet, au pire en le renvoyant vers ONEDI !
perso, je ne rechigne pas à ce qu’ils expliquent les voies de recours ou procédures à suivre pour faire valoir ses droits, ne serait-ce que parce que nombre de nos concitoyens ne le savent pas, et c’est cette notion qui sensibiliserait le public sur l’intérêt du choix de la qualité, que ce n’est pas une énième taxe déguisée, ce qui nous rendrait la vie bien meilleure grâce à des clients concernés et investis, qui nous choisiront plus souvent sur notre réputation plutôt que simplement le plus bas prix, favorisant ainsi uniquement ceux qui bâclent dont la certification n’est jamais suspendus.
Si le journaliste me lit, je serais très heureux de pouvoir le renseigner s’il le souhaite.
Lorsqu’il a reçu le DDT envoyé par la téléspectatrice, le diagnostic électrique était juste derrière le DPE et il a cru que c’était le même document. Nous avons passé un petit moment à discuter des différents points abordés dans l’article
Il m’a demandé si, à l’avenir, il pouvait me contacter en cas de sujets liés au DPE ou à d’autres diagnostics immobiliers pour éviter de commettre à nouveau des erreurs. Bien entendu, j’ai accepté très volontiers.
Sa réaction est vraiment à saluer. Ce n’est pas la première fois que nous poussons des coups de gueule suite à des reportages télé, articles de presse, etc. qui diffusent des intox. En revanche, c’est la première fois qu’un intéressé prend la peine de faire un mea culpa et montre une volonté d’améliorer ses connaissances sur ces sujets.
Excellent. Le fait que le journaliste rappelle la « sapiteuse » Cécile montre une réelle avancée qui peut-être va inciter les journalistes à s’appuyer sur Quotidiag pour leurs reportages ? Bravo 👍.