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18 ans après la loi Handicap, quid de l’accessibilité ERP ?

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La loi Handicap vient de fêter ses 18 ans. A-t-elle permis de rendre les ERP accessibles à tous les types de handicap ? Non, l’accessibilité universelle est loin d’avoir été atteinte. Or le dispositif des agendas d’accessibilité programmée (Ad’Ap) touche à sa fin. Il faudra attendre la prochaine Conférence nationale du handicap, au printemps 2023, pour découvrir la feuille de route handicap du 2e quinquennat. Mais selon nombre d’associations, il est surtout temps d’infliger des sanctions.

Loi Handicap et Ad’Ap

La loi n°2005-102 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, n’a pas atteint son objectif, à savoir 100% d’ERP accessibles en 2015. Pour aider les propriétaires, les bailleurs et les gestionnaires d’ERP, l’État avait mis en place, dès janvier 2015, les Ad’Ap. Ces agendas d’accessibilité programmée devaient permettre de planifier les travaux.

Depuis le 31 mars 2019, le dépôt d’Ad’AP n’est plus possible. Le délai d’exécution d’un Ad’AP est censé être de 3 ans, 6 ans pour les cas particuliers, voire 9 ans pour les patrimoines complexes. La fin complète du dispositif est annoncée pour 2024 au plus tard. Or, d’après les chiffres du Comité interministériel du handicap, seuls 56% des ERP seraient accessibles ou entrés dans une démarche d’accessibilité. Cette nuance, entre accessibilité et démarche d’accessibilité, est importante.

En effet, entrer dans la démarche consiste parfois à déposer un dossier, sans mettre en œuvre les travaux. Les ERP dit « conformes » incluent également ceux qui ont obtenu une dérogation d’accessibilité. En bref, sur les 2 millions d’ERP recensés en France, rares sont les établissements réellement accessibles à tous les types de handicap. Pendant ce temps, les associations qui œuvrent pour les personnes en situation de handicap s’impatientent.

Le diagnostic accessibilité est-il obligatoire ?

Le décret n°2006-555 du 17 mai 2006 oblige à réaliser un diagnostic des conditions d’accessibilité avant :

  • Le 1er janvier 2010 : ERP des catégories 1 et 2, ERP des catégories 3 et 4 appartenant à l’État, à ses établissements publics, ou dont l’État assure la charge de propriété ;
  • 1er janvier 2011 : ERP de 3e et 4e catégories autres que ceux indiqués ci-dessus.

Cependant, la réalisation d’un diagnostic ou, à défaut, d’un auto-diagnostic reste conseillée. En revanche, attention au démarchage abusif, synonyme d’arnaque. Quand il est bien réalisé, le diagnostic accessibilité permet d’identifier les travaux de mise en accessibilité de l’ERP. Les propriétaires d’ERP peuvent notamment faire appel à ces professionnels :

  • Diagnostiqueurs formés au diagnostic d’accessibilité ERP ;
  • Professionnels qualifiés OPQIBI 1908 « ingénierie relative à l’accessibilité des bâtiments et espaces publics au regard des personnes en situation de handicap » ;
  • Architectes, notamment parmi le réseau d’experts ADIA ;
  • Bureaux d’études et conseils en accessibilité (fédérations AFPAPH, CINOV, Syntech) ;
  • Conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE)…
Pistes pour améliorer l’accessibilité des ERP

Carole Guéchi, déléguée ministérielle à l’Accessibilité (DMA) au ministère de la Transition écologique, a récemment lancé : « le gouvernement est à deux doigts de faire du name and shame ».* Cette pratique consiste à exposer publiquement une entreprise ou un individu pour ses mauvais agissements. Les bâtiments et sites des pouvoirs publics ne sont pourtant pas exemplaires non plus. Parmi les bâtiments de l’État, 60% seraient non conformes.

En tout cas, il est hors de question, pour le Gouvernement, de renouveler le dispositif des Ad’Ap. À la place, des groupes de travail ont été mis en place dans chaque ministère. Tous les domaines où l’accessibilité doit s’appliquer sont étudiés, au-delà du cadre bâti. Ce travail collaboratif débouchera sur une liste de propositions soumises au président de la République. Ce dernier présentera sa feuille de route lors de la Conférence nationale du handicap, vraisemblablement en avril 2023.

L’une des pistes consiste à appliquer des sanctions fortes. Certaines sont prévues dans la loi du 11 février 2005 et dans l’ordonnance n°2014-1090 du 26 septembre 2014, mais elles n’ont jamais été mises en œuvre. De plus, des associations veulent les durcir, par exemple en interdisant l’ouverture d’un ERP non conforme. Les collectivités ont quant à elles suggéré de créer un fonds pour l’accessibilité. Cependant, des aides accompagnaient déjà les Ad’Ap à leur lancement, avec le succès que l’on connaît désormais. Et puis bien entendu, il faut aussi former, informer et sensibiliser.

Formation, information et sensibilisation

Dès 2014, le Gouvernement prévoyait de déployer des ambassadeurs de l’accessibilité. La secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, avait relancé le dispositif en 2021. 10000 jeunes volontaires, en Service Civique, devaient être envoyés sur le terrain avant fin 2022. Il y a finalement eu une cinquantaine d’ambassadeurs pour tout le territoire**.

Pourtant, la pédagogie pourrait effectivement être un vecteur d’action. Des maîtres d’ouvrage aux gestionnaires d’ERP, la question de l’accessibilité reste mal comprise. Nous sommes tous susceptibles d’avoir un handicap un jour, ne serait-ce qu’en vieillissant. Or les règles d’accessibilité sont encore souvent perçues comme des contraintes qui ne concerneraient qu’une petite partie de la population. La situation semble toutefois s’accélérer en ce début d’année.

Les premiers sous-préfets référents handicap-inclusion viennent d’être nommés. Ils devront notamment réunir régulièrement les services territoriaux de l’État et les collectivités pour favoriser la mise en œuvre des Ad’Ap des ERP. Par ailleurs, Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée aux personnes handicapées, a récemment déclaré : « lorsqu’il y a une volonté manifeste de ne pas avancer, il doit y avoir sanction. C’est une question d’équité »***.

En résumé, la loi Handicap existe depuis 18 ans, mais le chantier de l’accessibilité ne fait que commencer. Les mesures destinées à l’accélérer seront annoncées au printemps, lors de la CNR organisée tous les 3 ans.

* Propos tenus sur le site d’actualités Handicap.fr le 2 février 2023
** Chiffres communiqués par La Gazette des communes le 1er février 2023
*** Vœux pour 2023 aux acteurs du handicap le 25 janvier 2023

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Article rédigé par Cécile, le moteur de Quotidiag
Diplômée de philosophie, ex-bibliothécaire, prête-plume et rédactrice web, salariée et indépendante. Écrit quotidiennement des textes sur les diagnostics immobiliers depuis 2016.

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